lundi 29 septembre 2025

"En regard" Léo Lérus / Sharon Eyal: danses tribales, danses chorales.

 


« Faire corps » signifie transcender les individualités pour les unir autour d’une même force fédératrice. Dans The Look, les silhouettes sombres des danseurs et des danseuses se confondent et semblent ne faire qu’un – un organisme, un écosystème ou peut-être un microcosme. Un tout qui observe le public droit dans les yeux, et qui respire, se déploie, ondule et vit au rythme hypnotique et organique d’un flot musical aux influences tribales et post-industrielles. En regard de cette transe futuriste et collective, les solos et les ensembles intimistes d’Ici s’inspirent librement de la culture créole pour célébrer la singularité et les rencontres d’individus solaires, dont les mouvements génèrent sur scène des variations de sons et de lumières.


Sharon Eyal et Léo Lérus cultivent depuis vingt ans une complicité artistique et professionnelle, née de leur rencontre au sein de la Batsheva Dance Company. À l’invitation du Ballet de l’OnR, ils ont imaginé ensemble le diptyque
En regard afin de faire entrer en résonance leurs deux univers. Mêlant rigueur technique et expressivité brute, la pièce The Look (2019) renvoie pour Sharon Eyal à un mantra du Mahatma Gandhi – « Nobody can hurt me without my permission » – évoquant la résilience du corps, de l’esprit et des communautés humaines face à la violence et l’oppression. Elle trouve un prolongement et un miroir dans la nouvelle création de Léo Lérus, Ici, qui insuffle sa sensibilité et une énergie contemporaine à des traditions chorégraphiques et musicales guadeloupéennes remontant à la période de l’esclavage.

 Ici [Création]

Un solo introduit brillamment la pièce: une gestuelle ondulante, bassin, épaules engagés dans des volutes sinueuses, des cambrures et renversements du corps aux aguets pour inonder peu à peu les autres personnages sur le plateau. Ils apparaissent en ombre portées, longues silhouettes noires qui se détachent du fond de scène. L'atmosphère se dessine dans un brouhaha de musique tempétueuse proche d'un fatras sonore étourdissant. Les corps vêtus de tuniques et shorts se tordent, tétaniques, les mouvements morcelés pour une sidération qui se propage et enveloppe chacun. Corpus compact, dense, opérant vers des images de masse qui bouge et ondulent sauvagement La chorégraphie magnifie la vélocité, la rapidité des déplacements et l'on songe à la tribu de Gallotta, le Groupe Emile Dubois né de cette fédération des corps en meute folle, lâchée dans l'espace. Elue, une interprète se donne au sein de cette horde comme la sacrifiée du Sacre du Printemps où l'effigie de la féminité du Boléro de Béjart. Le culte de la communauté comme credo, la pièce de Léo Lérus est une composition chorale magnifique sur fond d'éclairages monochromes de toute beauté. C'est bien "ici" que des accents de danse "exotique" s'inscrivent dans les gestes: sauts, rebonds, virevoltes multidirectionnelles dans une énergie remarquable, unisson et diapason justes et précis pour former un seul être mouvant animé de solidarité et d'empathie.


Pièce pour 12 danseurs.
Chorégraphie
En collaboration avec les interprètes
Léo Lérus
Composition sonore
Denis Guivarc’h
Costumes
Bénédicte Blaison
Lumières
Chloé Bouju
Mise en répétition
Adrien Boissonnet

 


 The Look: 

Dans la quasi obscurité régnant sur le plateau, un corps compact s'anime imperceptiblement peu à peu et révèle dans une éclosion sensible l'un ou l'autre des danseurs. Partie intégrante d'un groupe qui va se disséminer dans l'espace et irriguer la scène de mouvements discrets, fluides. La musique rugit, craque, crisse et teinte le tout d'un mécanisme, engrenage galvanisant pour les interprètes en état de convulsion, de tétanisation enivrante. Mouvements angulaires, tracés directs, tout converge vers la sensation d'une respiration commune: celle d'un organisme unique fait de cellules vivantes. Danse chorale telle que l'autre souhaitée Laban, Joos ou Wigman dans la lignée de la Bastheva. En justaucorps noirs luisants, les danseurs font chorus et convergent sans cesse vers le choeur dansant. On songe à " Insurrection" d'Odile Duboc, on se prend à entrer dans cette meute débordante d'intégrité, de gravité et de rythme hallucinant.

Quand deux chorégraphes sont mis en regard, un miroir opère ses images renversantes sans leurre et révèle des affinités de composition dans l'espace comme rarement abouties.


[Créée par la Batsheva Dance Company en 2019.
Entrée au répertoire.]
Pièce pour 17 danseurs.
Chorégraphie
Sharon Eyal
Musique
Ori Lichtik
Costumes
Rebecca Hytting
Lumières
Alon Cohen
Assistant à la chorégraphie
Daniel Norgren- Jensen
Mise en répétition
Claude Agrafeil


  A l'Opéra du Rhin jusqu'au 29 Septembre

Sylvain Riéjou Association Cliché : recette ou savoir faire et être, intuitifs? Le danseur et ses doubles.

