Système Castafiore |
Système Castafiore comme à son "habitude" habite un univers fantomatique avec grâce et désinvolture: c'est "Renée en botaniste dans les plans hyperboles", un titre évocateur d'une démarche originale, bizarre, singulière
Absurde, surréaliste ou simplement onirique leur regard sur le monde est celui d'un oeil d'or, orpailleur du secret, des srates de l'invisible de l'indicible.
Leurs personnages naviguent en eau profonde, traversent comme des fantômes l'histoire de la danse (évocation de Pina Bausch dans "Café Muller", de Rosella Higthower dans "Piège de Lumière", des "Algues" de Jeanine Charrat.....) De l'histoire du cinéma aussi avec ses cartons, ses dialogues référencés, ses artistes évoqués, ses chimères ou bestioles dignes des plus beaux films d'animation.Tati et Keaton veillent au grain dans l'ombre!
Beaucoupd'humour et de suspens, de gravité aussi, de tension.
La musique y a la part belle comme la vidéo et la scénographie qui flirtent avec le merveilleux, le fantastique. Architectures mouvante, des cubes et plaques circulent, avancent, reculent, se meuvent, tranchant des espaces réflexifs et ludiques charmants, ravissant l'âme!
Système Castafiore |
Ce dispositif toujours très sophistiqué mais compréhensible au premier degré comme un univers magique, lumineux est bien la griffe du duo Karl Biscuit et Marcia Barcellos, les complices de bien des aventures:ici celles de débusquer les fantômes et spectres de la mémoire vive, ceux qui hantent chaque pas des cinq danseurs façonnés par les couches de l'inconscient.
Quelle belle délivrance d'aveux esthétiques enfouis et resurgis au grand jour pour mieux enchanter la vie réelle avec les artefacts du monde virtuel.
Virgilio Sieni |
Virgilio Sieni dans "De Anima" trace et peint un univers à sa mesure, indiscipliné, indisciplinaire.
Inspiré des toiles de Tiepolo, de Piero de la Francesca, cet architecte, costumier, metteur en scène florentin, déborde de verve, d'allant et d'ingéniosité.
Univers inspiré par les pierrots lunaires ou arlequins de Picasso, le voici embarqué dans une aventure bondissante, pleine de charme, de poésie et de tendresse. Cinq danseurs, moulés de justaucorps peints de couleurs mordorées évoquent la comedia del'arte, la ruse, l'insouciance et la beauté.
Des carnets de croquis édifiants sont à l'origine de cette écriture singulière de sa danse, iconoclaste, anarchiste en diable.Comme autant de traces et signes d'une ébullition intellectuelle,qui confère tant de verve à cette pièce animée de turbulences, de chatoyances uniques. Clowns, saltimbanques pour ce festin, ce banquet de la vie à consommer sans modération.
Côté "showcase", deux coups de cœur: "Stimmlos" une maquette en devenir de Arthur Perole sur des extraits d'opéras de Wagner: comme une tempête apaisée de mouvements lents, lyriques, romantiques loin d'un néoclassisisme potentiel.
Du bel ouvrage très senti et bien interprété par des artistes en herbe, inspirés par les écrits de Baudelaire, comme autant d'êtres impalpables, de revenants venus nous parler du temps, nous dire "souviens-toi, vieux lâche, ilest trop tard"!
Et avec "Corps se Tait, mais le corps Sait Décorseter", la compagnie Reveida de Delphine Pouilly nous conte les élucubrations burlesques et tonitruantes d'un Woody Allen de la danse, manipulé par les fantasmes et interdits du judaisme!
Drôle, déroutante et autocritique, cette parodie des attitudes, poses, allures et autres postures socio-culturelles inonde le plateau d'ondes comiques et drolatiques.
Un univers de cabaret satirique et cocasse, très dénudé, impudique et cocasse!
Une belle œuvre en construction, un bel échafaudage à consolider dans la durée:prometteur et enthousiasmant travail!
