Oum
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Du 03/03/2020 au 04/03/2020
Originaire du Maroc, Fouad Boussouf a été bercé par la musique arabe.
Devenu chorégraphe, il y puise une inspiration mêlée de souvenirs. OUM,
hommage à la célèbre cantatrice Oum Kalthoum, officie entre images de
films et danse hip-hop, entrelaçant mémoire collective et actualité.
Dès ses débuts, Fouad Boussouf interroge sa double culture, marocaine et française, tant du côté de la musique que de la danse. A la virtuosité du hip-hop, avec ses figures, ses défis, il mêle d’autres apports issus des rites d’Afrique du Nord, des rythmes et des états de corps proches de la transe.
Le souffle, le plaisir du mouvement continu, la recherche d’une énergie collective qui réunit danseurs et spectateurs, sont présents dans chacune de ses créations, faisant de son écriture une quête perpétuelle d’équilibre entre deux mondes.
Après Transe (2013) et Näss (les gens) - pièce accueillie par POLE-SUD la saison dernière - Fouad Boussouf présente sa récente création, OUM, qui vient clore sa trilogie consacrée au Maghreb et au monde arabe.
Percussions au sol, sauts, rebonds et vibrations entre les interprètes font surgir une danse contrastée, en dialogue avec la voix de l’une des divas de la musique arabe, Oum Kalthoum. Une émotion teintée de nostalgie traverse l’écriture du chorégraphe, à l’image de son propos : « je souhaitais faire revivre une période où danse, musique, chansons d’amour et poésie faisaient partie du paysage culturel des grandes capitales arabes. »
Le plateau se peuple des musiciens et danseurs, une silhouette gracile danse devant un rideau de longs fils blancs mobiles et souples...Ambiance recueillie, quasi religieuse, chant et danse solo, mêlés, une lumière , ampoule en balancier métronome,rythme en pendule, chronomètre, la séquence. Elle récite, de dos, une douce poésie, prière ou simple prise de parole, celle d'une femme dont le corps souple se torsade, se love, fluide et pensant.
Le chœur, récitant archaïque pour l'accompagner.Une langue tonique et scandée, riche de rythmes et timbres arabisants.La musique démarre, deux officiants au pupitre, alors qu'un groupe s'est formé, de dos, et parle encore des "quatrains d'Omar Khayyam, tel le cantique des cantiques, version coranique: "réveillez-vous et remplissez le verre du désir..."
Très beau texte, traduit dans la feuille de salle distribuée ce soir là: à conserver comme petite bible quotidienne....
Dodelinant de la tête, le groupe déambule, proches les uns des autres, compact. A petits pas, petite marche légère, mesurée. Tous en costume de ville, couleurs marron, gris, discrètes touches couleurs terre et sable. Vestes et pantalons unisexe. Quelques uns s'isolent, dans une cadence hachée, mécanique de mouvements, échappée belle. Cambrures et échine pliée vers la terre. L'un deux esquisse des gestes "académiques", tour et détours savants et virtuoses, passés à la syntaxe contemporaine. Style qui reviendra durant la pièce, comme motif et ornement ethnique de notre culture européenne.
De belles suspensions aussi, élévations, tranchant dans le vif d'une danse auparavant plus terrienne.Des sautillements collectifs, entrainants, font la joie d'une dynamique progressive, le collectif en ronde fédérative.Morcellement et fluidité des gestes en poupe.
La musique booste les corps, à l'écoute des résonances et vibrations des percussions ou guitare, oud et instrument à cordes.
Des tournoiements rapides sur place pour hypnose, derviche tourneur en état de grâce, de lévitation lente et enivrante.Le tournis se propage, séduisant et très esthétique figure en spirale ascendante qui donne le vertige. A différents niveaux de sol et d'espace.
Un danseur à l'énergie féline, africaine de souche, fertilise le geste d'une danse déjà empreinte de notes folkloriques arabes. Dans une mêlée chorale et solidaire les six danseurs avancent et se compactent.