 


Mieux vaut partir d’un cliché que d’y arriver

France Solo 2017

Quand on veut faire une danse, par où commencer ? Sylvain Riéjou prend cette question à bras-le-corps et nous entraîne dans son cerveau en pleine ébullition. Il n’est pas seul : un chorégraphe intérieur, autoritaire et sarcastique, surgit des enceintes. Avec ce double, qui prend forme avec la vidéo, il dialogue, se contredit, doute. Le dispositif est minimal : un plateau nu, un écran blanc, un vidéo-projecteur, qu’il manipule lui-même. Ce seul en scène, drôle et précis, donne à voir un processus créatif dans ce qu’il a de plus intime : à travers les hésitations, les échecs, les essais. Avec humour, il démonte le cliché de l’artiste tourmenté tout en explorant la part de vérité qu’il peut contenir. Et si le cliché était parfois un passage obligé vers l’émotion partagée ? Cette fable chorégraphique, à la fois pédagogique et décalée, interroge la justesse, le doute et l’élan sincère qui traversent toute création. Tout en réveillant, en nous, de solitaires souvenirs d’adolescent·es dansant devant leur miroir. 

 


Toujours aussi pétillant, malicieux, versatile, adulescent, Sylvain Riéjou se joue des obstacles et franchit les difficultés avec distanciation, recul et franchise.Fans de mélodies, de chansons populaires , de danses chorales fédératives, animateur et entraineur de choc, le voici désormais seul sur le plateau. Un mets de choix à déguster sans modération. La recette est simple: être là, ici et prêt, casquette sur le front, gainé de noir, collant et justaucorps de maitre de cérémonie.Comme un livre ouvert, dédoublé par des ombres projetées sur le mur, il délivre son envergure corporelle à l'envi. Autodidacte depuis une dizaine d’années au montage vidéo, il l’explore ici comme un vecteur de composition chorégraphique.Explorant d’innombrables possibilités de basculer son propre corps de l’espace réel du plateau vers l’espace virtuel de la vidéo, l’artiste se dédouble, se détriple, offrant à lui seul des duos ou des trios, s’amusant à créer plusieurs personnages qui se répondent, se chamaillent ou collaborent, notamment chorégraphe et danseur, ouvrant ainsi l’horizon du rire de ses « prises de tête » artistiques.C'est drôle et malin et ça déverse une foultitude de questions sur le processus de création avec malice, intelligence. Partant du texte en français de la complainte de Mozart, il expose toutes les facettes de la réflexion à l'interprétation pour des "rôles" différents, des émotions multiples et plein d'autres détails qui échapperaient à la lecture ou compréhension du spectateur.A l'aide d'images animées de sa propre personne, il visite tous les univers des trois personnages de la complainte de Mozart, les attitudes, les expressions et se débat avec son double qui à l'oral et comme une petite voix intérieure lui dicte ses gestes!Dédoublement burlesque à souhait et très réussi pour évoquer nos peines, nos échecs, nos inquiétudes, en bref la vie d'artiste et plus encore.Quand tous les personnages évoqués sortent tour à tour de son rêve, c'est une galerie de tableaux, portraits en corps et graphies de Sylvain Riejou qui s'affiche, avec quelques années de plus! (2017) L'effet est joyeux et surprenant, cette petite foule s'affairant autour de lui pour lui rappeler qu'il n'est pas seul dans cette expérience aventureuse de la création. Du bel ouvrage accessible et ludique qui apprend beaucoup sur l'origine et le sens des gestes. Quand au final le danseur vit et danse ce court extrait sur la musique de l'opéra, c'est quasi expressionniste à la Mary Wigman: intense, vécu, sobre légèrement appuyé, plein d'émotions et de sensations transmissibles. Emouvant.
 
 
Conception et interprétation : Sylvain Riéjou
Régie générale : Emile Denize
Coach chorégraphique : Tatiana Julien
Regard extérieur : Laure Hamidi et Mathilde Hennegrave
Remerciements : Myriam Gourfink, Daniel Larrieu, Olivier Martin Salvant, David Walh
Production, diffusion : Marion Valentine et Charles-Éric Besnier-Mérand – Bora Bora productions 

A Pole Sud jusqu'au 30 Septembre 

dimanche 28 septembre 2025

John Luther Adams par le JACK Quartet : la voie est libre....

 


JACK Quartet nous introduit à l’œuvre de John Luther Adams, compositeur du paysage sonore et ardent défenseur de l’environnement.

Arpenteur des grands espaces, du nord de l’Alaska où il vécut une grande partie de sa vie jusqu’aux déserts américains et sud-américains aujourd’hui, celui qui fut tout d’abord militant écologiste dans les années 1970-1980 se consacra à la composition tardivement. Presque méconnu en France, John Luther Adams est l’un des compositeurs les plus originaux de sa génération. Ses œuvres, ici interprétées par le JACK Quartet, sont le fruit d’une « écriture de l’attention », condition sine qua non du lien entre l’humain et l’environnement.
Programmé par Léonard Sanchez

« La géographie sonore de John Luther Adams a suscité chez moi une prise de conscience écologique. Sa musique invite à une écoute attentive de notre environnement sonore tout en démontrant qu’art et engagement peuvent se nourrir mutuellement. »
— Léonard Sanchez


John Luther Adams trace avec The Wind in high places (2010)un paysage serein fait de couches qui se succèdent et dessinent des ondulations volatiles, mouvementées, calmes ou placides comme autant de panoramas immense. La musique se déploie sous la pression légère des archets et tourne comme un vent léger animé d'une brise volage. Les horizons se dévoilent et les perspectives d'interprétation franchisses les limites de l'interprétation.

