mercredi 21 mars 2018

"La loi de la gravité": Actuelles 20 aux TAPS: Olivier Sylvestre: question de "genre"


La loi de la gravité, c’est l’histoire de Dom et de Fred, de l’année de leurs 14 ans, de leur rencontre en haut de la falaise et surtout d’une amitié qui sera profonde comme le fleuveà Presque-La-Ville. Dom et Fred trouvent en l’autre un refuge contre le monde où la norme tue. Au travers des trahisons que subit Fred et d’une histoire d’amour qui ravage Dom, se profile la quête d’un genre à soi, unique, qu’on doit imaginer, pour mieux vivre.


Faire entendre et faire circuler les textes de théâtre actuels, les confronter au public, inviter leurs auteurs-es à être à la fois les témoins et les parties prenantes de ce moment si particulier, favoriser les échanges et partager des émotions : tel est le principe d’ACTUELLES, ce temps fort de la saison du TAPS dédié aux écritures dramatiques

Les maquettes des cinq lectures sont exposées dans le hall: seule celle de la lecture de ce soir est dissimulée sous un tissu noir...On découvre alors la scénographie en pénétrant dans la salle de spectacle, entièrement reconfigurée, transformée pour l'occasion.Un exercice scénographie in situ et en temps réels des Quatre étudiants de la HEAR; le "décor" est planté et sera argumenté par les deux protagonistes: il y a en face d'eux, "la ville" avec ses grandes lettres blanches à la police radicale, droite et angulaire. Et, eux, sur des praticables tectoniques, à l'architecture bouleversée, fracturée, installe ou incertaine. Perchée sur cette structure, éclairée sur un fond bleu, se sera leur territoire, " presque la ville". Un pont reste à franchir qui fera l'objet des préoccupations de ce "couple" improbables, d'amis amoureux, d'amants : c'est "pas mal trop loin de la ville".
La métaphore est tissée, le dialogue qui s'installe entre Dom et Fred est bouleversant: faire connaissance, se faire des amis, se respecter, se disputer sera la marche à suivre tout au long de la lecture. Les deux comédiens Logan Persan et Stéphanie Félix sont l'incarnation de ses adolescents en quête d'identité: deux portraits saisissants d'êtres qui bouillonnent, qui hors de la norme, pas "pareils" gravitent dans la grâce, la tendresse. Vérité, authenticité, simplicité des personnages émeuvent Aux dires de Catherine Javaloyès, metteur en espace et partenaire, conteuse de la pièce, envisager l'être peut se placer dans l'amitié amoureuse,  ou l'amour amical. C'est cela qui l'a touchée dans le choix du texte d'Olivier Sylvestre.Un texte qui ose traiter du "genre" de l'identité qui oscille à l'âge où on cherche qui on est. Homme, femme, désir d'être un autre , défier les normes et assumer sa différence. Dom se veut homme, Fred se découvrirait bien femme et leurs prénoms, doublement sexués porte à la confusion, au trouble. Un "entre-deux" obscur et lumineux, drôle aussi parfois, histoire de "détendre" une ambiance tendue.Passer, franchir le pont pour aller vers la grande ville ou simplement là où l'on sera reconnu et considéré, respecté: c'est l'objet de leur quête. Le texte porte cet enthousiasme, ce rêve, cette foi en la vie et sa propre identité. On ne perd pas pied ni espoir dans cette urgence d'abolir les frontières.
Au Québec explique l'auteur qui se dévoile au final au public, le genre est aussi tabou: la rage contre les catégories figées s'exprime. Son désir d'écrire pour les adolescents dépasse de loin les limites d'âge et "La loi de la gravité" est universelle !
 Cette pièce "refuge", sur la falaise reculée où se réfugient nos deux anti-héros exclut dans la mise en scène l'apparition des autres personnages évoqués. A bon escient, on se concentre sur les vivants, ces deux tendres personnes qui se cherchent. La guérison du malaise, des blessures aura bien lieu, de l'autre côté du pont à franchir dans l'allégresse, pas la démission ni soumission aux lois de la conformité !
On rit aussi sur un sujet grave dans une narration fluide et suggestive. Quelques chuchoteurs en salle en profitent pour murmurer dans l'oreille des spectateurs assis au sol ou sur de petits praticables, quelques mots d'anniversaire pour les 20 ans des Actuelles Car quand on aime on a toujours 20 ans et l'on déguste, durant le temps de la discussion conclusive, le salé-sucré des souvenirs de jeunesse du chef Oivier Meyer...Et la musique de se faire écho à cette recherche:celle très inventive de Nicolas Beck, ponctuant au "tarhu" un instrument hybride ancestral, la narration truculente de nos deux personnages si attachants et émouvants
Histoire de genres, histoire de franchir les obstacles et assumer ses qualités!
Belle leçon de vie !
Pour mieux voyager encore après spectacle, une "fiche de salle" circule, comme un guide pour aller plus loin dans les univers musicaux et performatifs.r



CINQ SOIRÉES UNIQUES,CINQ TEXTES À DÉCOUVRIR…
La saison 2017-2018 accueille la vingtième édition d'ACTUELLES. 91 textes auront été lus depuis la première édition de ce temps fort débuté en 2005.
Le principe est toujours le même : cinq pièces sont sélectionnées par les artistes associés (Aude Koegler et Yann Siptrott cette saison) en collaboration avec le comité de lecture du TAPS.
Ils les confient ensuite à des directeurs-trices de lecture qui constituent leur équipe d’interprètes pour assurer la mise en voix, et de musiciens-nes pour composer la partition sonore.

Chaque soir, un texte est ainsi présenté au public, dans une forme simple privilégiant le rapport direct entre les artistes et les spectateurs. Cinq équipes d’étudiants-es de la section scénographie de la Haute École des Arts du Rhin (HEAR), accompagnés par leurs enseignants et l’équipe technique du TAPS, prennent en charge la mise en espace de chaque lecture, tandis que le cuisinier Olivier Meyer (Kuirado) concocte des mises en bouches inspirées par les textes et dégustées au fil de la soirée. Des étudiants en dramaturgie de la section Arts du spectacle de l’Université de Strasbourg composent les feuilles de salle et proposent, pour chacun des textes, des pistes de réflexion singulières.

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