vendredi 15 mars 2019

"Cléopatre in love" : une dame de fer dans une robe fourreau d'or.


"Un projet de et avec Christophe Fiat et Judith Henry | Texte et musique Christophe Fiat, mise en scène Christophe Fiat, Judith Henry et Claire ingrid Cottanceau. Dans ce projet théâtral porté par Christophe Fiat et Judith Henry, Cléopâtre déconstruit elle-même sa propre légende telle une icône rebelle mais non dénuée d’humour. Le livret de Christophe Fiat par son écriture délicate et incisive, le jeu et la puissante présence de Judith Henry, font de la célèbre Reine d’Égypte un personnage sorti de nulle part, hanté par son instinct de mort et les hommes de sa vie (son père, Marc Antoine, Jules César). Cette pièce reconstitue poétiquement la vie de cette cheffe d’État au mauvais genre sur fond de tirades shakespeariennes (elle est in love), de glamour (les yeux d’Elizabeth Taylor tirés au eye-liner dans le film hollywoodien de Mankiewicz) et de philosophie féministe."



La scène se strie de faisceaux, traits de lumière au sol qui se croisent, musique de guitare électrique au poing. Le ton est donné, ça va chauffer dans les pyramides dorées qui semblent se cacher sous des couvertures de survie: c'est la reine Cléopatre qui va en sortir pour contredire, agacée, les paroles radiophoniques d'un animateur à propos de son sort!
C'est de sa tombe dont il est question, alors qu'elle apparait dans des lumières roses ou vertes, glamour à souhait
Judith Henry s'est définitivement emparée du personnage: comment fer pour avoir une poigne de faire ?
Cette "dame de fer", reine, putain de mauvaise réputation jubile quand elle évoque son clone au cinéma, la Taylor ravageuse! Dans une diction antique et ronflante, elle évoque ce que les reines font, "contrairement aux rois" et se glisse dans la peau des ombres de la grotte de Platon en ombres chinoises: c'est le début du cinéma, silhouette de profil, chorégraphie antique et figée à mourir de rire!
Cléopâtre est une femme qui danse, émancipée, qui jouit de son sort et sort de ses gonds, démoniaque, manipulatrice, calculatrice mais toujours aimable et touchante de sincérité; Une petite heure durant, elle confine Marc Antoine au second plan, ce dernier peu à peu s'effaçant Elle troque son jean contre une robe lamée or et mimétise avec son environnement doré, paillettes et confettis en pluie qui dégringolent brillamment.
Orpailleuse, Judith Henry, à l'aise comme un poisson dans l'eau, se joue des contrastes du texte et des intonations, de colère ou de douceur.Très glamour, , elle danse, sauvage et libre: "une reine choisit" et décide! Alexandrie, sa descendance la fascinent et elle conte les péripéties de la guerre dans un grand professionnalisme stratège!
Elle compte aussi les robes de la Taylor dans le film et l'envie, focalise sur "Elisabeth" qui étincelle, rayonne au cinéma avec ses robes en "technicolor". Comme un studio de tournage, la scène s'encombre de projecteurs, de ventilateurs qui donneront lieu à un charmant soliloque, tirade récitée par grand vent par notre héroïne!
C'est drôle et malin, grave et plein de sous-entendus sur le harcèlement, l'envie, la cupidité. Cléopatre, une femme adultère à abattre comme Elisabeth et son Burton de complice. Comme dans une enquête policière ou un polard, tout se termine sur la question du poison :qui met fin à ses jours dans une tragique agonie ?.
Que voici un nouvel éclairage sur cette reine très "moderne" dont les faits et gestes résonnent aujourd'hui encore: ceux d'une femme en opposition, en soulèvement, en colère!

Au TNS les 14 et 15 Mars



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