Toujours en compagnie du compositeur John Luther Adams pour sa pièce Lines made by walking (2019)on déguste ce don, ce sens aigu de la composition cosmique, naturelle qui procure des sensations et émotions vastes, larges en empathie avec les instruments à cordes, accordés par des raccords subtils évoquant cette liberté: la voie est libre avec les sonorités parfois voisines des paysages sonores d'Arvo Part. Car c'est bien d'ambiances reliées à l'évocation de la nature dont il est question. Voyage sans bivouac, sans interruption fait de trois mouvements en apnée, en ronds dans l'eau , ondes qui déferlent sans embuches, voguant dans une atmosphère aquatique grandiose.

En rappel, le quatuor nous offre une courte pièce pleine d’allant, de rebonds, d'ornements quasi baroque, pavane ou routine très dansante pleine de rebonds. Elévations, retenues très en contraste avec les deux oeuvres précédentes... Jack pot pour cet ensemble rayonnant, serviteur de John Luther Adams, cordes à leurs arcs sans défaillir

JACK Quartet

violon Christopher Otto, Austin Wulliman
alto John Pickford Richards
violoncelle Jay Campbell

A l'église du Bouclier le 28 Septembre dans le cadre du festival MUSICA 

 

"The People united will never be defeated !" Hymens...Hymnes à la liberté.


RÉCITAL:À partir du chant révolutionnaire chilien El pueblo unido jamás será vencido (Le peuple uni jamais ne sera vaincu), Frederic Rzewski compose en 1975 une œuvre majeure du piano contemporain.

En 36 variations d’une étonnante liberté et d’une beauté intense, c’est l’histoire des luttes du XXe siècle qu’il fait résonner, comme l’illustrent deux autres mélodies qui habitent la pièce, le Bandiera Rossa italien et l’hymne antifasciste Solidaritätslied de Hanns Eisler. « Elles apparaissent, écrivait le compositeur, pour mieux souligner les similitudes entre les menaces fascistes présentes et passées, et insister sur l’importance d’en tirer les leçons. »


Frederic Rzewski
, The People United Will Never Be Defeated! (1975) piano | Ralph van Raat

Il est seul en compagnie d'une mélodie fétiche des libertaires. Seul mais avec 36 versions de cet hymne à la liberté et le voila, ce virtuose à exécuter par cœur sans partition cette œuvre atypique.L'originale version fait figure de prologue, d'introduction à toutes celles qui vont prolonger notre écoute et varier selon hauteur, rythme, ton et autres modalités de facture de composition. Tantôt version "romantique",  à petits pas légers, foisonnante, à la dérive, divagations, chemins de traverse et sentiers de l'âne. C'est surprenant et envoutant, la mélodie s'effaçant devant l'inventivité et l'ingéniosité du compositeur. Prolongement, adaptation de l'hymne en font de multiples interprétations , fluides ou segmentées, colorées ou vindicatives. Toujours dans des tonalités qui échappent à la formule d'origine. La dramaturgie de l'ensemble nous proposant un savoureux cocktail sensitif et émotionnel. En glissements, soubresauts et autres systèmes ingénieux de fabrication musicale. Parfois version mondaine de salon, ou agressive et virulente proposition populaire et militante. De quoi réjouir tout un public réuni ce matin là salle Ponnelle par curiosité et appartenance politique diversifiée. Distingué ou affolé voici ce slogan chanté en mode transformation et mutation perpétuelle et permanente. Soulèvement ou berceuse, on pénètre dans divers univers culturels, géographiques et sur d'autres continents. Ces variations virtuoses, alertes, pleine de tonus troublent et engendrent une réelle empathie avec l'oeuvre. De toutes ces évasions, on retourne au sol en un atterrissage soigné: retour aux sources de l'inspiration première, fondement de cette gigantesque proposition musicale. Ralph van Raat au sommet de son génie d'interprète. En rappel, une oeuvre de Debussy et d'un compositeur hollandais, généreuses prestations supplémentaire impressionnantes, toujours par "corps", par coeur!

Au Munsterhof dans le cadre du festival MUSICA  le 2 OCTOBRE 8H 30

Quatuor Bozzini : tout un programme, vivier québecois prometteur!

 


Un panorama de la création musicale canadienne par le Quatuor Bozzini.

Le Quatuor Bozzini est une voix originale en Amérique du Nord. Moteur de la scène montréalaise, la formation cultive le goût de la recherche artistique, de l’expérimentation et s’aventure hors des sentiers battus. À Strasbourg, il présente un programme de découverte de la création musicale canadienne autour de Nicole Lizée et Cassandra Miller, de la chanteuse et compositrice inuite Tanya Tagaq et de Claude Vivier, compositeur canadien majeur, disparu prématurément au début des années 1980.

Tout un programme riche en diversités et signatures musicales remarquables

Tanya Tagaq et sa pièce Sivunittinni (2015) arr. Jacob Garchik engendre des sonorités et des façon d'utiliser l'archet pour émettre des sons fabuleux, étranges, bordés d'effets spéciaux pour inventer une ambiance singulière.

Avec Cassandra Miller et Leaving (2011)c'est une oeuvre très inspirée des singularités de Steve Reich dans l'utilisation des cordes tendues vers une acoustique feutrée et unique.

A nouveau Cassandra Miller avec Warblework (2011 / 17) donne aux interprètes l'occasion de rendre au quatuor toute la richesse d'un ensemble qui garde son altérité : les quatre musiciens complices de cet opus intriguant.

Nicole Lizée pour Hexbreakers (2022) confirme ses talents de composition que l'on découvre tout au long du festival et Claude Vivier avec Pulau Dewata (1977)délivre des nuances musicales toute de diversité et surprise tenant l'auditeur en alerte et en complice

Quatuor Bozzini

violon Clemens Merkel, Alissa Cheung
alto Stéphanie Bozzini
violoncelle Isabelle Bozzini

Au Bouclier dans le cadre du festival MUSICA le 28 septembre



MUTEK #2 Quatuor Bozzini | Sixtrum | Kara-Lis Coverdale | Guillaume Coutu Dumont et Line Katcho | France Jobin : un monde poly-sons

 


MUTEK est l’un des plus importants festivals internationaux dédiés aux musiques innovantes. Depuis 2000, il se produit chaque année au mois d’août dans le Quartier des spectacles de Montréal.

Invité dans le cadre d’une « prospective Québec/Canada », MUTEK propose un véritable festival dans le festival en une soirée. À travers un programme ambient dans l’église Saint-Paul, haut-lieu des soirées contemplatives de Musica, sont présentés des artistes qui font aujourd’hui vibrer la scène canadienne.

La 25e édition de MUTEK Montréal 2025 s’est achevé, marquant un quart de siècle d’inspiration, de réflexion et de créativité. Cet anniversaire symbolise bien plus qu’une simple célébration : c’est le début d’une nouvelle ère.

Cette nouvelle ère se justifie par les transformations profondes initiées cette année. Que ce soit à travers l'intégration accrue des technologies émergentes, l'accent mis sur l'inclusivité, ou l'exploration de nouvelles formes artistiques, nous avons redéfini ce que signifie être un festival.

Il s'agit d'un engagement à ne pas seulement suivre les tendances, mais à les anticiper et à les façonner. Fidèles à un esprit d’innovation, il se réinvente pour tracer de nouvelles voies,  invitant à explorer des territoires inconnus et à laisser libre cours à aux émotions. L’heure est venue d’entamer le prochain cycle.

Le Festival ne cesse de se transformer, construisant un écosystème global d’idées et de propositions artistiques, où chaque participant·e joue un rôle clé. Il est appelé à faire partie d’un ensemble pluriel, à imaginer des lendemains qui ouvrent de nouvelles opportunités pour les générations à venir.

Alors en avant pour plus de trois heures de show dans l'écrin vouté de S T Paul, scénographié de lumières orangées et rouges. Le feu et l'embrassement des notes au programme de cet événement où l'on est invité à s'asseoir à terre et à déguster des sons inédits.

Quatuor Bozzini + Sixtrum

En première partie, le quatuor à cordes Bozzini et l’ensemble à percussion Sixtrum, tous deux basés à Montréal, proposent un programme court autour de Folk noir/Canadiana (2018) de Nicole Lizée, une œuvre qui incarne un des aspects de la culture musicale contemporaine canadienne : le dialogue entre différents registres musicaux, qu’ils soient populaires, expérimentaux ou contemporains. Un régal d'audaces sur fond d'images vidéo, sorte de collage d'images surréalistes, cadavre exquis d'icônes de jeu de cartes, de bandes colorées émergents de fissures dans du papier de partitions. Tout un univers décalé s'ouvre à nous dans cette coirte pièce très imagée où l'on se perd à rêver d'un univers à la Lawis Carol.


Kara-Lis Coverdale

Pianiste, organiste et compositrice, Kara-Lis Coverdale est une des sensations de la scène minimaliste et expérimentale au Canada. Tout en évoluant comme organiste et cheffe de chœur dans différentes paroisses canadiennes depuis l’âge de 13 ans, elle a développé une trajectoire artistique singulière et une identité musicale contemplative, spectrale et organique. Après Kali Malone, Ellen Arkbro, Sarah Davachi et Claire Singer, elle complète la cartographie des « divas de l’orgue » dressée à travers la programmation de Musica au cours des dernières éditions.Il faut la voir en contre-plongée, longue chevelure déployée, oscillant sans cesse entre ses claviers. C'est une atmosphère onirique, planante et débordante d'énergie face à ce buffet d'orgue monumental qu'elle transforme en instrument à vent dans une tempête et des accalmies sonores sidérantes.



Guillaume Coutu Dumont & Line Katcho


Guillaume Coutu Dumont et Line Katcho s’unissent pour créer une expérience immersive où la musique électronique rencontre l’art visuel. Guillaume Coutu Dumont, compositeur et musicien montréalais, apporte sa maîtrise des rythmes organiques et des textures électroniques, tandis que Line Katcho, artiste audiovisuelle, enrichit cette collaboration avec des paysages visuels enveloppants et une approche expérimentale du son. Ensemble, ils explorent les frontières entre le sonore et le visuel. Les images mouvantes, spectrales très chaleureuses s'éparpillent et s'épanouissent sur l'écran de fond de scène. Pièces après pièces courtes, les images se précisent, des architectures futuristes dignes de BD de science fiction se font hallucinantes et très proches d'un contexte de fin du monde, d'apocalypse inévitable.Les deux complices naviguent sereins dans cet univers musical fait de basses et de vibrations. Tenant en haleine le public qui persiste dans une démarche d'écoute et d'ouverture sans égal: pour preuve, le parterre est encore plein et les esprits imprégnés d'étrangeté continuent ce voyage au bout de la nuit