Sharon Fridman |
"Al menos dos Caras" de Sharon Fridman se révèle un joyau de la dépense de deux corps une heure durant, se confrontant dans un duo de contact-danse des plus étourdissant.
Hypnotique parade d'une énergie à vous couper le souffle, c'est une ivresse de mouvements incessants de deux interprètes qui s'entrelacent, se repoussent s'étreignent sans fin alors qu'un décor mouvant manipulé par un troisième partenaire, fait office de tremplin, de détonateur.
On en ressort stigmatisé par la vision de ces corps galvanisés par un flux de musique incessant qui lie les tensions et détente, qui vous met en apnée, en suspension dans une empathie étrange et envoutante.Ces deux êtres, saltimbanques déboussolés, déguenillés ont une fluidité gestuelle fascinante, captivante qui ravit, capture et méduse par son authenticité par sa prise de risque à fleur de peau, de corps.
Un instant de grâce chorégraphique qui échappe au temps et dont la rémanence opère longtemps.
Blanca Li |
Dans un tout autre registre, ce même soir, c'est au tour de Blanca Li, d'opérer sur le plateau palais des festivals, avec "Robot!. Quand la chorégraphe trouve les moyens de donner le jour à ses fantasmes, ça fait "boom" et ça décoiffe.
Comme un show, une comédie musicale à gros budget, nous voici entrainés dans une vaste épopée épique sur la robotisation, face à la danse. Terrain miné, tant la question philosophique s'est posée depuis Kleist et son traité sur la marionnette..
Blanca Li prend le taurreau par les cornes et livre ici un divertissement, une fable à la hauteur de ses délires visionnaires. A la haute technologie, elle marie la tendresse, la vie et l'humanité On est d'abord frappé par le travail plastique sur la lumière, qui prend les corps comme des écrans réfléchissant couleurs et rayonnement des faisceaux lumineux La Loie Fuller, Nikolais ou Decoufle ne pourraient renier leurs influences sur ce travail.Inspirée, Blanca Li: par de multiples réflexions sur l'homme machine, la marionnette, le futurisme....Et par sa complicité avec Maywa Denki, maître, facteur de robots extraordinaires, capables sur scène d'exécuter des mouvements quasi humains à la différence près qu'ils semblent programmés!Une artillerie donc de personnages sous-dimentionnés, à la merci de leurs manipulateurs ou désobéissant à l'envi pour mieux arpenter ou danser en chorus.
La poésie demeure dans ce grand chaos spectaculaire, tentaculaire, signature de la chorégraphe, éprise de fantaisie et frôlant ici le "déus ex-machina" pour emprunter les voies de la recherche sur le mouvement.
On demeure impressionnés par cette figuration d'une révolution possible: le robot remplaçant le danseur?
Fiction et réalité se frôlent à chaque instant, exubérance, folie et overdose y sont les ingrédients pour savourer sans restriction les impacts subliminatoires d'un tel chantier.A déguster sans modération pour le plaisir de décoller de terre un instant: rêve de danseur depuis bien des "sylphides" ou autre Coppélia du genre!La musique et ses robots magiques et drolatiques y tient aussi le haut du pavé, tenant tête à la danse et parfois s'y substituant!Tonitruant! Ovations du public en liesse ce soir là pour la clôture du festival en grandes pompes!
Très belle et forte édition que ce cru 2013:du Festival de Danse de Cannes, la "city zen cannes " du mouvement!
Il va falloir au "successeur", du respect du travail accompli et encore de l'inventivité dans le champ du "curator", celui qui livre un choix, une programmation au delà des chapelles ou des canons sans soucis de bienséance ou de manières démagogiques.
A Frédéric Flamand qui "ose" depuis toujours les marges, les franges, les équilibres instables pour mieux bâtir en architecte, les fondamentaux de la danse et de ses spectateurs, coupde chapeau!!
Pour apprivoiser, ravir, capter, capturer et captiver ces publics multiples désormais aguerris, à l'affut à présent, aux aguets des expressions plurielles d'un médium multiple: la danse: un point, c'est tout: point-barre!!!
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