samedi 6 décembre 2014

Guillaume Cauchat: "il se passe des choses" à coups sûrs"!


Très calligraphique son coup de crayon, très chorégraphiques, ses dessins légers, fins qui représentent des silhouettes de personnages esquissées fébrilement, en noir et blanc comme de fugaces volutes. Corps en bataille, en attitudes ou posture de révolte.
Petites sculptures de fer à la Calder avec ses premières Joséphine Baker.
Humour, tendresse et détachement pour cet illustrateur hors pair.
 En nous entraînant dans le no man's land d'une écriture visuelle funambulesque, Guillaume Chauchat (1) nous avait bluffé avec son premier livre (paru en juin 2013) – le premier tome, en fait, d'une trilogie annoncée.
Il persiste et signe avec les mêmes protagonistes, qu'il retrouve quelques années plus tard. Un petit garçon, Samson, qui avait hérité du don familial séculaire de pouvoir tirer d'un louis d'or une inépuisable fortune mais n'arrivait qu'à en extraire de désolantes balles en caoutchouc noir, est devenu adulte. Et magicien célèbre, tout de même. Jusqu'au jour où son tour a foiré sous les huées du public. La Dalila de ce Samson-là essaie de percer son secret, se heurte à ses mensonges, ce qui entraîne leur couple dans une récurrente scène de ménage. En contrepoint, le même guitariste de rue continue d'improviser sur ce qu'il voit et entend, et supporte mal, cette fois, la présence d'un clochard alcoolique qui avait, prétend-il, l'habitude de boire un coup avec le magicien après le spectacle...

Chauchat s'était lancé dans cette histoire en pointillés, aussi minimaliste que millimétrée, sur un fil, sans filet. Il affine encore une épure de gestes, de silhouettes, de décors. Il fait le vide, il soustrait, il stylise, mais, par un remarquable tour de passe-passe, fait le plein de sensations et montre que, décidément, « il se passe des choses ». Cela tient à presque rien : un trait à la plume, c'est tout, mais quel trait ! D'une cocasserie distanciée, jamais plus évocateur qu'au bord de l'abstraction, avec, en splendides ponctuations traduisant l'irracontable, de ces volutes calligraphiées chères à Steinberg (référence et révérence assumées) dont Chauchat semble appliquer à la lettre le credo : « Ce que je dessine, c'est du dessin. » Un art du geste graphique qui laisse le champ libre à l'imagination et, délibérément à court de mots, se ­révèle peu bavard mais tellement loquace.

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