France Jobin

Artiste sonore, compositrice et curatrice basée à Montréal, France Jobin développe une pratique singulière à la croisée de l’art sonore et de la recherche électroacoustique. S’inscrivant dans une esthétique minimaliste, son travail est souvent qualifié de « sculpture sonore ». Elle explore avec finesse les interactions entre sons analogiques et numériques, donnant naissance à des paysages auditifs subtils et profonds. Ses installations immersives, à la fois musicales et visuelles, dialoguent étroitement avec l’architecture des lieux investis, invitant le public à une expérience d’écoute attentive et sensorielle.Elle est seule aux consoles, auréolée de lumières, debout et très studieuse. Face à nous, imperturbable magicienne de vibrations multiples et de résonances accrues selon le point de vue corporel qu'on y engage. Invité à divaguer et se perdre dans les volumes et décibels, le public déambule, spectre noctambule, animés de fatigue, ectoplasmes bien vivants dans ce monde fantaisiste .

Nicole Lizée
Folk noir/Canadiana (2018)

arr. Isabelle Bozzini et Fabrice Marandola

Alexandre Amat, Simon Chioini
Dissolution (2024)

Kara-Lis Coverdale
From where you came (2025)

Guillaume Coutu Dumont, Line Katcho
Les Empires (2025)

France Jobin
Inter/sperse (2018)

Quatuor Bozzini

violon Clemens Merkel, Alissa Cheung
alto Stéphanie Bozzini
violoncelle Isabelle Bozzini

Sixtrum

percussions João Catalão, Catherine Cherrier, Philip Hornsey, Kristie Ibrahim, Fabrice Marandola, Stuart Jackson

orgue, électronique Kara-Lis Coverdale
électronique Guillaume Coutu Dumont
vidéo Line Katcho
installation sonore, électronique France Jobin



Les Empires © Jean-François Brière
France Jobin © Karlina Knezin


 

en partenariat avec MUTEK et Le Vivier (QC/CA)
avec le soutien des Délégations générales du Québec à l’étranger, du Conseil des Arts et des Lettres du Québec, du Conseil des arts du Canada et de l’Institut Français

Les Empires bénéficie d’un accompagnement dans le cadre du projet Itérations immersives de MUTEK réalisé grâce à l’appui financier du Conseil des arts et des lettres du Québec.

   
A ST Paul le 27 Septembre dans le cadre du festival MUSICA

samedi 27 septembre 2025

"Jürg Frey " Quatuor Bozzini et Konus Quartett : une lente et douce effusion !

 


La combinaison singulière de deux quatuors — cordes et saxophones — pour sublimer la musique de Jürg Frey.

Jürg Frey est le maître de la fragilité sonore. Chacune des œuvres du compositeur suisse sont des moments suspendus, des éloges de la lenteur fondés sur des progressions aériennes imperceptibles. Cette attention portée à la matière musicale atteint son paroxysme dans une œuvre en particulier, sobrement intitulée Continuité, fragilité, résonance. La combinaison de deux quatuors — cordes et saxophones — permet d’explorer des combinaisons de timbres inouïes, ainsi que des jeux d’apparition et de disparition harmonique d’une finesse absolue.

Jürg Frey

Continuité, fragilité, résonance (2020-2021) 

La réunion des deux quatuors est à l'écoute source de fusion, d'effusion et de confusion. Mélange subtil d'harmonies et de tonalités douces dans une lenteur une vélocité musicale toute de tendresse, de douceur, d'altérité, les instruments les uns vis à vis des autres. La musique est planante et se réverbère docilement entre les arcs de l'architecture de l'église, temple de fraternité et d'alliances. Les alliages musicaux se font hypnotiques et bercent l'oreille et le tympan de notes aériennes, fluides et le temps partagé par une écoute vigilante et enivrante s'avère plage et tremplin  d' instants de béatitude et de repos. Malgré le foisonnement et l'intensité fragile des lignes de force d'une composition sans faille. Souffles et archets au diapason de cette oeuvre où les huit musiciens comme deux trèfles à quatre feuilles s'allient et se relient pour tisser une trame dramaturgique en filigrane. Une heure à potron minet pour s'émerveiller des bienfaits et de l'impact de la musique sur les sens qui s'éveillent sur un monde unique et à découvrir de toute grandeur et beauté.

Quatuor Bozzini

violon Clemens Merkel, Alissa Cheung
alto Stéphanie Bozzini
violoncelle Isabelle Bozzini

Konus Quartett

saxophone soprano Fabio Oehrli
saxophone alto Jonas Tschanz
saxophone ténor Christian Kobi
saxophone baryton Stefan Rolli

A Musica le 27 Septembre chez Nootoos dans le cadre du festival musica.

Heure musicale - "La Ballade : Lieder et Mélodrames": Emmènez moi au pays des merveilles...

 


Nous avons le plaisir de vous emmener en Bal(l)ades... et vous faire découvrir, en concert, un genre musical qui a inspiré les plus grands compositeurs comme Schubert, Schumann, Brahms, Loewe, Liszt, …
Des écrivains tels que Bürger, Goethe, Mörike, Herder, Victor Hugo, y ont trouvé matière à déployer des scènes fantastiques et terrifiantes, toujours baignées d’irréel, à développer ces thèmes et ces images d'un Moyen Âge tel que l'a rêvé l’imaginaire romantique.

