jeudi 21 septembre 2023

"Hide to show" : leurre exquise qui nous grise. Quand le trouble règne, l'incarnation se fait virtuelle, la musique réelle! Fabuloserie ou musée des arts modestes très sophistiqués

 


En 2007, l’entreprise japonaise Crypton Future Media lançait la carrière de Miku Hatsune, une chanteuse virtuelle à la une voix de synthèse se produisant en concert sous la forme d’un hologramme. Cette icône de la culture pop allait-elle sonner le glas de la musique vivante ? Était-elle le signe d’une vie future vouée aux illusions digitales ? Rien n’est moins sûr… Quinze ans plus tard, le compositeur allemand Michael Beil joue avec le phénomène et avec notre perception : les musiciens et musiciennes que nous voyons, là devant nous sur scène, emprisonnés dans leurs cellules domestiques, sont-ils réels ou virtuels ? Un spectacle pluridisciplinaire virtuose où tous les artifices naissent encore et toujours d’un artisanat bel et bien vivant.


Sur la scène de la Cité de la Musique et de la Danse six"cabines" ou cellules abritent six musiciens habillés de couleurs chatoyantes...Dans une atmosphère bon enfant chacun y va de son instrument, isolé dans sa cabane.Rien de fascinant encore dans cette mise en bouche, prologue à bien d'autres aventures visuelles.

Une chanteuse toute japonaise , longues nattes violettes, style jeunesse dorée urbaine :Les courants de mode de rue au Japon sont multiples et ont pour la plupart vu le jour dans les années 1990. Il n'est pas rare de croiser dans les rues de Tokyo des jeunes filles ou jeunes garçons en costume, semblant sortir d'un parc d'attraction ou d'un dessin animé. Par exemple, les kogaru sont des adolescentes reconnaissables à leurs cheveux blonds ondulés, leur teint très mat et leur maquillage marqué, leurs chaussures à hauts talons compensés et leurs mini-jupes, robes à froufrous et autres accessoires bling-bling et tape-à-l’oeil. L'objectif pour ces jeunes filles est de ressembler aux filles occidentales, dans un style « kawai » (« mignon ») en poussant bien sûr le concept au maximum puisque, par nature, le japonais ne connaît pas la demi-mesure.Alors devenue pianiste, elle s'attèle au chant et séduit par son exotisme.Les choses se compliquent quand pour remplacer les musiciens dans leur cage dorée, des images se confondent et font leurre.Fausse incarnation puisqu'il n'y a plus personne en place sauf des avatars, clones ou autre icône artificielle à la place des corps. C'est visuellement bluffant et l'art vidéographique trouve une seconde dimension dramaturgique et humoristique. Six ou huit personnages en quête de compositeurs, musiques variées qui oscillent du pop au classique, font danser chacun pour soi puis collectivement nos héros de bande dessinée vivante.Le sourire aux lèvres ou le visage déconfit, les voici en groupe de chanteurs, formation improbable de joyeux lurons en pullover à carreaux: les nouveaux "Frères Jacques" de la scène musicale.Tout ceci vire à la virtuosité d'interprétation tant chacun est synchrone avec son voisin, sans se voir, hormis la perception innée, le rythme comme indicateur fédérateur. Les images se métamorphosent, se surexposent dans des couleurs flashies, les panneaux et petits rideaux qui se montent et se baissent à l'envi pour dévoiler la supercherie font office de jeu de cache cache



.Ça dansouille à l'envi et chaque corps se meut comme sur un dance floor épatant.Et les cabines de se transformer en petit salon de prestidigitation.. Fabuloserie ou musée de l'art modeste en superficie, alors que la complexité de la technologie nous livre un scénario-image loufoque et très sophistiqué. Quand la technique vire à l’irréel et à la fantaisie tout concorde pour instaurer une ambiance étrange, maline et burlesque. Ce petit castelet à six cases devient l'antre, l'endroit où se fabrique le rêve et l'illusion: du beau travail hypnotique et trompeur comme on l'aime au festival MUSICA. Et la lumière de transformer la scène en erre de jeu fantastique et drôle, la musique d'accompagner ces trublions modestes et innocents, responsables cependant d'un joyeux pataquès ludique et performant!L'ensemble Nadar n'a jamais autant porté son nom: roi de l'image et découvreur de la magie opératoire des images!

A la Cité de la Musique et de la danse le 20 Septembre dans le cadre du festival MUSICA


création française

musique, mise en scène, création vidéo | Michael Beil
vidéo live, scénographie | WARPED TYPE (Andreas Huck, Roland Nebe)
conseillère chorégraphique | Barbara Galli-Jescheck
livret | Charlotte Triebus

Ensemble Nadar
flûte | Katrien Gaelens
clarinette | Dries Tack
trombone et euphonium | Thomas Moore
saxophone | Bertel Schollaert

violon | Winnie Huang
violoncelle et direction artistique | Pieter Matthynssens
piano | Elisa Medinilla
percussion | Yves Goemaere
IG son et coordination technique | Wannes Gonnissen
IG lumières | Steven Reymer
administrateur | Robin Goossens
production | Veerle Vervoort 

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