samedi 30 septembre 2023

"Concert pour soi, nostalgie": une écoute intimiste de la musique "domestique"

 


Des musiciens et musiciennes vous accueillent chez eux pour une expérience unique. S’ouvrir à l’intimité, stopper le temps, laisser la mémoire prendre corps.

La musique possède un pouvoir mystérieux, fascinant, terrifiant même... celui de nous absorber dans l’écoute. Comme un liquide, on glisse dans les sons. Parfois même, on disparaît l’espace d’un instant, avant de réapparaître autrement l’instant d’après. C’est dans cette faille spatio-temporelle, cet entre-deux-mondes étrange, que réside notre sentiment de « nostalgie » : une douce tristesse née entre un présent qui nous semble toujours incomplet et un passé que l’on est à deux doigts faire revivre mais qui s’efface si on l’approche. 

Un bel appartement dans le quartier de l'Orangerie nous accueille: chez des violoncellistes, interprètes de haut niveau pour un petit séjour en cocooning musical. Franchi l'immense couloir, en attendant la prestation, on se détend et s'imprègne du lieu;deux petits salons d'accueil cosy pour une mise "en forme" recueillie. C'est Paola Bodin Navas qui nous conduit au grand salon, où assis nous ferons face aux musiciens le temps d'un voyage très intimiste dans trois univers musicaux, si proches, si lointains. Un solo de Witold Lutoslawski "Sacher Variations" pour violoncelle bien sur! Une oeuvre où l'artiste fait vibrer son instrument, prolongation de son corps dans des ralentissements, lamento ou glissando remarquables. L'émotion de cette proximité avec l'interprète joue et gagne en écoute, concentration et partage interactif. La grande armoire qui nous fait face laisse entrouverte une reproduction de Joan Martin, peintre, "Sadak à la recherche des eaux de l'oubli": sturm und drang musical autant que pictural: la scénographie inspire cette "nostalgie" thématique du récital.

Fait suite, la "Suite n°2 en si mineur, BWV 1067-extraits de Bach"

Un départ en soliste pour Paula qui sera rejointe par Antoine Martynciow: une étrange complicité d'interprètes qui se bordent, s'accompagnent, se doublent dans cette interprétation au plus près de l'instrument, de sa sensualité, de ses mesures, hauteurs et timbres si nuancés.

Fera office d'épilogue une oeuvre de Kaija Saariaho, "Sept papillons" pour une ballade bucolique sur les cordes du violoncelle: ajustant une multitude de timbres insolites, des passages virtuoses, guidés par la musicalité de l'interprète. Celui qui nous sortit sa partition d'un joyeux désordre créatif, se révèle stricte et confiant dans son toucher, ses glisser et petits coups de doigts sur les cordes.

Un récital bien "chambré"comme dans une alcôve baudelairienne, bien timbrée et tempérée au plus juste d'une relation étroite entre auditeur et interprète.

Le samedi 30 Septembre 15H 30 dans le cadre du festival MUSICA

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