vendredi 5 novembre 2021

"Traversée de l'Atlantique": convergences, concor-danses et autre connivences !L'OPS fait son embarquement immédiat pour des contrées lointaines....

 


Le son lumineux d’Arabella Steinbacher – qui joue le Stradivarius Booth de 1716 – convient particulièrement bien au Concerto de Brahms. Cette page d’un romantisme luxuriant a été imaginée sur les rives du Wörthersee où « les mélodies naissent en tel nombre qu’il faut prendre garde en se promenant de ne point les écraser », selon son auteur. Elle dialogue avec la Symphonie n°9 « du Nouveau Monde » de Dvořák composée aux États-Unis. Si des influences américaines y sont effectivement perceptibles (le poème The Song of Hiawatha de Longfellow irrigue, par exemple, le deuxième mouvement), l’œuvre est également zébrée d’une nostalgie venue de Mitteleuropa. Certains la considérèrent ainsi comme une « symphonie du monde entier ».

 

CONFERENCE D'AVANT-CONCERT

JEUDI 4 NOVEMBRE 19H - SALLE MARIE JAËLL, ENTREE ERASME 
LE CONCERTO POUR VIOLON EN RÉ MAJEUR DE BRAHMS
DANIEL PAYOT


Embarquement immédiat sur le paquebot avec Daniel Payot, philosophe et pédagogue de charme pour naviguer "contre le violon", tout contre en cabotage "non tropo"mais vivace et allegro comme les trois mouvements de cette "pièce unique" à l'image de celle de Beethoven: un concerto pour violon et orchestre!


La question posée sera quelle intention, quelle direction prendra ce chef d’œuvre entre classicisme et romantique, vers quelle "confusion" s'orientera le choix et du chef et de la violoniste soliste.Car il y a une certaine "liberté" qui plane sur l'interprétation: qui l'emportera du socle , de l'ordre, de la stabilité, de l'équilibre entre tectonique architecturale et "esprit de variation" de l'écriture dynamique chez Brahms. Après avoir situé l’œuvre dans le contexte historique et biographique du compositeur, Daniel Payot nous convie à l'écoute fragmentée des trois mouvements, histoire de sensibiliser à la place du violon face à l'orchestre.La tension demeure, l'ampleur de ce "ré" mineur omniprésent dans cette "copie bondissante" du maitre Beethoven.Dans l'allegro, l'idée d'une symphonie pointe à l'aube du morceau, introduction orchestrale pour la présentation des thèmes.L'entrée du violon, tsigane en diable, discrète, tisse les premiers liens entre l'instrument et l'ensemble des pupitres.Accords des "voix", domination ou liberté du violon...Et cette "cadence", figure de style et de rhétorique pour ce solo avec moultes variations, au cœur de l’œuvre.L'adagio comme une longue phrase, une articulation possible entre le violon soliste et la masse de l'orchestre.Pour instaurer un climat nostalgique, serein, en avancée sonore et dramatique, en dialogue avec les bois, pour que le violon roi se détache sans se séparer des cordes et autres instruments.Quant au troisième mouvement, très différent, le violon s'y impose dans le ton, le rythme, les thèmes en reprise pour le bonheur enjoué très touche hongroise de l'orchestre. Empressement, galop, rythme dansant.Entre élan et liberté et architecture plus stricte, on y souligne les intensités, le moteur demeurant l'esprit de variations du thème, comme une base, un socle qui "bouge", voyage.Contrastes et liaisons en poupe, soutenus, syntaxe des phrasés musicaux comme une plaidoirie éloquente et rigoureuse à la rhétorique implacable d'une écriture criblée de nuances, de ponctuations, de modulations surprenantes!Comme une conversation vivante qui ne tait pas les singularités des autres instruments: une œuvre "hérisson rouge" stimulante et bigarrée, libératoire et couronnée de toute beauté. On quitte le conférencier, l'eau à la bouche avec des clefs d'écoute et de lecture qui vont fonctionner à merveille sans pour autant déflorer l'oeuvre de sa parure unique et merveilleuse... 

Weber Ouverture d’Obéron

Le concert  débute par cette pièce, lente et douce introduction à cette embarquée musicale où vents et cordes se lient dans une vivacité, une allégresse, un galop pur, plein de contrastes, quasi valse qui en sourd, élégante, princière. Précipitation des tempi, emphase, intensité et volume pour un emportement dans des flux ascendants, ou de légères modulations. La pièce est courte, tonique et introduit la soirée avec brio et bonheur. Les retrouvailles avec le chef Marko Letonja y étant pour beaucoup!