Les compositeurs romantiques, ont puisé dans ces récits essentiellement tirés du fonds mythologique nordique, pour créer des Lieder (un chanteur  accompagné au piano) et des Mélodrames (texte déclamé par un comédien avec un accompagnement de piano).
Notre programme vous invite à découvrir quelques chefs d’œuvre de ce genre.
L’interprétation de ballades pour piano seul ponctue
les différentes parties de notre programme.


Frissons, épouvante, fantastique, mais aussi poésie et humour garantis !

Samedi 27 septembre au Temple Neuf à 16h30
Pl. du Temple Neuf, 67000 Strasbourg

Quelle idée judicieuse que d'introduire avant chaque lieder, la traduction jouée et interprétée par le fameux comédien Jean Lorrain: de quoi se régaler des mélodies chantées par René Schirrer et accompagnées au piano par Luc Benoit !Une totale réussite, un concert qui relie peur, histoires fantastiques et terrifiantes, angoisses et fureur d'un univers traversé par l'émotion musicale. Romantique, "Sturm und Drang"l'atmosphère est inquiétante, bordée de suspens et les paroles émises par Jean Lorrain prennent corps avec gravité autant qu'avec sourire et humour. Trois parties composent ce récital, du "lugubre au macabre" jusqu'au "fantastique et humoristique" en passant inévitablement par "le sinistre et le fantastique". Trois chapitres palpitants, haletants et plein de verve et de talent. Les traductions des textes, précises et fidèles, l'interprétation judicieuse de chacun fait de ce concert un bijou de programmation élaborée avec intelligence et justesse. On y redécouvre un répertoire, autant qu'on y déguste des morceaux de choix peu connus. Alors les deux "bis" ou rappels en sus débordent de générosité et de plaisir partagé.

 

PROGRAMME  du concert "La Ballade - Lieder et Mélodrames"

La ballade lugubre et macabre…

  1. Edward                                                         Lied de Loewe

  2. Der Zwerg                                                    Lied de Schubert

  3. Les Fugitifs (Die Flüchtlinge )                   Mélodrame de Schumann

  4. Pièce pour piano : Ballade op. 10, n°1 de Brahms

      « Nach der schottischen Ballade Edward »


La ballade sinistre et fantastique…

  5. Erlkönig                                                          Lied de Schubert

  6. Der Feuerreiter                                             Lied de Wolf

  7. Le Moine Triste (Der traurige Mönch)         Mélodrame de Liszt

  8. Pièce pour piano : Ballade op. 118, n°3 de Brahms


La ballade fantastique et humoristique…

  9. Le Pas d’Armes du Roi Jean                       Mélodie de Saint-Saens

10. Die wandelnde Glocke                                 Lied de Loewe 

 11. Tom der Reimer                                            Lied de Loewe 


vendredi 26 septembre 2025

"Nexus de l’adoration" de Joris Lacoste : un carnaval chatoyant, un voging musical décapant inoxidable.

 


Créé avec succès au Festival d’Avignon en juillet, le dernier projet de Joris Lacoste est un spectacle « pop-liturgique » sur l’hétérogénéité de nos modes d’existence et de nos expériences du monde.

Nexus de l’adoration imagine un nouveau culte pour notre temps, une religion de l’inclusivité maximale dont le principe serait d’embrasser toutes les formes de vie (et de non-vie), de respecter toutes les manières d’être, de célébrer toutes les choses : une cigarette électronique et un amas galactique, une mitochondrie et le dernier son de Jul, un cerf dans la brume et un orgasme multiple, un triple-double de Simone Biles et une fausse moustache, une motion de censure et un grec complet sauce algérienne. Cette multiplicité radicale est une condition de notre temps. Réunissons-nous pour inventer la cérémonie qui la célébrerait.


 Un nexus est une connexion, généralement là où de multiples éléments se rencontrent.Lien, liaison, communion, tout contribue ici à tisser des relations entre les protagonistes, les situations, les disciplines artistiques requises pour faire union, réunion, assemblée, forum, agora ....Alors voici un portail grand ouvert pour passe murailles incultes mais épris  de cérémonies spirituelles d'un genre nouveau..La scène devient lieu de partage et de communion pour une tribu, une gentille horde, une meute docile et bien dressée à de nouveaux instruments de foi et de croyances...Une célébration païenne se profile au fur et à mesure dans l'arène scénique où chacun existe, connecté, relié comme cette fleur "la renouée". C'est la danse, la chorégraphie qui soude l'ensemble dépareillé de cette fresque épique et picaresque à la diable.Les officiants de cette grand-messe sans nef ni clocher  sont unis par une singulière parole, des gestes mesurés, souples aléatoires dans ce grand espace ouvert, habité par les musiciens et leurs instruments. La musique, hybride et déjantée sourd de cette assemblée explosive qui rayonne, bon-enfant, bienveillante.Comédie musicale ou divertissement savant, cet opus est source de diversité, d'engagement pour œuvrer vers un langage commun que chacun peut utiliser à sa guise pour naviguer sur cette mer intranquille.Nexus sera le dieu des divergences, du soulèvement jubilatoire des corps vêtus de lambeaux chatoyants, d'un pelage quasi animal révélant nos inclinaisons vers d'autres mondes.De ce joyeux fatras ambiant, cette cavalcade intranquille colorée et burlesque, on ressort essoré mais ni blanchi ni repassé: pas de manières, de codes imposés pour cette représentation d'une cour des miracles utopique, ludique. Les règles du jeu ne sont pas communion solennelle ni repentir ou confession: si une nouvelle religion est née c'est une façon d'être plurielle, La parole n'est pas divine, elle est danse et musique, expression de l'altérité dans une agora rythmique facétieuse. Au final de ces deux heures d'office pour pèlerins assoiffés, encore quelques injonctions en direction du public: en voulez-vous, en voilà de farces et attrapes de comédie humaine bien relevée. "J'adore....." aurait chanté Katerine!
 
Conception, texte, musique, mise en scène, chorégraphie Joris Lacoste

scénographie, lumières Florian Leduc
collaboration à la danse Solène Wachter
collaboration musicale et sonore Léo Libanga
costumes Carles Urraca


Distribution

interprétation et participation à l’écriture Daphné Biiga Nwanak, Camille Dagen, Flora Duverger, Jade Emmanuel, Thomas Gonzalez, Léo Libanga, Ghita Serraj, Tamar Shelef, Lucas Van Poucke

son Florian Monchatre
assistanat à la mise en scène Léo Libanga, Raphaël Hauser
régie générale Marine Brosse
stagiaire Seydou Grépinet

 


Au Maillon les 26 et 27 Septembre  dans le cadre du festival MUSICA





jeudi 25 septembre 2025

Anna Gaïotti( LOVALOT) a la rage au corps et le soulèvement comme credo

 


Rage

Anna Gaïotti est performeuse, musicienne et poète. Elle fabrique une écriture chorégraphique et musicale qui relie texte et corps endossant humanités et inhumanités. RAGE est un une création pour lequel elle rassemble Clément De Boever (performeureuse), Léo Dupleix et Jean Bender (compositeurs et musiciens), Sonia Saroya (artiste visuelle). Le public est invité à être autour, actif par sa seule présence, intégré comme un paysage vivant. La pièce met en lumière différents mouvements de rage, allant des impressions individuelles et communes aux réalités symptomatiques biologiques et politiques. Dans RAGE, le temps est celui de l’urgence et de la résilience. Dans cette danse il y a les gestes de collisions, de morsures, de chutes, de fièvre, de vertige, faire chuter les fondations sociales au fond du corps, troubler les contours du corps.

Quant la rage est loin d'être agressivité, combat interne indécent ou thérapie publique, elle est expression d'une rare présence ici en proximité confidentielle, le long de ce dispositif en estrade et aligné de plain-pied dans le studio de Pole Sud. Deux interprètes, homme et femme de noir vêtus disposent de cet espace singulier , les deux musiciens postés à l'opposé faisant résonner électro-acoustique et instrument proche de l'épinette ou du clavecin, un "virginal"aux cordes pincées. Dans des compositions lumineuses rarissimes venant auréoler les poses et attitudes des danseurs, les évolutions de part et d'autres de ces deux derniers font office de dessins, d'enluminures de grande qualité. Les leurres ainsi rendus sur les contours des corps mouvant ou au repos sont de toute beauté. Bras et mains au diapason pour ces deux êtres hybrides qui ne font plus qu'un.Rare est cet engouement pour l'irréel, le corps en mutation ou métamorphose constante. Les regards impassibles, lointains malgré la grande proximité physique avec le public au coeur du dispositif scénique. Lui est puissant à l'envergure des bras démesurée et enveloppante. Elle est plus versatile, tétanique dans ses mouvements anguleux, rectilignes ou proche d'un qi kong dansé en équilibre constant sur des orteils déployés comme autant d'appuis bénéfiques et volages. De fortes percussions des pieds au sol pour prolonger les rythmes du virginal, ensemble, rebondissant à l'envi.Debout, parfois au sol en roulade ou enchevêtrés, ils dansent avec énergie, détermination et beaucoup de précision temporelle. La musique se fait répétitive et leurs geste épousent cette continuelle et enivrante reprise comme entêtée, pugnace, versatile aussi. Une composition musicale et chorégraphique singulière, originale où l'on se prend à songer que la révolte ou de dépassement, l'indignation sont loin d"être ce soulèvement à la Didi Huberman que nous proposent Anna Gaiotti et Clément De Boever.

 

A Pole Sud le 24 Septembre dans le cadre du festival MUSICA

 

 

Conception : Anna Gaïotti
Chorégraphie incitée du texte La Rabbia de Pier Paolo Pasolini : Anna Gaïotti avec la collaboration de Clément De Boever
Danse, performance : Clément De Boever, Anna Gaïotti
Composition et musique live : Léo Dupleix (Virginal), Jean Bender (électronique modulaire)
Création et régie lumière : Sonia Saroya, Agathe Patonnier
Sonorisation et régie son : Étienne Foyer  

Gavin Bryars + Claire M Singer : des affinités certaines.

 


Un moment rare : le compositeur anglais himself sur scène avec son ensemble, suivi de l’organiste écossaise Claire M Singer.

Gavin Bryars (né en 1943) est pour la première fois l’invité de Musica, sur une proposition du curateur et auteur David Sanson. Si l’on connaît ce compositeur majeur de la scène anglaise via ses « tubes » The Sinking of the Titanic et Jesus’ Blood Never Failed Me Yet ou ses collaborations avec Bob Wilson, Merce Cunningham ou Carolyn Carlson, la plus grande partie de son œuvre a été très peu entendue en France. Lui-même à la contrebasse et à la direction de son ensemble en compagnie de la soprano Sarah Gabriel, il revisite trente années d’écriture vocale — notamment à travers son Adnan Songbook (1995) composé sur des textes de la poétesse et peintre libanaise Ethel Adnan. En seconde partie, Musica poursuit son panorama des organistes expérimentales contemporaines en invitant Claire M Singer. L’Écossaise partagent ses introspections musicales nées sur les côtes déchirées des Highlands.

Une proposition de David Sanson, programmateur musical pour l’Abbaye de Noirlac et co-programmateur de l'édition 2025 du festival Musiques démesurées (Clermont-Ferrand).

 

Des mélodies inspirées du monde de la musique médiévale portées par une soprano au timbre inégalé, c'est la découverte incontournable de ce concert dédié à Gavin Bryars en personne,présent, instrumentiste, chef et compositeur au long court.
Lauda 4 « Oi me lasso » (2001) Lauda col legno II (2020) 
Lauda 28 « Amor dolçe sença pare » (2005) Lauda Rubata a Tre (2014) 
Songs from The Seventh Book of Madrigals (2025): autant de pièces courtes interprétées avec virtuosité et sans faille par un ensemble formé de complices de longue date. La voix majestueuse pleine de lyrisme de Sarah Gabriel se défiant des extrêmes aigus portés par des tenues remarquables, est délectable. Périlleuse performance sans filet accompagnée des instruments acoustiques au diapason de cette atmosphère recueillie, spirituelle autant que païenne.Les morceaux s'enchainent sereins et virtuoses pour un plus bel effet au sein de l'église St Paul.On ne s'étonne pas que ces oeuvres aient pu inspirer la chorégraphe, poète et calligraphe Carolyn Carlson en 2014 avec "Pneuma"pour le ballet de Bordeaux. Des haikus musicaux de toute beauté à la résonance divine. Gavin Bryars encore pour au final une longue pièce The Adnan Songbook (1996) chef d'oeuvre  de musique vocale porté par Sarah Gabriel, aux anges ce soir là tant l'émotion musicale sourd de tout son corps qui respire et inspire sobriété et magnificence.

Artiste sonore, instrumentiste et compositrice, c'est à Claire M Singer de succéder à ces morceaux de bravoure inégalée. Une ode à l'écrin et aux résonances de St Paul, une pièce créée pour ces instants privilégiés de partage avec le public toujours présent dans la nuit pour déguster ces sonorités sombres aitant que lumineuses. Minimalisme du son en continu, un "drone music" voisin du son de la cornemuse. Une grande liberté méditative pour ces oeuvres qui s'enchainent, hypnotiques et rassurantes, berçant l'auditeur d'une force et d'une rare puissance d'écriture.

Gavin Bryars Ensemble

soprano Sarah Gabriel
direction, basse Gavin Bryars
clarinette Roger Heaton
alto Garth Knox, Kate Wilkinson
violoncelle Audrey Riley, Yuri Bryars
guitare James Woodrow

orgue Claire M Singer

A ST Paul dans le cadre du festival MUSICA 

Gavin Bryars
 
POUR MEMOIRE
 
En 1999, Merce Cunningham révélait sa pièce 𝘉𝘐𝘗𝘌𝘋 associant danse vivante et projection, une véritable exploration de multiples variations des mouvements. Pour cet événement, le musicien Gavin Bryars avait composé une musique originale. À l’occasion de l’entrée au répertoire du Ballet de l’Opéra de Lyon de cette œuvre majeure, Gavin Bryars était sur scène avec ses musiciens. Pièce musicale de 45 minutes interprétée par un ensemble de guitare électrique, violoncelle, violon, basse, contrebasse, claviers et échantillonneurs, les changements de tempo se font sur une pulsation lente parfaitement audible. Tendre l’oreille pour entendre le duo de violoncelle et guitare électrique, au lyrisme suggérant la voix humaine. 
 
Créée pour le Ballet de l’Opéra National de Bordeaux sur la scène du Grand-Théâtre en mars 2014, la chorégraphie de Carolyn Carson, Pneuma, apporte un souffle résolument aérien à la danse. S’inspirant de L’air et les songes de Gaston Bachelard, Pneuma littéralement « souffle de vie » en grec ancien, est une œuvre lumineuse pleine d’images oniriques, nimbée de la musique envoûtante de Gavin Bryars. L’air est partout présent sur la scène, dans les herbes du décor, dans la fluidité des vêtements ou les cheveux des danseurs. Les 22 interprètes passent du blanc au noir, tour à tour véritables corps flottants et tournoyant tels des derviches, dans une épure et une poésie hypnotique. 
 
Four Elements
Ballet
Musique de Gavin Bryars

Création le 16 novembre 1990 à l'Apollo Theater, Oxford
La Terre, l'Eau, l'Air et le Feu.
Connu pour son minimaliste poli, sa retenue et une répétition complexe du mouvement, le travail de Lucinda Childs est directement lié au mouvement minimaliste des années 70, en peinture et en sculture. "Four Elements" est la première oeuvre créée pour une compagnie de danse britannique.