Alors quoi de neuf sur la planète Bory ?
Dans un décor bien planté, un Algeco transparent et un réservoir d'eau, comme dans les champs, un carré dessiné au sol, une femme vêtue de rouge franchit les barrières du convenu.
Robe ou partenaire qui se dévoile et se dédouble en véritable complice de formes étranges donnant naissance à des postures et attitudes quasi monstrueuses!La mue opère et elle se retrouve à l'intérieure de la boite, martelant le plancher, allant et venant, reculant furieusement dans cet espace si exigu, prolonger par un miroir dans lequel elle se reflète. Le guitariste, le chanteur qui ponctue et inspire tous ses gestes se joue de sa présence, lui dicte les sanctions, précède ou accompagne ses évolutions, verticales toujours, sèches et tranchées, de profil, rappelant la gestuelle de Israel Galvan. De judicieux éclairages dessinent des ombres portées, se lovant comme des sculptures de Marcus Raetz, vrillées et en miroir réfléchissant, en trompe l’œil! La vitre de l'Algeco embuée dissimule ses évolutions, étouffe le bruit, les sons des salves de ses martèlement furieux sur le sol.Des empreintes , des taches de son corps maculent la vitre comme les "antrophométries " de Yves Klein" La tension monte, enfle, grandit et l'on retient son souffle. De rouge, elle passe à la robe noire, fourreau seyant, épousant son corps, fort et gracile à la fois, sa chevelure noire, féroce atout de son ibérisme virulent; de l'eau envahit le sol, elle va y exécuter une danse digne d'un lac des cygnes,noirs, glissant, éclaboussant en goutte de lumière, l'espace visuel du plateau.Images saisissantes, rappelant Pina Bausch ou Michèle Anne de Mey, se jouant de l'élément liquide avec délectation dans une joie ludique et enfantine.Au final, c'est la chute, immergée dans le liquide qui telle Ophélie, la conduit dans les flots des eaux agitées de ce lac, eau dormante chahutée par le passage de cet oiseau incongru, digne d'un bestiaire fantastique.
Une fois de plus Aurélien Bory déconcerte, décale, interroge la matière et les espèces d'espace pour nous transporter dans des contrées et paysages insolites, vivant, troublant: comme cette vie agitée des eaux dormantes en surface. Et le flamenco, danse de feu et de sécheresse gestuelle de se coltiner de nouvelles aventures aquatiques du plus bel effet sonore et pictural!
AU TJP Grande scène jusqu'au 16 NOVEMBRE
A propos de.
Le metteur en scène Aurélien Bory fonde la Cie 111 en 2000. Il y développe un théâtre physique, singulier et hybride, à la croisée de nombreuses pratiques. Son intérêt pour les sciences influence son esthétique. Ses œuvres sont animées par la question de l’espace. Il ne conçoit son travail théâtral que dans le renouvellement de la forme, en laissant de la place à l’imaginaire du spectateur. Il a présenté au TJP trois spectacles : Sans objet, Plexus et Plan B.
Stéphanie Fuster est danseuse de flamenco, chorégraphe, interprète et pédagogue. Elle a longtemps vécu à Séville, berceau du flamenco où elle a étudié avec les maîtres de cet art. Elle danse notamment pour Israel Galvan et Juan Carlos Lerida, deux chorégraphes qui marqueront son parcours. De retour en France elle fonde à Toulouse La Fábrica Flamenca, espace dédié à la formation et à la création flamenca. Son travail s’attache à définir le geste flamenco, intense, pulsionnel et rythmique, loin de tout romantisme et clichés.
pour mémoire:Avignon été 2016
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire