samedi 18 janvier 2020

"Fred Frith, Nicolas Humbert, Marc Parisotto: Cut up the border" : un millefeuille triadique.

Film et Musique à l'honneur pour démarrer 2020 avec Jazzdor !
On vous donne rendez-vous les 16 et 17 janvier pour 2 projets exceptionnels à Strasbourg
[ CUT UP THE BORDER ]
Trente ans après sa réalisation, les bandes sons originales du mythique film “Step Across the Border” sont redécouvertes !
Des producteurs de radio en Allemagne proposent alors à Nicolas Humbert d’imaginer une oeuvre radiophonique à partir des sons retrouvés. En collaboration avec l’artiste sonore Marc Parisotto, ils composent “Cut Up the Border”. Fred Frith, protagoniste principal du film improvisera “live” sur le mix en direct de ces bandes resurgies du passé !

Evénement bien suivi, salle comble ce soir là pour un moment inédit de partage de musique d'aujourd'hui: en temps réel, devant nous, seul sur le plateau, Fred Frith, assis, guitare en main: c'est parti pour une performance inédite: sur la bande son déjà multi-couches, il saute sans filet sur les enregistrements passés, avec brio, surprise, étonnement: de son petit attirail proche de lui, instruments de la passion, prémédités, il va opérer, scanner le son, ausculter les timbres, inciser la masse sonore, sculpter de la matière sonore: avec des toupies, une brosse, un pinceau bien poilu, une chaine frottant un récipient de ferraille...Tout est bon dans le son! Et les strates de vibrer en tectonique géologique comme autant de feuilletage d'un palimpseste ressuscité. MillefeuIlle musical, visuel, l'opus incongru, singulier, unique fabrique de sonorités inouïes, fonctionne à plein, une bonne heure durant. Du calme à la tempête, du silence au fracas, du recueillement à la confession paienne d'un maitre de musique improvisée sur le champ. Filliou, Duchamp, Beuys se réveillent et jubilent dans cet esthétique sonore du danger, du risque du ratage, de l'à-côté.Il frappe, tape, caresse le dos de la guitare, la fait résonner en écho de la musique qui borde l'espace préparé. Ses deux compères aux consoles, le guident, le suivent, l'accompagnent, l'étonnent ou le déroutent dans cette aventure spatio-temporelle inédite, historique déjà! Sa voix, chant iroquois, mélopée de gourou, se fond avec l'environnement sonore, personnage à part entière.
Débordement de bruits hétéroclite, inconfortable position de l'auditeur qui vibre à l'unisson avec les trois protagonistes de cet oeuvre singulière: objet concertant non identifié, résurection de bribes de mémoire, d'instants de l'histoire du jazz, incarnée par des bien vivants compositeurs de l'akéatoire: un grand art de l'instant, sur la corde raide de la guitare qui se transforme en roche métamorphique pour charger l'atmosphère de plis, d'énergie, de chaleur et le temps passe.
Seul le son d'une mouche, fait effet de conclusion: Frith l'abat d'un son de couvercle jeté à sa face virtuelle: le hors-champ est délicieux, l'imaginaire travaille et les mains jointes, l'artiste, performeur d'un soir, se retire modestement.Et ça travaille encore chez l'auditeur-spectateur, témoin, passeur de ces instants qui touchent et distillent le temps avec ravissement. Un concert unique, gravé dans les mémoires de l'éphémère.

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Musique et paroles originales de Fred Frith, Tom Cora, Haco, Iva Bittová, Pavel Fajt, Ted Milton, John Zorn, Donald Frith, Robert Frank, Jonas Mekas.
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Vendredi 17 janvier
20H30
Jazz Club au CSC Fossé des Treize

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