Une création mondiale, commande de l'Opéra National du Rhin et de l'Opéra de Nuremberg, coproduction avec l'Opéra de Nuremberg.(Staatstheater Nürnberg)
Une première représentation proposée dans le cadre du festival Musica, qui tient toujours à proposer des projets sur le rapport musique contemporaine et opéra: voici donc le "Quai Ouest" de Bernard Marie Koltès adapté pour la scène lyrique et mis en musique par Régis Campo.
D'emblée le sort en est jeté: sur scène, règne le doute, l'étrangeté d'un décor portuaire: un quai sombre, louche où homme et femme semblent errer dans le vague et l'angoisse. L'homme traverse le mur qui s'abat sur lui: destin fragile et imposé?
Tour au long du spectacle, suspens garanti et empathie avec ces personnages semblant surgir d'un univers corrompu, tendu et incertain. Le destin les poursuivra, aussi implacable et fort que dans la pièce théâtralisée de Koltès. En faire un opéra semblait un défi tant les références furent singulières à partir de la mise en scène de Chéreau en 1986. Théâtre chanté, métamorphosé par la musique et la mise en scène de Frédéric Kristian, sous la direction de Marcus Bosch pour l'Orchestre symphonique de Mulhouse.
Les voix des chanteurs y sont brillantes en particulier, celle de Mireille Delunsch et Paul Gay. La musique révèle à la fois l'aspect dramatique et lyrique du texte et renvoie à des sonorités lointaines, celle de la guitare électrique entre autre originalité.
Les décors, tels ceux d'un west side story, urbains et réalistes enferment les protagonistes et contribuent à forger une atmosphère lourde et oppressante. L'obscurité ambiante souligne les solitudes et renforce le suspens.
Du bel ouvrage très convaincant et émouvant!
La musique de Régis Campo – né en 1968, auteur déjà d’un opéra bouffe inspiré de Copi (Les Quatre jumelles,
2008), mais aussi de symphonies, quatuors à cordes ou concertos
régulièrement primés en France et à l’étranger – vient donc saisir « à
bras le corps » ce texte qui interroge de manière toujours très actuelle
la question de la survie, du passage, de la décision… Elle s’empare
aussi des personnages (tous ceux de la pièce sont conservés) qui
tressent une psychologie de groupe et de domination avouée : Koch qui se
réfugie dans ce lieu de dock improbable avec l’idée de mettre fin à ses
jours, Charles, jeune homme ambitieux qui veut à tout prix s’en sortir,
Claire sa sœur encore adolescente, Cécile leur mère vénale, Rodolfe
leur père (ancien combattant qui doute de sa paternité), Fak, petite
frappe, Monique secrétaire de Koch et Abad, âme muette et noire qui
hante ce territoire aboli.
En projetant sa pièce dans les
limites sombres d’une ville portuaire, Koltès pariait sur cette alchimie
trouble des confins qui modifie les corps et les relations, exacerbe
les pulsions, les sentiments et les ressentiments. Régis Campo fait,
lui, le pari que l’opéra est un vecteur idéal pour accompagner cette
transformation des êtres, jusqu’aux moments fatals et irréversibles de
leurs parcours.
dimanche 28 septembre 2014
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