Petite marche collective psalmodiée.La vision d'un duo, en appui, tête à tête, délivre une belle danse, fluide, et un porté en hélice tournoyante en sourd, vertigineux
Comme des vagues ondulantes, les corps se passent les ondes qui les traversent. La verticalité, les axes, pivots, piliers mouvants fabriquent des architectures précises, taillées,dans la matière mouvante, les corps comme instruments de bâtisseurs d'empire.
Les maillons de chaines corporelles en échos à une écriture balanchinienne, de points de crochet et chainettes. Point de lignes, points de fuite.
Des "pauses" nous laissent le loisir de prendre en compte ses sculptures en ronde bosse visuelle.
La roue tourne, le temps s'écoule pour cette tribu, horde ou meute docile, joyeuse et fébrile.Telle une bestiole inouïe, une créature mouvante, la statue évolue, se métamorphose, se transforme à l'envi. Rêve de facteur d’œuvres hiératiques.
Une voix éloignée les rappelle, tel un muezzin à l'horizon musical très marqué par les rythmes et harmoniques arabisantes.Des entrelacs périlleux, acrobatiques, une femme dressée en figure de proue, telle un Delacroix, et les évocations, citations ou images, défilent.
Joie de danser communicative, entrainante, chacun son battle pour aussi signifier sa singularité, sa virtuosité personnelle: signatures multiples mises en scène dramaturgiquement comme autant de personnages attachants.
Tambour et tambourin, présents, accompagnant, transportant gestes et énergie avec empathie et charisme.
Un appel réjouissant au soulèvement, à l'éveil, à l'alerte : "réveille toi, ombre légère..."
Un beau solo hip-hop revisité, transfiguré sur fond de lumière blanche, en silhouette noire découpée, borde un solo de guitare électrique, change la donne
On verse vers une contemporaneité assurée. Un autre danseur, derrière le rideau se joue de ses franges, fluides et mouvantes comme un souffle qui parcourt ce décor mobile, plein de surprises plastiques.
De l'art cinétique en mouvement, le corps comme moteur que Julio Leparc ne renierait pas !
Les bras ondulants comme des vagues: des images de toute beauté.
Dans un entre-deux, flouté de lumières, de musiques, de corps en mutation gracieuse.
Le groupe se reforme, frémit dans une gestuelle vibrante, frétillante des épaules et bassins méditerranéens.
On a tombé la veste pour mieux se libérer dans des teintes brunes et grises, proches du terreau, du terroir. Les cheveux fous tournoient, le sol s'empare de roulades et autres désirs de rompre avec l'éther, un martellement musical réveille et assure aux danseurs une vigilance rythmique virtuose.
D'un mouvement commun, le rideau devient torsade sous l'impact des passages furtifs et forme un arbre, un chandelier majestueux, symbole de différence, de singularité universelle: la danse une fois de plus comme vecteur d'identité et pas de nationalisme ni enfermement: un rhizome à suivre et partager dans la pénombre qui aspire au finale ce petit peuple multiforme, polyphonique qui disparait sous les ovations d'un public, conquis, séduit, ravi par cette proposition artistique forte, empreinte de désir, de joie et de lumières
Passer à travers le miroir et de l'autre côté, gouter aux saveurs de l'exotique singularité des différences.
Après Transe en 2013 et Näss (Les gens) en 2018 présenté lors de la 20e Biennale, Fouad Boussouf clôt avec Oüm une trilogie consacrée au monde arabe. En effet, les grands bouleversements depuis plusieurs décennies dans cette région viennent résonner avec les souvenirs personnels du chorégraphe, teintés de musiques et de danses traditionnelles. Il continue ainsi sa recherche sur une danse physique, tribale, où les corps sont poussés jusqu’à l’épuisement, à la manière de la transe répétitive, méditative, objet récurrent de son travail.