 
Brahms
Concerto pour violon en ré majeur

Cette œuvre est remarquable par les articulations qu’elle propose entre construction de longues phrases continues et multiplicité de détails, contrastes ou divergences que ces phrases contiennent. Refusant à la fois la fusion dans un tout indifférencié et la désagrégation, elle maintient une constante tension, que le dialogue du violon solo et de l’orchestre relance sans cesse et finit par résoudre dans une dynamique festive. Alors vint cet instant si désiré, l'écoute "savante et éclairé" de ce concerto!L'entrée est magistrale, envolées du violon sur le soutien inébranlable de l'orchestre, imperturbable compagnon de toute la pièce.Symbiose très délicate et raffinée, l'ensemble des cordes soutenu et magnifié par la soliste Arabella Steinbacher qui jamais n'écrase ni prend le dessus dans toutes les brèches ouvertes, les interstices tissés par la composition stricte du morceau.Le solo incisif, virtuose dans des modulations infimes et distribuées avec parcimonie et précision incroyables...Telle une voix céleste diffuse, très raffinée, imperceptible filet de sons soutenus se fondant à nouveau dans l'orchestre, retenant de ses mailles, les sons divins de l'instrument!En lévitation puis de nouveau ancré au final de ce premier mouvement.Après une "promenade dans les bois" en osmose avec violon et orchestre, les deuxième et troisième mouvements s'alignent dans cette harmonie tectonique autant que fluide, l'orchestre toujours comme écrin pour le violon qui se déchaine dans le flux sonore, dans les reprises rehaussées, puissantes dans une osmose conjuguée, construite, préméditée. Le chef "plongeant" littéralement dans cet univers, ce climat si singulier: oui, "on aime Brahms"galvanisé par son écriture galopante, entre délicatesse recherchée et architectonique invasive si bien rendue par cet orchestre tenu de main de maitre par un chef inspiré et respectueux, inventif et intuitif.


Dvořák
Symphonie n°9 en mi mineur « du Nouveau Monde »

On ne se refusera pas l'écoute d'un chef d’œuvre dont le premier mouvement impose ce flux submergeant, envahissant à la puissance "territoriale" d'espaces , tornade magistrale, maelstrom, tsunami virtuose de musique fort connue. Solennel et quasi funèbre second mouvement, lent déploiement des thèmes, paysages, étendues changeants, très calme pour rendre et restituer à l’œuvre l'émerveillement qu'elle mérite Les gestes musicaux où chacun trouve sa place sans nuire ni porter ombrage à l'autre instrument. Œuvre "archi connue" dont on suit ou précède les accents, initiant une écoute qui anticipe et reforme les contours de notre mémoire sensitive, sensuelle et sonore.On demeure aux aguets, à l'affut d'une surprise.Le troisième mouvement plein de suspens, d'attente en atteste, comme des éclaircies dans le ciel, une clairière qui s'ouvre au détour du chemin.La majesté des chevauchées "fantastiques" en faisant une ode, une narration débordante de satisfaction face au nouveau monde dévorant, évoqué.Envahissement, invasion péremptoire des thèmes redondants et récurants en masses sonores tectoniques des plaques, ou touches infimes de sonorités des vents qui se glissent dans cet amas de scories volcaniques éruptives! Le quatrième mouvement, volcan au cratère bien en activité, galvanisant l'orchestre en galop, course folle à la conquête de l'Ouest dans une éloquence sonore imposante.Du solide, du stable imposant, implanté, ancré sur un socle magnifiant les forces autoritaires d'un nouveau continent qui s'ouvre, se découvre et se protège dans sa rhétorique sonore implacable!Tell un paquebot qui arrime au port et soulève les adhésions et l'empathie des acteurs de la fondation des USA.Gros calibre américain, création du monde ou naissance d'une nation, paysages très filmiques et cinématographiques au montage et découpage savant et emblématique d'une architecture sans faille.Cors, trombones et vents à tout vent, chasse à courre irrévocable en blocs sonores incontournables , grisants, émulation politique et musicale de poids et de mesures! Euphorisante interprétation, ravageuse lecture de cette œuvre phrase de la construction d'un nouveau monde inébranlable...La reprise du thème en envolée finale, histoire de rassurer en épilogue "happy end" très attendue.

Marko LETONJA direction, Arabella STEINBACHER violon

Lieu
Palais de la Musique et des Congrès le 4 Novembre

 

 

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