L’Orchestre est placé sous la baguette de Pierre Bleuse, directeur musical de l’Ensemble intercontemporain à partir de la saison 2023-2024.
L’Apprenti sorcier: quel bonheur de se replonger dans l’infatigable Apprenti sorcier qui introduit ce concert fait de grandes pages de musique française.La finesse du jeu des violons en introduction, les flûtes tuilées, aériennes dans des tenues flottantes, ruisselantes. Font irruption d'autres instruments pour renforcer cette tension montante, qui avance, entrecoupée de silences soudains.Pas à pas comptés, hachés, ample démarche comme une balade tranquille, innocente, légère due aux vents.Enchanteur, jovial,martial aussi le leitmotiv récurent se pose, clair, sonnant dans des modulations multiples, les huit contrebasses officiant en fond sonore puissant.A pleine et vive allure, allant bon train la pièce s'enjolive avec l'assaut des violons; vent violent et tourbillons assourdissants, grondements des percussions en emphase.Suspens...La touche des vents qui accélèrent perturbe la marche pour des fracas, envolées des cordes qui jaillissent, déferlent, submergent, toniques, l'énergie en poupe.Un soulèvement s'annonce et s'accomplit, emporte le tout et ravit l'auditeur.De forts beaux contrastes d'amplitude et volume pour un retour du "pas à pas" feutré, allégé, onirique image de rêverie. Le final est tranché, à pieds joints saut dans un jeu de marelle pour atteindre le ciel! Le chef, aux aguets, genoux pliés, épouse cette dynamique sonore et visuelle, sorcier lui-même de cette direction diabolique, barbe et costume noir comme un Méphistopheles. bondissant. ..
PHILIPPE MANOURY
Saccades, pour flûte et orchestre
Philippe Manoury habite au bord de l’Ill et fête son 70e anniversaire. C’est donc tout naturellement que l’Orchestre philharmonique de Strasbourg aborde Saccades,
oeuvre créée en 2018 à Cologne par Emmanuel Pahud, qui continue de la
jouer au fil des reprises. La flûte seule inaugure cette composition de légende, sur fond ténu de violons.Finesse aérienne et vaporeuse, spatiale, chamarrée...Fusion annoncée avec les vents pour une atmosphère mouvante, large qui se répand, chatoyante et lumineuse partition.Le chef magicien opère, guide de gestes précis, lents ou très vif argent dans des pliés physiquement engagés, terrestres. Les mains mobiles, directionnelles: une danse de dos habile et fort éloquente...Des tintements, des éclats de sons, de timbres se glissent dans cette riche ambiance sonore: un solo de flûte dans le silence, alerte, en touches saccadées.Coupées, hachées, surprenantes.En staccato rythmés comme des chants d'oiseaux fabuleux de légende, de conte ou d'histoires.Tempête et fracasse joignent à ce tableau vivant très pictural aux touches impressionnistes denses, virulentes, accélérées.Projections et assauts et toujours de très beaux mouvements du chef en alerte.Aux aguets.A l'affut pour servir cette narration sonore inédite.La dramaturgie secoue, l'ambiance tient en haleine, en apnée d'écoute.Flux et reflux des sons, avancées inexorables des violoncelles pincés en osmose et tension Comme un souffle créatif qui emporte, déporte, déplace l'auditeur contre le vent et la tempête fulgurante, immergé dans le son et les vibrations.Harpes et petites percussions intrusives à l'appui pour créer d'infimes nappes acoustiques scintillantes, vibrantes.Manoury tel un peintre de la musique tectonique.
CÉSAR FRANCK
Psyché, poème symphonique pour orchestre et choeurs
Un autre anniversaire est célébré, celui de César Franck (1822-1890), dont on peut ensuite entendre la version intégrale avec choeurs de Psyché, poème symphonique inspiré des Métamorphoses d’Apulée.Ultime poème symphonique de Franck, Psyché se distingue par son gigantisme et le choix d’une thématique issue de la mythologie antique. Retour à un idéal classique ou expression symbolique d’un spiritualisme chrétien ? À l’aune de son contexte esthétique, il s’agit de saisir dans cette oeuvre les enjeux foisonnants d’un art parvenu à sa maturité.Ambiance de prologue très lisse, fluidité des cordes à l'unisson.L'emphase du volume gagne l'atmosphère sereine: lyrisme mélancolique, nostalgie et pathos au demeurant.Romantisme ou classicisme de l'écriture qui ne surprend pas, douceur et tendresse amoureuse au poing.Enveloppante sagesse, retenue, flux et reflux des sons des deux harpes, légère continuité ascensionnelle et spectaculaire des percussions...Le choeur intervient, riche et linéaire, plan, en ponctuation sobre, efficace dans une élocution remarquable, fluide, calme, posée.La dimension mystique du choeur qui borde cette oeuvre en fait un gage solennel, discret de véracité: dimension impalpable de la pièce, vivante musique chorale au souffle prolongé comme des alizées, zéphyrs ou autre vents animés par une interprétation subtile et impressionnante de densité.
Un concert troublant aux accents qui secouent, percutent et viennent se fracasser dans des univers chamarrés, musicaux, sorciers ou alchimistes mouvements tectoniques des plaques sonores!
Palais de la Musique et des Congrès le 8 Octobre
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire