samedi 16 décembre 2023

"Le journal d'Hélène Beer" : au jour le jour....la nuit....pour consolation ultime.

 


Le Journal d’Hélène Berr Bernard Foccroulle Commande de l’OnR et La Belle Saison.Création mondiale musicale au Trident à Cherbourg le 3 mai 2023. Création mondiale scénique à l’OnR.En coréalisation avec la Comédie de Colmar – CDN Grand Est Alsace.


Monodrame lyrique pour mezzo-soprano, piano et quatuor à cordes.
Livret d’après le Journal d’Hélène Berr. Strasbourg Théâtre de Hautepierre Dates 03 déc. 202312 janv. 2024

Composition Bernard Foccroulle Mise en scène Matthieu Cruciani Scénographie Marc Lainé Costumes Thibaut Welchlin Lumières Kelig Le Bars

Les Artistes Hélène Adèle Charvet Piano Jeanne Bleuse Quatuor Béla


« Les êtres comme Hélène propagent le sens de la beauté et donnent force à ceux qui savent les comprendre. Pour moi, Hélène était le symbole de la force radieuse, qui est magnétisme, beauté, harmonie, persuasion, confiance et loyauté. Oui, six mois ont suffi pour attacher nos deux existences avec un lien que seule la mort pouvait défaire, que seule la mort a défait. De ces six mois qui ont paru durer une heure, que reste-t-il ? Un parfum indéfinissable, qui flotte autour de nous, un peu de lavande, je crois… »
Lettre de Jean Morawiecki à Denise Job, sœur d’Hélène Berr (20 juin 1946).


Un opéra singulier où huit toiles en hamac déjà présentes sur scène vont accompagner la narration durant tout le spectacle. Huit cloisons, huit acteurs pour cette intrigante histoire racontée au fil des pages du journal intime de notre héroïne. Une femme apparait sur le plateau pour nous conter son sort, sa vie, ses émotions de jeune étudiante jetée dans le monde de la littérature. Un portrait sensible rehaussé par une création musicale qui parait sur mesure, haute couture de la composition musicale: celle de Bernard Foccroulle. La voix contée, la voix chantée de Adèle Charvet se fond dans les disharmonies du quatuor à cordes Béla. En tuilage quasi constant, en bordure, osmose et symbiose étonnantes. Ourlée par la présence de ces toiles qui s'abaissent et se haussent en harmonie avec les espaces évoqués dans le textes. Murs, paravents et plus tard spectres, ectoplasmes des esprits des morts des camps de concentration. Personnage solaire et lumineux, généreux jusqu'au bout de sa folle trajectoire vers la mort annoncée, Hélène charme et séduit et l'empathie avec ce caractère déterminé et puissant se tisse peu à peu. La mezzo-soprano enfilant ce rôle avec aisance, force et puissance vocale .Le costume très simple daté de cette époque fait de cette jeune fille un modèle de simplicité, de sobriété non dénuée de féminité et d'espièglerie.Ce journal ainsi ressuscité provoque compassion et sympathie, curiosité et concentration de la part d'un public conquis et très à l'écoute de toutes ces variations de points de vue. Celui de la musique, du chant et du conte, de la scénographie mobile, des lumières focalisées sur les interprètes. Deux manipulateurs à vue actionnant les toiles blanches au gré de la narration. Un opus bouleversant bordé de tonalités, de rythmes évocateurs de tensions autant que de douceur, de tragédie autant que de théâtre de la vie. La mise en scène judicieuse de Matthieu Cruciani pour magnifier ces écrits touchants, bouleversants. Jeanne Bleuse au piano, complice de notre écrivaine, au diapason de la musique interprétée avec brio par la quatuor Béla.


Le journal tenu par Hélène Berr débute le 7 avril 1942 par l’évocation d’une dédicace que lui a adressée Paul Valéry dans un livre : « Au réveil, si douce la lumière, et si beau ce bleu vivant. » Il s’achève le 15 février 1944 par un cri dans la nuit emprunté à
Macbeth, « Horror ! Horror ! Horror ! », quelques semaines avant sa déportation dans un camp de concentration. Au fil de ces pages, la jeune étudiante passionnée de littérature et de musique raconte avec sensibilité ses joies, ses émois amoureux, le port de l’étoile jaune et les rumeurs venues de Drancy. À l’invitation du Quatuor Béla, le compositeur Bernard Foccroulle signe d’elle un portrait intime et bouleversant, mis en scène par Matthieu Cruciani. Un monodrame essentiel pour sa portée historique et sa force poétique, présenté en création mondiale scénique.

photos Clara Beck


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