lundi 19 février 2024

"Locomocion Templar el templete": Israel Galvan: matières à danser!


Une création mondiale par Israel Galván ! Sous empreinte d’architecture de la Renaissance, de Kafka et de Lorca, le génie du flamenco explore ses racines sévillanes, entre résonances et suspensions.

Le grand réformateur de la danse flamenca se réinvente, sous nos yeux ! Avec sa sensibilité aigüe, Israel Galván approfondit la sensation du templar, terme désignant un état de suspension qui précède le mouvement du danseur, le geste musical et la quiétude du toreador. Entouré de deux musiciens et d’une comédienne, le bailaor rentre dans les espaces entre les notes et entre les mots, en dialogue avec les airs traditionnels d’Andalousie. Après s’être imprégné de l’architecture du Tempietto de Bramante à Rome, il offre au Théâtre de la Ville la première mondiale d’une toute nouvelle mouture de son art ! Un bonheur à partager qui vaut bien qu’on remette à septembre son spectacle Seises, initialement prévu en février.

Il fait feu de tout bois, ce démiurge qui revisite a chaque fois les fondamentaux de la danse flamenca pour les porter aux nues. Les transformer, les métamorphoser comme une sorte de mue, de transe-formation toujours im-pertinente. Il apparait sur scène, altier, noble, puissant et s'empare d'un matelas pneumatique: en pantoufles. En opposition totale aux sons et bruits percutants des résonances terrestres du flamenco. Paradoxe qu'il soulève avec audace et quiétude, frappant sur ce sol mou et souple comme à l'habitude. Le résultant est probant: le rythme demeure, la grâce et l'habileté absorbent la matière, boivent les pas et trépas de cette danse, précise, régulière. Le rythme enfle, se déploie et ce sol docile se prête à ses moindres caprices. Son développé des bras toujours aérien, son profil jamais bas. Virtuose en diable blasphémateur. Avec lui, un percussionniste, un saxophoniste pour faire écho à ses frappés de velours, de soie, de respirations. Un rien le transforme; un petit châle rouge autour du cou, un béret de corrida, de toréador irrévérencieux et la chrysalide se fait papillon frémissant. Ses supports varient d'une estrade à l'autre; rond de bois, grille sur laquelle il rappe, frotte, griffe la matière pour obtenir des sons inédits bordant sa danse.  Le matelas devient harpe, un plumeau rose se fait Zizi Jeanmaire.En tunique noire et legging le voici prenant toutes sortes de matériaux comme prétexte à vibrations, pulsations. Une chaise se fait instrument de musique à chatouiller avec délice et humour. Des bottines noires et blanches pour gainer ses chevilles mobiles et futiles vecteurs de sa mouvance. Le regard lointain ou à terre. Une jeune fille frêle et fragile, Ilona Astoul l'accompagne dans ce périple périlleux, conteuse et comédienne aux collants roses: gracile compagne de scène, présente, forte et discrète à la fois face à cet animal humain, hybride entre faune et bête de scène valeureux.Un orchestre fertile en sonorités quasi klezmer, avec corne de brume et autres instruments à vent font corps et graphie sonore. Antonio Moreno et Juan Jimenez Alba aux commandes.Israel Galvan, électrique et magnétique espèce de créature charmante autant que démoniaqie pour cet opus intriguant surprenant. A chaque étape de ses recherches, le danseur incarne, vit et habite son patruimoine, ses racines et son vocabulaire réorganise, invente une syntaxe physiuque et corporelle hypnotisante. En décalage, en rebonds et autres surprises décoiffantes.Un quatuor hors norme, une création aux dimensions hypnotiques et suréelles de toute beauté.

Au Théâtre de la Ville-Abbesses jusqu'au 23 Février

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