D’Ahmed Rami, à Omar Khayyam en passant par Oum Kalthoum
« Avec cette création, je fais le souhait de créer un rendez-vous poétique où communient les différents interprètes et de faire revivre une période où la danse, la musique et la poésie faisaient partie du paysage culturel des grandes capitales arabes. » Fouad Boussouf
France, Maroc / 6 danseurs + 2 musiciens / 1h / Coproduction POLE-SUD, CDCN / Tout public + 11 ans
Dès ses débuts, Fouad Boussouf interroge sa double culture, marocaine et française, tant du côté de la musique que de la danse. A la virtuosité du hip-hop, avec ses figures, ses défis, il mêle d’autres apports issus des rites d’Afrique du Nord, des rythmes et des états de corps proches de la transe.
Le souffle, le plaisir du mouvement continu, la recherche d’une énergie collective qui réunit danseurs et spectateurs, sont présents dans chacune de ses créations, faisant de son écriture une quête perpétuelle d’équilibre entre deux mondes.
Après Transe (2013) et Näss (les gens) - pièce accueillie par POLE-SUD la saison dernière - Fouad Boussouf présente sa récente création, OUM, qui vient clore sa trilogie consacrée au Maghreb et au monde arabe.
Percussions au sol, sauts, rebonds et vibrations entre les interprètes font surgir une danse contrastée, en dialogue avec la voix de l’une des divas de la musique arabe, Oum Kalthoum. Une émotion teintée de nostalgie traverse l’écriture du chorégraphe, à l’image de son propos : « je souhaitais faire revivre une période où danse, musique, chansons d’amour et poésie faisaient partie du paysage culturel des grandes capitales arabes. »
Le plateau se peuple des musiciens et danseurs, une silhouette gracile danse devant un rideau de longs fils blancs mobiles et souples...Ambiance recueillie, quasi religieuse, chant et danse solo, mêlés, une lumière , ampoule en balancier métronome,rythme en pendule, chronomètre, la séquence. Elle récite, de dos, une douce poésie, prière ou simple prise de parole, celle d'une femme dont le corps souple se torsade, se love, fluide et pensant.
Le chœur, récitant archaïque pour l'accompagner.Une langue tonique et scandée, riche de rythmes et timbres arabisants.La musique démarre, deux officiants au pupitre, alors qu'un groupe s'est formé, de dos, et parle encore des "quatrains d'Omar Khayyam, tel le cantique des cantiques, version coranique: "réveillez-vous et remplissez le verre du désir..."
Très beau texte, traduit dans la feuille de salle distribuée ce soir là: à conserver comme petite bible quotidienne....
Dodelinant de la tête, le groupe déambule, proches les uns des autres, compact. A petits pas, petite marche légère, mesurée. Tous en costume de ville, couleurs marron, gris, discrètes touches couleurs terre et sable. Vestes et pantalons unisexe. Quelques uns s'isolent, dans une cadence hachée, mécanique de mouvements, échappée belle. Cambrures et échine pliée vers la terre. L'un deux esquisse des gestes "académiques", tour et détours savants et virtuoses, passés à la syntaxe contemporaine. Style qui reviendra durant la pièce, comme motif et ornement ethnique de notre culture européenne.
De belles suspensions aussi, élévations, tranchant dans le vif d'une danse auparavant plus terrienne.Des sautillements collectifs, entrainants, font la joie d'une dynamique progressive, le collectif en ronde fédérative.Morcellement et fluidité des gestes en poupe.
La musique booste les corps, à l'écoute des résonances et vibrations des percussions ou guitare, oud et instrument à cordes.
Des tournoiements rapides sur place pour hypnose, derviche tourneur en état de grâce, de lévitation lente et enivrante.Le tournis se propage, séduisant et très esthétique figure en spirale ascendante qui donne le vertige. A différents niveaux de sol et d'espace.
Un danseur à l'énergie féline, africaine de souche, fertilise le geste d'une danse déjà empreinte de notes folkloriques arabes. Dans une mêlée chorale et solidaire les six danseurs avancent et se compactent.
Petite marche collective psalmodiée.La vision d'un duo, en appui, tête à tête, délivre une belle danse, fluide, et un porté en hélice tournoyante en sourd, vertigineux
Comme des vagues ondulantes, les corps se passent les ondes qui les traversent. La verticalité, les axes, pivots, piliers mouvants fabriquent des architectures précises, taillées,dans la matière mouvante, les corps comme instruments de bâtisseurs d'empire.
