lundi 27 février 2017

"Flexible Silence" de Saburo Teshigawara: l'oeuvre d'or !


Quand Saburo Teshigawara rencontre la musique de Messian et de Toru Takemitsu, prend alors corps une formule magique, condensé, concentré de cristaux qui se cristallisent se focalisent pour œuvrer dans le registre de la cérémonie, du rituel, du passage de la mutation.Et créer une matière plastique toute de lumière, de fulgurances corporelles, d'évanescence: du mystère s'il s'en faut !
Belle prestation pour l'occasion en live de L'Ensemble intercontemporain, présent sur scène et maître, métronome de ballet !

Création inédite devant nos yeux d'une danse libre, déliée de Saburo, de ses danseurs en lien étroit avec la présence des inteprètes musiciens "acoustiques".
Messian en ouverture avec son oeuvre "Fêtes des belles eaux" de 1937, musique intimiste, envoûtante, emplie de "silences", ceux qui font vibrer l'espace et les corps, ces silences intérieurs qui emplissent et se répandent en échos fertiles Teshigawara explore tous les interstices, les failles des plages musicales mélodiques pour inscrire dans l'espace, courbes et méandres, entrelacs et tissage de lenteur.Solo fulgurant, duos de choc, ensemble de danseurs virevoltants dans la candeur du noir et blanc: tout est "fait maison" de main de maître, unique créateur des lumières, costumes, décor et chorégraphie. Maitre de cérémonie, danseur hors pair aux gestes précis et mesurés, tournoyant en derviche, ému et enivré de musique et de frissons. Toujours fragile, stylé, rayonnant de modestie et de mesure, jamais dans la démonstration ni la "performance".Dans des cercles et ronds de lumière qui se multiplient, divaguent, et se franchissent à l'envi.


Les pièces de Toru Takemitsu sont de petits chapitres légers: "Air", comme le flux de la mer, le souffle et les respirations du vent, de l'air qui se déplace et fuit la pesanteur. Les corps font de même et glissent, rapides, vifs argent sur le plateau, lumières sculptant l'espace parfois comme des lignes de partitions imaginaires .Le souffle des instruments, la harpe égrainent de petites touches subtiles en rebonds multiples, en écho: les corps anticipent ou répondent, accélèrent ou s'immobilisent à l'envi et la magie opère.La danse envahit l'immense plateau de la salle de Chaillot , gravite, habite l'espace et le crée, en silence aussi dans le bruissement des pas et tracés des danseurs.
On es fasciné par la lenteur ou l'abandon à une gestuelle sobre, enroulée qui se couvre et se découvre en torsades répétées, signature de Saburo, signes et traces dans le vent.
Quel souffle ce soir là parmi danseurs, musiciens et public, emporté par ces ondes et mouvances tactiles, légères, ponctuées de sobriété, de recueillement, cérémonie de la beauté, musique de l'univers, rituel de bonheur.
Félicité d'une pièce rare, apaisante, envoûtante pour celui qui voudra bien se laisser prendre, ravir et capturer, porté par le charme de l'étrangeté.
"Flexible Sience" à Chaillot, TND à Paris jusqu'au 3 Mars

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