jeudi 9 février 2023

"EVE": je vis Eve sans Adam :"chanter c'est honorer l'oxygène": sans entrave, liberté je chante ton nom! Au féminin pluriel.

 


Voix de Stras' - EVE Strasbourg

par Chœur de Chambre de Strasbourg

Voix de Stras’, bâtisseuses de ponts
“Sous le titre « EMPOWER VOCAL EMANCIPATION », les « Voix de Stras' » lancent un programme exceptionnel, en coopération avec les chanteuses du chœur amateur de l’Asian University for Women de Chittagong au Bangladesh”

EVE - comme Empower Vocal Emancipation, "Donner voix à l’émancipation" - est le nom d'une aventure inédite portée par Catherine Bolzinger et son ensemble lyrique professionnel Voix de Stras’ et des chanteuses du chœur amateur de l’Asian University for Women (AUW) de Chittagong au Bangladesh. Cette aventure de partage de chants, de voix et de valeurs, a donné lieu à la création d'une œuvre commune mais aussi une tournée de concerts dont voici le premier à Strasbourg.Construit comme une mosaïque, le programme mêle les oeuvres qui vont suivre.

On démarre le concert avec les oeuvres arrangées par Lionel Ginoux à partir des chants récollectés sur place par Catherine Bolzinger, chaque pièce porte le prénom de la chanteuse qui a donné sa chanson.. C'est Visages, création pour choeur de femmes a capella. Autant de "petites nouvelles" musicales au format court, brève intrusion dans le monde sonore protéiforme, polyglotte et pluriel de ce récital. Une myriade de petits bijoux, constellation de sons, d'origines géographiques et linguistiques panachées.Un panel coloré, chromatique, une galerie de portraits sonores de tous les continents ou provinces visités musicalement. Un canon rythmé en ouverture, de beaux fortissimo dans les aigus, alors que la cheffe au centre du groupe en demi-cercle sur l'estrade signe de beaux gestes qi qong, hauteur, intensité,volume, en caressant l'air amoureusement. Une "berceuse" avec soliste et choeur ouaté où le son se perd, feutré, comme un doux murmure caressant. Une autre mélodie spirituelle, mystique où le son disparait peu à peu, fuit et se perd à l'horizon.Le tout ravigoré par l'énergie d'un chant bucolique, champêtre, alerte à la facture tectonique, gaie, joyeuse et entrainante. S'enchainent les vibrations cosmiques d'autres pièces, très dansantes que les huit femmes entonnent d'un même élan. Le tout ponctué par quelques citations littéraires de circonstances. De ces "visages" on retient la multiplicités des traits et caractères, la beauté des sons distillés à l'envi par ce "coeur" palpitant de femmes musiciennes en diable.

Suit de André Caplet, Messe à trois voix égales, pour choeur de femmes. Un "sanctus" vivant, singulier, très nuancé, recueilli, alerte et plein de bonnes vibrations.Au tour de Catherine Bolzinger de nous offrir une composition originale de son cru:"Yamunai Attrile". Des murmures à l'unisson tapissent l'espace, une voix en soliste en émerge, puissante, le tout rythmé, scandé en cadence. Une atmosphère joyeuse en sourd, des sourires se dessinent sur les visages des chanteuses, galvanisées par ces caquètements en canon, cette communauté de volatiles comme un paysage pastoral, une petite symphonie, condensé de sonorités atypiques. "Chanter, c'est comme honorer l'oxygène" disait Björk la chanteuse!

Avec la composition de Pascal Zavaro "Raison labiale" nous voici plongés dans un monde sonore d'onomatopées, de borborygmes, de curiosité vocales inédites très seyantes à l'ensemble.Soupirs, cris vont bon train, cavalcade pour une volière rieuse et enjouée: c'est drôle et percutant, chaotique à souhait, vivant .Des sifflets, des claquements de langues sur le palais, des essoufflements, des baisers: un panel sonore riche et très bien orchestré...On y chante comme on respire, la magie du chant choral opère, une "humanité augmentée" pour ces rencontres métissées, féminin-pluriel de toute beauté et sensibilité.Avec "Kharnaphuly" de Catherine Bolzinger, tout commence avec des percussions corporelles, un chant relevé, complexe enchevêtrement de citations musicales, incisives, dissonantes dans des aigus purs et limpides. Les "visages" de Lionel Ginoux succèdent avec un solo émouvant d'une chanteuse en tenue indienne à la voix timbrée, vibrante, simple émission très troublante d'émotion, de souffle léger parmi le public.Une ode très douce suit, en tenue soutenue, en couches sonores séduisantes pour à nouveau soutenir et accompagner la voix soliste. Comme un choeur universel plein d'influences sonores diverses puisées comme des trésors linguistiques et musicaux rares. Quelle récolte fabuleuse que ces pièces rapportées pour le meilleur de leur existence dans les mémoires et inconscient collectif des populations interrogées.

"Zingarelle" en hommage à Verdi de Catherine Bolzinger fait office de "correspondances" sidérantes entre vocalises classiques et théâtrales et sobriété des mélodies ethniques.Une belle soliste lyrique s'en empare pour donner au morceau toute sa légitimité dans ce programme d'un cru plutôt abrupte et sans fioriture.Le tout rehaussé par l'intervention du choeur, enrobant la voix, bordant les sons et enveloppant de chaleur la solitude vocale d'une muse "Echo"perdue dans ces paysages inconnus d'Orient. 

On embarque ensuite allègrement avec "Estaca"de Catherine Bolzinger pour une lecture plurielle d'oeuvres en citations qui s'enchainent virtuosement: on visite "Carmen" Ennio Morricone, un tango mythique et autres  fantaisies adaptées du répertoire, pour un voyage incongru et burlesque.Un melting pot humoristique sans façon, abreuvé de sonorités de références, en correspondance toujours avec les recherches musicales d'autres continents.C'est comme un poulailler enchanté, un paradis sonore accueillant qui ouvre les portes à la diversité sans négliger l'intégrité de chacune.Presque un final en conclusion. Mais une dernière prière cambodgienne vient nous bercer, c'est "Sophom"de Lionel Ginoux, encore une facette, un profil de ces "visages", une plainte gracieuse, recueillie à six voix, très habitée, incarnée, vécue d'un même souffle engendrant la vie.

Au final les dix chanteuses se groupent, solidaires, pour une unisson fédérative, libératoire et libertaire en hommage au chant qui unit et fait avancer la communauté.

Et la cheffe de nous conter la genèse d'un de ses morceaux: une légende d'entrave, de pieux empêchant la liberté de deux personnages reliés à un handicap: on peut franchir les montagnes et se libérer de son joug pour mieux apprécier la liberté et l'identité de chacun: un credo partagé par toutes celles qui sur l'estrade de la salle résonante et chaleureuse du Munsterhof ont fait office de bannière, de porte drapeau de l'empathie. Se délivrer des entraves pour mieux aller vers l'autre et partager cette expérience unique: des "EVE" sans Adam dans une échappé belle, une envolée sonore riche de vibrations pluri-elles.


  • Bela, chanson de la tribu tripura du Bangladesh
  • Novita, chanson du Timor oriental
  • Marjana, chanson d’une tribu chakma du Bangladesh
  • Roshani, chant de cueillette du Népal
  • Soma, chant patriotique de Rabindranath Thakur dit Tagore (répertoire bengali )
  • Sonali, chanson d’État de l’Assam
  • Marjana, chanson de la tribu Chakma du Bangladesh
  • Sophorn, prière cambodgienne
  • Mahla et Umayching, chanson de la tribu Marma du Bangladesh

NB : chaque numéro porte le prénom de la chanteuse qui a donné sa chanson.

Chansons européennes arrangées par Catherine Bolzinger :

  • Estaca, hymne à la liberté catalan
  • Greensleeves
  • Libertango, d’après Astor Piazolla
  • Die beste Harmonie, d’après Wolfgang Amadeus Mozart

 salle du Munsterhof le 8 Février à Strasbourg

A Breitenbach le 9 Février

 

"A un moment où le monde se rétrécit, secoué par les guerres, maladies et injustices qui font que les gens restent de plus en plus chez eux, de peur de l’Autre, les chanteuses des « Voix de Stras’ » se comportent de manière totalement anticyclique – avec un projet en coopération avec les chanteuses du chœur amateur de l’Asian University for Women de Chittagong au Bangladesh, Catherine Bolzinger et les membres de son ensemble lyrique professionnel – les artistes européennes et asiatiques construisent des ponts culturels qui sont de ceux dont le monde a actuellement besoin.

 

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