mercredi 4 octobre 2017

"Quatuor Danel,Henri Demarquette, violoncelle:à cordes perdues!


Quand la musique de chambre se fait majestueuse, éloquente et très créative, on songe avec bonheur à son développement dans la musique contemporaine et ce récital en fut la preuve, par quatre, par cinq: trèfle à quatre feuilles, ou cinq doigts de la main, l'ensemble fit sensation au festival MUSICA à la salle confidentielle-et comble- de la Bourse
Voilà plus de quinze ans que le festival Musica accompagne la carrière de Bruno Mantovani. Plusieurs de ses œuvres connurent d’ailleurs leur création mondiale à Musica –comme son premier opéra, L’Autre Côté, en 2006. Plusieurs concerts avaient été organisés cette année-là en hommage au compositeur, dont un du Quatuor Danel. À nouveau invité en 2009, l’ensemble belge revient en 2017 aux côtés du violoncelliste Henri Demarquette pour la création mondiale d’un nouveau quintette à cordes de Mantovani. 
C'est à Beethoven (Quatuor opus 135) d'ouvrir la soirée,oeuvre distinguée, stylée, quasi "mondaine" et courtoise. Des révérences, pour ces musiciens qui se complètent, se donnent la réplique, enlacés dans des rythmes bien distincts: chacun tente de dominer la situation, devise en une conversation animée à quatre feuilles, discrète ou "relevée", en alternance.Second mouvement animé,à l'unisson, vif, virulent, en accélérés et contrastes, des graves très lents pour cette macro symphonie en miniature, condensé en germes;succèdent des mouvements très lents, veloutés tremblants, sensibles, incitation à la rêverie, délectation suave et sensuelle pour les tympans Éloge de la lenteur, droit à la paresse,, d'infimes sonorités sourdent des frôlements des archets sur les cordes.Extrême douceur, fluidité des notes, enchantent.Elles meurent doucement dans un demi sommeil salvateur, endormissement annoncé, torpeur apréciée.
Réveil subit de cette somnolence pour ce dernier "allegro",alerte mélodie, nostalgique et mélancolique. La vivacité reprend le dessus: des ornements baroques, dentelles et pourpoints pour cette escapade dans le temps. Jabots et parade finale, martiale, vindicative questionnant l'allure et le paraître. Courbettes,falbalas de rigueur avant quelques remords et regrets modestes, en retrait des pizzicato. Beethoven en roi soleil.
 Ligeti (Sonate pour violoncelle seul) complète ce programme éclectique qui fait se côtoyer "anciens" et modernes.  
Un solo de violoncelle du guest Henri Demarquette: des vibrations dans les graves en introduction,hispanisantes, dissonantes,intrigantes. La réverbération des sons en résonance, en tonalités inouïes, glissades vertigineuses à la limite du désaccord.
Langueur d'une "guitare", étrangeté des tons sourds et en spirale pour cet opus singulier en ascendances vers le zénith .
Des hachures en surprises déconcertantes, une virtuosité inégalée de l’exécution, et nous voilà au paradis.
Des accents folklorique, des emprunts, des citations se dessinent pour cette oeuvre en "solitaire" peuplée de couleurs et des saveurs lointaines. Dans un final "énervé", irrité et libérateur, l'éruption, le jaillissement de la musique de l'archet, trouble, touche, émeut.

Premiers de cordée
 Au tour de la création mondiale de Mantovani de prendre place: un quintette, à cinq feuilles, très dansant au départ, animé chaotique en germes.Dégringolade des sons en cascades, par palier, par marches successives, vrombissements et froissements des cordes pour planter une ambiance, un univers fébrile, futile, versatile.Cordée, encordée ascensionnelle pleine de risques et d'embûches,jusqu'à épuisement des forces des escaladeurs de cette montée rude, en puissance.Contre vents et marées, falaises et roches, à contre courant, les interprètes se débattent, luttent physiquement face aux difficultés qu'ils franchissent aisément dans une virtuosité impressionnante.
Sauts et rebonds au poing, ils se débattent pour atteindre cette extrême rapidité requise, cette énergie, cette dynamique , galvanisés par un rythme effréné à vous couper le souffle!
De longues tenues des cordes apaisent la donne, sous-tendent cette furieuse partition décharnée.
Se dégage une ambiance mystérieuse,, la répartie des trois violons aux deux violoncelle, en fait une conversation orageuse, virulente: les interventions de chacun s'empilent, se bousculent dans une tectonique foudroyante; la vélocité du violon incisive, les ascensions, crescendos extra-ordinaires font effet de tension extrême à l'écoute et à l’exécution!Les reprises et répétitions "orgasmiques", l'engagement des corps n'ont pas d'égale pour maintenir l'attention et les pulsions de nos sens en éveil, en alerte.L'érection des sons, en course folle de bolides lâchés jusqu'au décollage du tarmac, piste d'envol est génératrice de tremblements et d'empathie intense.
Sur des "cordes raides", en danger constant, prenant des risques inconsidérés, dans une audace et en déséquilibre permanent, instable et périlleux, nos cinq funambules du son, franchissent le mur de ce désastre annoncé avec plus que du talent: de la magie !
Accalmie, accès à d'autres espaces plus ouverts, se profilent , légèreté cinglante et menaçante, toujours.Dans un suspens étrange, les retenues des cordes glissées enchantent.Subtiles, tranquillisantes, un brin, juste.
De la rigueur, une extrême tension, un univers décalé pour cette création inouïe: du Mantovani pour sur....

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