Peut-on vouloir aimer ? Décider d’aimer ? Essayer d’aimer ? Qu’exprimons-nous à l’autre, que disons-nous de nous lorsque nous aimons ? Et que ressentons-nous quand l’amour nous est refusé ? Avec ses Love Scenes, Tabea Martin se saisit avec originalité d’un sujet vieux comme le monde certes, mais pourtant loin d’être épuisé. Ses quatre danseurs et danseuses en apportent la preuve on ne peut plus vivante : avec humour et fantaisie, tantôt passionné·es, tantôt mélancoliques, entre émotion et détournement des clichés, ces habitant·es curieux·ses d’un monde qui semble fait de neige et de glace déclinent les multiples scènes de notre besoin d’amour, de nos hésitations et de nos élans, de nos espoirs et de nos déceptions. Puisant à la source incontournable des Fragments d’un discours amoureux de Roland Barthes, la chorégraphe interroge notre rapport à ce sentiment étrange et pénétrant, avec en toile de fond une société empreinte d’individualisme où l’abandon de soi semble être devenu aveu de faiblesse.
Love story is back again..
Mais qui sont-ils ces quatre escogriffes tout de noir gainés: justaucorps, chaussettes haute, sabots de caoutchouc et surtout perruque hirsute, hérissée de longs poils noirs? Des hommes de cavernes croquant des morceaux de pierres blanches qui effritent et se délitent sous la pression de leurs mains et bras d'architectes de pacotille. Ils reconfigurent leur espace de jeu, piste de tapis de danse blanc, carré de néon suspendu et cadre improbable comme base de scénographie.Les blocs de craie ou de karst ,pâte blanche comme des pièces de jeu d'échec et mat! Tribu à quatre corps, trèfle à quatre feuilles nos "humains trop humains" parlent, s'expriment plus ou moins facilement dans des langues étrangères et modulent leur jeu, de la rage à la tendresse, leur danse de bodybuilding, disco, aérobic, ou autre gymnastique tonique..Et la musique de sourdre d'un cassettophone archaïque à l'envi!Danse abrupte presque caricaturale dans les hachés, coupures démantèlements brusques du corps pas trop bien traité. De la verve, de l'humour, un peu de ravissement frôlant la niaiserie ou le ravi de la crèche. Ils font la paire ces quatre espiègles aux yeux exorbités, aux sourires forcés à la dynamique endiablée. Tambour battant "love me, please love me"serait une mascarade des temps nouveaux qui conterait avec les corps, les embrassades, les sauts de joie, les effusions incontrôlées, les ébats autant que la rage, les remords, les interrogations à ce sujet. Deux solos pour exprimer aussi la solitude d'un repenti, en italien décalé bien trempé de haine ou de contentieux amoureux. Un deuxième sur Françoise Hardy et son"tous les garçons et les filles" chanté à capella pour le meilleur et le pire. Quand quatre ados rejoignent cette petite horde sauvage, c'est pour moi faire en miroir, surgir la vacuité de leur sort et des propos de cette génération perdue qui cherche sens et légitimité. L"amour, toujours et sous toutes ses formes abordables sans trop se faire mal, en ne cassant par des briques ni faire de vraies vagues sur un sujet si brulant dans le"genre" et toutes ces possibilités de transgressions perméables au monde. On aime, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie...ou pas du tout! Pathétique tableau vivant, burlesque, déjanté des amours contrariées, tutoyées, fautives ou perturbatrices. Ces hystériques en goguette fond le tour de piste dans des gravas de ruines blanchâtres déconstruites par leurs actes de sabotage. Et quand les perruques tombent, c'est la fin des hostilités: à vous de choisir entre réalité ou fatalité, entre bain de solidarité ou culpabilité narcissique...Broyer du karst comme de la poudre de perlimpinpin!Poudre aux vertus imaginaires vendue autrefois comme panacée par les charlatans, médicament inefficace, chose illusoire.Poudre aux yeux fardés de la renommée...
Au Maillon jusqu'au 22 Novembre




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