jeudi 21 mars 2024

"10 000 gestes" et pas un de plus! Charmatz: le compte est bon....


 "10 000 gestes" de Boris Charmatz 

« Une forêt chorégraphique », « une pluie de mouvements » : ce n’est sans doute pas un hasard si la nature intervient dans les mots choisis par Boris Charmatz pour décrire son spectacle. Car 10000 gestes est tout d’abord un moment de désordre dans un monde policé. L’expression spontanée de la liberté de chacun et chacune, inscrite dans celle de toutes et tous, en fait naître et se déployer une autre : la liberté d’association du public. Sans jamais se répéter, 19 danseurs et danseuses, puisant dans leur propre subjectivité, exécutent 10 000 mouvements différents, du tremblement le plus discret au saut spectaculaire, du regard adressé à l’autre aux combinaisons farfelues des corps. Mais la performance conçue par le nouveau directeur du Tanztheater Wuppertal Pina Bausch est aussi une archive dansée de la danse, une immense mémoire déployée sur les notes du Requiem de Mozart. En convoquant tous les mots du langage corporel, c’est la matière même de toute chorégraphie qu’il donne à voir sur une scène nue. 


Bien plus de 1001 voici un dénombrement hallucinant de facture de gestes interprétés par des danseurs, ici au sein du Maillon sur l'immense plateau nu. Performance "reprise" à chaque fois différemment selon les étapes et depuis la genèse de ce gigantesque projet international. Et Boris Charmatz de réinventer la "notion de reprise"pas à l'identique mais respectant l'esprit de cette performance au plus près. C'est une danseuse projetée sur le plateau qui inaugure l'événement: multi-gestuelle fébrile, rapide, désordonnée, fractionnée. Rapidement rejointe par ses pairs, d'autres interprètes qui plus d'une heure durant sont lancés comme des salves sur la scène.Chaos très organisé et très écrit, respectant les espaces d'évolution de chacun.C'est comme un tableau constitué de 1001images qui font sens et formes lorsque l'on s'en éloigne: puzzle rétinien inouï, illusion, kaléidoscope scintillant, versatile...D'abord individualisée, la gestuelle se prend au jeu de duo et trio et s'enrichit de mouvements de groupe, toujours chaque geste individualisé, propre à chacun. Radeau de la Méduse, scènes empruntées à l'histoire de l'art académique, cour des miracles qui s'anime en tableaux successifs jamais interrompus. Des moments de silence quand le fracas de Mozart se tait, quand la musique, les choeurs se tarissent. Chacun exulte se défonce, se lance dans cette arène nue, immense plateau dédié aux déplacements, courses folles, divagations toujours très organisées. Et surprise, la horde sauvage, la meute se disperse dans le trouble parmi le public sur les gradins, hurlant, vociférant pour regagner plus tard le bercail de la scène. C'est jouissif, exhalant, enivrant et l'empathie gagne tout au long de cette ruée vers le paradis: le compte est bon et on compte sur ces 19 énergumènes, en slip, torse nu ou legging pour nous ramener sur terre alors que Mozart s'est éteint dans un final magistral. Les lumière de Yves Godin à la poursuite de cette meute hurlante comme des rasants ou douches caressant les corps survoltés. Huit néons doubles encadrent ce plateau nu et cru comme une ère de jeu. La danse fait signe, les voix en disent long sur notre vocation à vivre haut et fort les gestes les plus ancrés, les plus fous et désordonnées de nos carcasses humaines. Boris Charmatz laissant divaguer ses interprètes de toute leur singularité...collective! Nadia Beugré, Solène Wachter et les autres pour nous entrainer dans cette course folle contre le temps, contre la mort...On compte sur eux pour additionner tout mouvement sans un soustraire un seul. Le conte est bon dans cette scénographie et dramaturgie ascendante pétrifiante, médusante...

« Une forêt chorégraphique », « une pluie de mouvements » : ce n’est sans doute pas un hasard si la nature intervient dans les mots choisis par Boris Charmatz pour décrire son spectacle. Car 10000 gestes est tout d’abord un moment de désordre dans un monde policé. L’expression spontanée de la liberté de chacun et chacune, inscrite dans celle de toutes et tous, en fait naître et se déployer une autre : la liberté d’association du public. Sans jamais se répéter, 19 danseurs et danseuses, puisant dans leur propre subjectivité, exécutent 10 000 mouvements différents, du tremblement le plus discret au saut spectaculaire, du regard adressé à l’autre aux combinaisons farfelues des corps. Mais la performance conçue par le nouveau directeur du Tanztheater Wuppertal Pina Bausch est aussi une archive dansée de la danse, une immense mémoire déployée sur les notes du Requiem de Mozart. En convoquant tous les mots du langage corporel, c’est la matière même de toute chorégraphie qu’il donne à voir sur une scène nue.

Au Maillon en collaboration avec Pole Sud les 20 et 21 Mars

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