Avec son Caligula, le metteur en scène et comédien Jonathan Capdevielle propose une lecture originale qui puise dans les deux versions de l’œuvre de Camus : l’une, plus poétique, de 1941, l’autre, de 1958, plus politique. Du célèbre empereur romain, la postérité a gardé l’image d’un tyran cruel et paranoïaque, aussi laid moralement que physiquement, « sain ni de corps ni d’esprit » selon le poète latin Suétone.
Mais il est aussi un être souffrant de l’état du
monde, ivre d’un pouvoir politique absolu et pourtant impuissant à
changer la condition humaine. À travers son refus violent des
conventions et de toute compromission, il fait apparaître son
impuissance. Et c’est l’art, dès lors, qui prend la relève pour sublimer
une réalité fondamentalement décevante.
Partant de ce personnage insaisissable, Jonathan Capdevielle propose un spectacle inclassable qui convoque le texte de la pièce, mais aussi la musique jouée sur scène, la danse, la marionnette. Après le voyage initiatique de Rémi en 2022 au Maillon, les outils du théâtre sont mis au service d’une nouvelle quête : chercher à tracer les contours d’une figure profondément tragique, à la fois radicale et ambiguë.Un décor évoquant une plage rocheuse, falaise où les corps alanguis se dorent au soleil...Dans les tons verdâtres et jaunissant comme envahi d'algues. Lassitude, somnolence avant la tempête pour des personnages singuliers aux costumes "d'époque" : plis contre plis, péplums, perles et colliers, genoux à nus. Les corps sont ennoblissent juste ce qu'il faut de distingué, d'impérial. Le pouvoir et ses vices, le sentiment amoureux, la mort, le tragique: tout concourt ici à dresser un portrait féroce de Caius, de Scipion sur le plateau dévolu aux évolutions vertigineuses des interprètes escaladant le proscénium glissant. Travestissement à la clef pour brouiller les pistes de lecture, esprit orgiaque et autres traits de perversion: un univers où le pouvoir s’exerce malin et destructeur. Camus inspire Capdevielle et l'impossible y est roi, les hommes meurent, les femmes chantent et vocalisent leur destin. La tragédie bat son plein en musique, en tableaux très picturaux: fumigènes hallucinants de vagues opaques pour clore cette navigation à marée basse. Un spectacle haletant et transdisciplinaire au climat singulier et particulier.
Au Maillon jusqu'au 8 décembre
1 commentaires:
Pas aimé du tout . Le rocher les maillots de bain, quel sens ? J’ai trouvé cela très laid, décousu .
En revanche le Voyage dans l’Est TNS Angot /Nordey : intense, fort, grand, du magnifique Nordey !
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