Les maillons de chaines corporelles en échos à une écriture balanchinienne, de points de crochet et chainettes. Point de lignes, points de fuite.
Des "pauses" nous laissent le loisir de prendre en compte ses sculptures en ronde bosse visuelle.
La roue tourne, le temps s'écoule pour cette tribu, horde ou meute docile, joyeuse et fébrile.Telle une bestiole inouïe, une créature mouvante, la statue évolue, se métamorphose, se transforme à l'envi. Rêve de facteur d’œuvres hiératiques.
Une voix éloignée les rappelle, tel un muezzin à l'horizon musical très marqué par les rythmes et harmoniques arabisantes.Des entrelacs périlleux, acrobatiques, une femme dressée en figure de proue, telle un Delacroix, et les évocations, citations ou images, défilent.
Joie de danser communicative, entrainante, chacun son battle pour aussi signifier sa singularité, sa virtuosité personnelle: signatures multiples mises en scène dramaturgiquement comme autant de personnages attachants.
Tambour et tambourin, présents, accompagnant, transportant gestes et énergie avec empathie et charisme.
Un appel réjouissant au soulèvement, à l'éveil, à l'alerte : "réveille toi, ombre légère..."
Un beau solo hip-hop revisité, transfiguré sur fond de lumière blanche, en silhouette noire découpée, borde un solo de guitare électrique, change la donne
On verse vers une contemporaneité assurée. Un autre danseur, derrière le rideau se joue de ses franges, fluides et mouvantes comme un souffle qui parcourt ce décor mobile, plein de surprises plastiques.
De l'art cinétique en mouvement, le corps comme moteur que Julio Leparc ne renierait pas !
Les bras ondulants comme des vagues: des images de toute beauté.
Dans un entre-deux, flouté de lumières, de musiques, de corps en mutation gracieuse.
Le groupe se reforme, frémit dans une gestuelle vibrante, frétillante des épaules et bassins méditerranéens.
On a tombé la veste pour mieux se libérer dans des teintes brunes et grises, proches du terreau, du terroir. Les cheveux fous tournoient, le sol s'empare de roulades et autres désirs de rompre avec l'éther, un martellement musical réveille et assure aux danseurs une vigilance rythmique virtuose.
D'un mouvement commun, le rideau devient torsade sous l'impact des passages furtifs et forme un arbre, un chandelier majestueux, symbole de différence, de singularité universelle: la danse une fois de plus comme vecteur d'identité et pas de nationalisme ni enfermement: un rhizome à suivre et partager dans la pénombre qui aspire au finale ce petit peuple multiforme, polyphonique qui disparait sous les ovations d'un public, conquis, séduit, ravi par cette proposition artistique forte, empreinte de désir, de joie et de lumières
Passer à travers le miroir et de l'autre côté, gouter aux saveurs de l'exotique singularité des différences.
Après Transe en 2013 et Näss (Les gens) en 2018 présenté lors de la 20e Biennale, Fouad Boussouf clôt avec Oüm une trilogie consacrée au monde arabe. En effet, les grands bouleversements depuis plusieurs décennies dans cette région viennent résonner avec les souvenirs personnels du chorégraphe, teintés de musiques et de danses traditionnelles. Il continue ainsi sa recherche sur une danse physique, tribale, où les corps sont poussés jusqu’à l’épuisement, à la manière de la transe répétitive, méditative, objet récurrent de son travail.
D’Ahmed Rami, à Omar Khayyam en passant par Oum Kalthoum
« Avec cette création, je fais le souhait de créer un rendez-vous poétique où communient les différents interprètes et de faire revivre une période où la danse, la musique et la poésie faisaient partie du paysage culturel des grandes capitales arabes. » Fouad Boussouf
France, Maroc / 6 danseurs + 2 musiciens / 1h / Coproduction POLE-SUD, CDCN / Tout public + 11 ans
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