À la croisée de la marionnette et de la danse, la nouvelle création de Renaud Herbin prend pour titre un vers de T.S. Eliot. Sur scène, un quatuor agit à la lisière d’une foule suspendue, des marionnettes à longs fils stockées dans leur sac. Un paysage où les êtres sont en attente d’un devenir qu’ils ne maîtrisent pas. Cette masse ondulante telle une vague, enveloppe les interprètes en un seul et même corps. Les échelles se percutent : des entités miniatures composent un organisme géant, tandis qu’une marionnette d’environ un mètre tient tête aux interprètes.
Avec la complicité de la danseuse et chorégraphe Julie Nioche, la chanteuse et compositrice Sir Alice et le marionnetiste Aitor Sanz Juanes.
Fondu au noir pour découvrir un tapis de petits sacs clairs, couleur farine, en suspension grâce à un filet tendu : et c'est sans filet qu'une danseuse s'approche de dos de ce dispositif plastique étonnant, petite foule qui va s'animer, grouillante grâce à la manipulation à vue de deux hommes en noir, sur les côtés. Mille et un petits poids qui bruissent, enflent, se soulèvent comme une vague, une marée où va se glisser la danseuse.
Ca respire comme des poumons flottants dans une cage thoracique!
Elle se fraye un chemin, bascule, emportée par ce parterre qui flotte et s'élève, comme dans un flux et reflux, sacs et ressacs maritime....Comme de petites bestioles, ou des guerriers qui se déplacent sous l'effet du vent.
Ou une balançoire , un hamac qui bascule à l'envi.
Alors que les manipulateurs dansent, accompagnant ses mouvements lents, gracieux, fantomatiques.Poids, contrepoids pour cette ode à la mouvance!Ecume dans un bain moussant de jouvence où la danseuse se laisse ravir, emporter, submerger.
Comme dans "Nelken" de Pina Bausch, les objets sous foulés, respectés, promus au rang de partenaires bienveillants.
Puis la marionnette réapparaît pour un duo très "charnel" jeu de poids et de contact, danse proche des corps, épousant forme et respirations.
Les quatre habitants de cette planète singulière traversent ce rideau comme des harpistes frôlant les cordes du dispositif. Périlleux exercice de précision, de doigté, de respect de l'espace cinétique à conquérir ou apprivoiser !
Transformation aussi en grotte de stalactites pour une archéologie, une spéléologie de l'espace où le corps de la danseuse s'abrite, se love et vit d'une douce énergie
Les parois de petits sacs faisant office d'écrin, de boite magique. De petits pingouins sur la banquise, manchots attendrissants, groupés dans la fraternité du monde mouvant de cette foule bruissante.
C'est beau et l'émotion berce ce spectacle plastique, animé par l'énergie des corps avec grâce, volupté et plaisir partagé!
Une réussite signée de grands artisans du geste, du son, du déséquilibre. Un poème à l'horizon d'un monde imaginaire riche et plus que séduisant.
Au TJP jusqu'au 21 Octobre
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