Pionnière dans les années 80, la chorégraphe Régine Chopinot déclare en exergue de sa dernière création : « top est tout sauf mou, top dépote, fait du bruit et n’a pas froid aux yeux ». Au-delà de cette énergie déclarée, « top » est aussi une pièce de tribu, une mise au plateau d’une jeunesse turbulente, avide de sens et de conscientisation sur fond de percussions et de riffs de guitare. Sept jeunes danseurs et danseuses et deux musiciens nous entrainent dans une course folle, où la singularité de chacun, l’esprit de groupe, les regards et les envolées chorégraphiques se succèdent naturellement. Sculptures éphémères et paysages mouvants se rencontrent et se dénouent. Le regard porté sur l’horizon, le groupe se forme, s’agglutine et se renforce jusqu’à l’épuisement. Virtuoses et libres, chacun des protagonistes participe à la partition généreuse de la chorégraphe. Danses folkloriques, jeux d’enfants, pyramides et pas de deux survoltés s’engagent sous les yeux d’un public complice. Le rythme est permanent, que ce soit celui des baguettes, des voix ou des mains. La scène devient contagieuse quand le rythme atteint les gradins. Fidèle à elle-même et en véritable passeuse d’énergie et d’histoires, Régine Chopinot signe ici une pièce vitale aux mouvements décalés, surprenants et nécessaires.Chopoinot au "Top" !
L'architecture de corps en attente dans des postures, attitudes, immobiles sur le plateau nu, interpelle déjà. Ils nous attendent, les artistes, le temps de s'installer dans la salle de spectacle. Tout se dénoue lentement et chaque caractère de se dévoiler doucement dans sa propre gestuelle: signature de chacun des danseurs, altérité de chaque stature, de chaque facture corporelle: chacun trouve sa trace kinésiologique et la danse s'empare du groupe hétérogène. Pour en distribuer des traversées gymnopédiques en diables, toutes de rythme, de cadence propre et différente pour créer une dynamique horizontale frontale. Comme un jeu vidéo peuplé de petites créatures mobiles défilant sur l'écran à tour de rôle ou à l'unisson. C'est drôle et réjouissant. Des bonds et des rebonds multiples, des dévoreurs d'espace que ces électrons libres livrés dans la lumière. A chacun sa griffe, sa signature dans des solos vibrants, magnétiques, agités de spasmes, tétaniques ou sautillant. Une envolée de mouette à l'envergure fantastique pour le corps d'un danseur dont les épaules se meuvent en ondes sismiques. Des courses à grande vitesse, en accélération. Toute une gamme de mouvements soliste ou d'ensemble pour cette meute lâchée, bruissante. Animale aussi à petits aboiements successifs, à saute frontières de genre. Une once de folklore, une pincée de zapateados pour engendrer une murmuration d'applaudissements du public comme une pluie battante rythmée, vécue en transports en commun! Le batteur et le guitariste répondant en osmose et symbiose à cette énergie compulsive corps et musique à capella, se renvoyant la balle ou se laissant l'espace et le silence pour former des tableaux vivants. Les portés font décoller les danseurs jusqu'alors plutôt dans la verticalité sans oser le sol. Portés plein d'humour et d’icônes animales jouissives.
Les images d'Epinal en poupe pour ces architectures en pyramides de corps assemblés comme un mikado géant. Et pour clore ce feu d'artifice joyeux, des courses folles sur le plateau et une dernière course-poursuite entre deux d'entre eux, sorte de comique de film muet qui s'accélère à l'envi. Régine Chopinot en pleine forme, décapante et inoxydable créatrice bondissante et joviales. Erik Satie en serait friand et épaté tant l'humour et la révolte cohabitent communément dans leur oeuvre respective..
Une partition chorégraphique où la clef de sol navigue sur une portée hors sol emplie de trouvailles et de gestes inouïs de chacun des protagoniste, unique en leur genre. Un peu de frise égyptienne, de folk, de gestes incongrus et volatiles. Du vent dans les voiles pour avancer porté par le souffle de la danse. Et la danse de se tricoter en points de chainette, en trame et chaine savantes dans des déplacements millimétrés, toniques aux directions variables comme la météo.Des costumes, de l’Écossaise en robe, au sultan en jupe vaste et virevoltante. Du training au short.Que Terpsichore en baskets nous offre encore de telles rencontres, de moments de partage, tel que cette assemblée de spectateurs montés danser sur le plateau en fin de parcours. Pole Sud, dance floor contemporain une fois de plus pour le bien être ensemble d'un public conquis et perméable à toute écriture dansante de notre temps. Une auréole de lumière pour border les visages en grappe et tout s'éteint.Régine sur le plateau au final pour remercier cette "compagnie" qui se retrouve au pied levé pour tester si ça "prend" encore, cette énergie partagée au profit du spectacle engagé. Révolution oblige pour ce trublion de la Danse, dans le vif du sujet. Et quand la "musique est bonne."......notre boxeuse de choc se joue des châteaux de cartes et des mikados pour déconstruire et bâtir des univers loufoques ou graves . En figure de proue d'une embarcation en cabotage. Pour un voyage en zig zag au pays de cocagne. Portrait de famille recomposée pour le meilleur de chacun de ses membres.
A Pole Sud jusqu'au 6 Décembre
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire