dimanche 25 septembre 2016

"Munchener Kammerorchestrer et Rias Kammerchor: Cathédrale et baldaquins pour Musica


Musique de chambre dans la nef, le chœur de la cathédrale notre Dame de Strasbourg: les bras en tombent et le pari, gageure de pouvoir encore donner ce concert dans le berceau de notre chrétienté alsacienne est gagné Musica. Quel beau challenge: salle comble, longue file d'attente sur le parvis; on est sur le qui vive, impatient de découvrir dans cet écrin, les œuvres d'aujourd'hui.

Pour nous enchanter et sous la direction d'Alexander Liebreich, une oeuvre de Salvatore Sciarrino, "Responsorio delle Tenebre" de 2001
Le chœur d'hommes sur les bas côtés de la nef font résonner, voix et écho, splendide entrée en matière pour cette "sacrée soirée" musicale; L'ambiance est plantée comme un décor spirituel pour la pièce qui va suivre, celle de Pascal Dusapin, pilier du festival  Musica, comme celui des anges protecteurs qui ornent la crypte de notre monument gothique. C'est "Disputatio" de 2014


Voix de femmes, murmures doublés par les cordes: flamboyance de la musique, oscillant entre graves et aigus en alternance, un gong pour perturber les longues envolées vocales qui s'étirent.Cristal des voix, fragilité des sons d'un magnifique harmonica de verre, comme une corne d'abondance en or.
La dramaturgie s'installe avec ses stridences inaccessibles sons aigus, transport liturgique ascendants.Lignes fuyantes des voix comme une fugue, élévation spirituelle, bordée par les percussions, cordes et voix d'hommes.Une puissance sourd sans écraser ni submerger: on reste libre et avisé dans cette oeuvre qui convoque choeur et instruments, en nombre.Au firmament, au zénith, on plane dans la légèreté, l'impalpable grâce de cette musique si lyrique, si riche et porteuse de joie.
Jeu sur le verre pour être fragile, discret, vulnérable. Orpailleur du sublimé, de l'onirique, visionnaire et spirituel Pascal Dusapin façonne le son comme de la porcelaine blanche translucide, frêle mais pleine de mystère.Musique de sable fin, ajourée comme un marli d'assiette de collection dans un vaisselier fragile et massif à la fois.Précieuse, ciselée, en dentelles, pure et désincarnée.Le son de petites timbales pour ajouter de la précision, de la finesse et ponctuer ce rituel païen, si œcuménique
La musique avant toute chose, la félicité pour credo.
Dusapin de toute sa carrure vient modestement saluer, se penchant humblement devant le public et les interprètes. Un très grand compositeur.

Après un entracte, reprise du concert, le temps d'écouter, recueilli, le zehnerglock de la cathédrale: écoute de l'intérieur de ce célèbre repère résonnant pour les strasbourgeois. Un instant de grâce aussi avant d'entamer le "Requiem opus 9" de Duruflé, daté de 1947
Chœur, orgue, voix en solo, tout est là pour transporter l'auditeur dans un univers universel, laissant libre cour à l'imagination:messe des morts jamais tragique ni pathétique, jamais théâtralisée pour effrayer ou asservir ceux qui partagent son écoute
On sort de cette "sacrée soirée" requinqué, averti, enchanté, les ailes au bout des pieds.


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