mardi 1 février 2022

"Siguifin": quatre chorégraphes signent un grimoire du merveilleux chorégraphique.

 



Amala Dianor, Alioune Diagne, Ladji Koné et Naomi Fall
France Sénégal Burkina Faso Mali 9 interprètes création 2021

Siguifin

Dédié aux artistes de l’Afrique de l’Ouest et à la rencontre, Siguifin, qui signifie « être magique » en bambara, met en jeu la richesse des échanges entre plusieurs chorégraphes et danseurs. Un spectacle qui emprunte son écriture collective au jeu du cadavre exquis pour déployer toute l’énergie et la vitalité de la danse.

Auprès d’Amala Dianor, trois autres chorégraphes et neufs danseurs. Ils sont originaires de trois pays d’Afrique de l’Ouest – Mali, Sénégal et Burkina Faso. Ce projet singulier et de dimension internationale est l’occasion de retrouver cet art particulier de la rencontre cultivé par l’artiste associé à POLE-SUD de 2016 à 2019. Pour lui, l’enjeu de cette nouvelle pièce est une aventure partagée, à la recherche d’une forme d’écriture collective qui met en valeur la qualité des interprètes réunis le temps de cette création. Elle questionne au plateau, à partir des corps et du mouvement, la rage, la puissance et le désir des danses portées par de jeunes danseurs africains. Dans ce spectacle chorégraphié à plusieurs mains par Alioune Diagne, Souleymane Ladji Koné, Naomi Fall, Amala Dianor se propose de tisser une toile qui relie leurs trois propositions et habille cet « être magique » qui donne son titre à la pièce. Siguifin réunit de multiples savoirs et techniques du mouvement. Autour de cette image et de la richesse des échanges, il s’agit de questionner aussi le présent et l’avenir de la jeunesse africaine, ainsi que de construire ensemble, en dialogue les uns avec les autres. 

Dans une belle unisson de frappes des pieds sur le sol, le dos courbé, ils font apparition, tout en blanc, rayés de noir et rouge: chacun à son tour se détache du groupe, de cette horde ou meute compacte qui ressert les liens, unit les corps ou leur laisse prendre leur envol en soliste. Histoire de peuples qui se conjugue au pluriel autant qu'au singulier Une des trois femmes chante et berce de ses sons étranges le groupe émut de battements, de tressaillements d'épaules, de sourires complices aussi, véritable liaison entre eux.Une ligne frontale ou de profil se dessine dans le calme des percussions corporelles; cette danse chorale très labanienne renforcée par les lignes des costumes qui rappellent la  dynamique de la notation chorégraphique ou de celle de Mondrian. Des arrêts sur image pour respirer et se poser.La cheffe de bande, de tribu donne de la voix et indique la direction à suivre avec une franche et belle autorité.Toujours de splendides battements d'aile dans ce vaste "poulailler" sonore, vivant, volatile.Le tempo change sans cesse , surprenant. La lenteur est repos, pondération, et les corps se déroulent, se déplient à l'envi, composant une calligraphie ondulante, savoureuse, voluptueuse.Comme un maillon qui s'enchaine, les corps se rallient, se relient et fondent des architectures mouvantes de toute beauté.C'est une équipe joyeuse, enjouée, pleine d’allant et d'entrain qui se régale de se mouvoir et de nous communiquer cette allégresse et vivacité.Le sol est en jeu pour de longues reptations en ricochet et écho: on s'observe aussi, avec recul sur des musiques tonitruantes.Le côté ludique renforcé par cette verve et dynamique ascendante qui les projette hors de l'espace commun.A saute mouton sur des cris de meute, l'ambiance va bon train.Une panne de courant survient pour faire une pause et laisser la place au verbe: un petit discours attachant sur les mécanismes de l'économie...Une chaine corporelle unie et solidaire pour écho, en pont et passerelle structure l'espace, le tempo d'une image, d'un tableau éloquent.Le collectif défile en rangée; c'est le ralliement dans le calme et la sérénité.Le plexus offert, les bras en cerceaux, la danse se transforme et la lenteur reprend le dessus. Ralentis vertigineux et fascinants des corps en fusion.De belles torsions et spirales déroulent le flux d'énergie, un solo s'échappe, virtuose hip-hop en poupe, des ombres chinoises tranchent dans le vif de la scénographie, panique au poulailler dans cette agora du geste.On frôle l'agonie de l'un d'eux pour une résurrection miraculeuse, portée par le groupe qui se soulève.On s'évente en dialogue, on se regarde et le plateau vibre de cette convivialité, de cet "être ensemble" qui parait couler de source.La terre attire les corps et le rythme des pieds nus frappe le sol, terre nourricière du rebond, de la joie.Un côté comique est largement endossé, revendiqué dans cette épopée, odyssée de l'Afrique qui vibre Avec distanciation et distinction, l'écriture chorégraphique est forte, tracée, variable comme ce petit épisode robotique fugace et malin, fait de pantins désarticulés. En épilogue une image soudée d'un groupe hétérogène, uni pour célébrer le rythme et la joie du collectif!

A Pole Sud, les 1 et 2 février 

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