Norma Vincenzo Bellini Nouvelle production de l’OnR.
Opéra en deux actes.
Livret de Felice Romani.
Créé le 26 décembre 1831 à Teatro alla Scala de Milan.
Alors que la lune est déjà haute dans le ciel, une foule d’adorateurs bruisse de mille rumeurs. Celle qu’ils attendent avec tant d’impatience viendra-t-elle exercer devant eux son art mystérieux ? Certains en doutent, d’autres guettent fébrilement son apparition. Enfin, le silence se fait et leur idole s’avance à leur rencontre pour se prêter au culte ancestral, les yeux fermés et les bras croisés sur une parure sublime. Le temps semble suspendu à ses lèvres qui forment sur son visage impénétrable un sourire énigmatique. Le miracle tant désiré se produit : sa voix d’or s’élève dans le plus grand des recueillements pour entonner son hymne éternel, « Casta Diva », dédié à la déesse lunaire. Derrière cette assurance sans faille se dissimulent pourtant les blessures d’une femme trahie dans son amour et lasse de son sacerdoce.
De tous les rôles du bel canto romantique, celui de Norma est
réputé comme l’un des plus exigeants, nécessitant de la part de son
interprète des qualités exceptionnelles. Délaissé au début du XXe
siècle, c’est Maria Callas qui le sort de son oubli relatif et fait de
sa cavatine un air signature, allant jusqu’à proclamer : « Bellini a
composé Norma pour moi. » Depuis, les plus grandes interprètes
s’en sont emparées. C’est au tour de Karine Deshayes de perpétuer cet
héritage dans un nouveau spectacle de Marie-Eve Signeyrole dirigé par
Andrea Sanguineti.
De la Callas, il sera question tout au long de cette adaptation audacieuse du livret de Norma. Qui est le clone de qui? Callas faite Norma pour la postérité, la légende et l'éternité! La difficulté d'être soi-même pour une icône de la voix, du belcanto, de l'opéra.L'orchestre introduit l'action, les intrigues et autres rebonds d'une histoire singulière. Entre Gaulois et Romains, ce village d'Astérix redonde d'images de mise en scène qui glisse d'un espace à un autre grâce à cette mythique scène tournante, ici surexploitée. Quatre espaces où les personnages vont et viennent, se glissent à travers le miroir et nous guident dans les méandres physiques et psychologiques de Norma, figure et idole adulée. Mais oh combien humaine et troublante. Le morceau de bravoure, ce "Casta Diva" qui habite plus d'un mélomane, file sans heurt. Karine Deshayes incarne cette femme de légende avec aisance, noblesse et respect. Sa voix puissante autant que modulée en fait une passeuse d'émotions, de grandeur: entre pudeur et folie meurtrière et destructrice. Face à elle dans un duo extraordinaire, Adalgisa, Benedetta Torre rivalise de charme et de technicité vocale, prouesse et vertige des aigus, densité et rondeur des vocalises, fuite des mélodies savantes. Une caractéristique des opéras de Bellini, entre récitatifs et chant lyrique.Le destin fait traverser des lieux incongrus aux personnages qui passent d'un lieu à l'autre, la scène tournante, comme un livre dont on feuillette les pages en les tournant.
Des images vidéo au dessus des têtes pour troubler l'espace, les dimensions entre réalité, fantasme, mémoire et fiction. Callas nous livre des propos épistolaires scellés sur l'écran, alors que Norma se débat avec sa destinée.Décor et costumes plutôt sombres, contemporains ou échappés d'une époque révolue. Noir, c'est noir pour cette égérie de l'Opéra, cette oeuvre que l'on rencontre ici avec bonheur et intérêt. Les hommes de l'histoire, Pollione, Norman Reinhardt et Oroveso, Onay Kose comme de véritables partenaires de plateau pour ces deux divas de la tragédie. L'orchestre et le choeur en osmose avec la narration musicale, puissante et très présente, ornement de poids de cet opéra fétiche. Les histoires s'entremêlent, Callas et son environnement social et artistique se fondant avec les héros de l'opus. Une position, proposition originale de la metteure en scène, radicale, Marie Eve Signeyrole qui peut se défendre pour aboutir à une complexité étrange. Un spectacle qui tient de la prouesse vocale assumée, à la tourne inévitable de destins qui font "révolution", retour éternel et répétition des affres de la vie agitée de ces figures de proue de l'Opéra. Cap sur l'actualité de l'époque de la Callas, obnubilée et prisonnière de son image, fatal déclin et descente aux enfers en filigrane.
Direction musicale Andrea Sanguineti Mise en scène et conception vidéo Marie-Eve Signeyrole Décors et costumes Fabien Teigné Dramaturgie Louis Geisler Lumières Philippe Berthomé Vidéo Artis Dzerve Chef de Chœur de l’Opéra national du Rhin Hendrik Haas Chœur de l’Opéra national du Rhin, Orchestre symphonique de Mulhouse
Les Artistes
Norma Karine Deshayes Adalgisa Benedetta Torre Pollione Norman Reinhardt Oroveso Önay Köse Clotilde Camille Bauer Flavio Jean Miannay
photos klara beck
A' l'Opéra du Rhin jusqu'au 20 juin
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