Dans une très belle scénographie, rien qu'avec la savante disposition des instruments si esthétiques, en demi-cercle comme dans un amphithéâtre idéal, près à accueillir les artistes en son sein., le concert démarre avec:
"La Nueva", Gabriel Sivak , 2019, 15’ / Création mondiale
Des tuyaux sifflants en tournoiements multiples et rémanents, ouvrent le bal de cette fabrique du son, aquatiques ou cristallins et lumineux.Dans la lenteur et la douceur de la perception; puis tout s’emmêle, sons de machine à écrire, vibrations de rotatives; on s'affaire dans cette atmosphère laborieuse d'imprimerie, de manufacture et de machineries percussives. C'est la faute à Gutenberg qui révolutionna la communication, comme aujourd'hui le "net". Ca tintinnabule de toute part, en résonances spatiales, joyeuses. Atmosphère parfois sous-marine, amphibie, salves et turbulences, timbres et mécanique, matériaux multiples engagés dans l'organisation de la pièce.
L'auteur présent Gabriel Sivak, de se réjouir d'avoir partagé ses souvenirs d'enfance, ses résonances , avec un public nombreux et enthousiaste.
Et pour "entremets" à ce festin musical, les jeunes des collèges investis dans ce programme, de se jeter à l'eau et présenter les oeuvres de façon très personnelle, loin du docte discours musicologique !Bel engagement inventif et assumé à souligner!
"Necronomicon", Tomás Marco, 1971, 18’
Des tréfonds des sons, voici un "inventaire" singulier: les métaux tout d'abord, sons stridents métalliques qui circulent en alternance dans l'arène acoustique; métaux précieux et rares, sons de scies à découper... Tôles et toitures, résonnent en écho
Puis c'est au "bois" de s'exprimer, timbres chaleureux, en vagues de bois flottés. Rondeurs des sons, comme dans un étang où coassent des grenouilles au crépuscule du soir.Dans d'imperceptibles variations pleines de détails et de finesse.
Les "peaux" prennent le relais, vrombissantes, frappées en un riche univers, menaçant, inquiétant, dérangeant.
Puis c'est un joyeux mélange des trois matériaux qui se fait par intrusion successive, dans les failles des espaces sonores, dans les interstices.
Tissage et entrelacs de matières sonores, écheveaux d'une toile avec éclaboussures et jaillissement de sons colorés! C'est pétillant, polyphonique et virulent. D'une puissance inouïe un raz de marée sonore envahit la salle, sirènes et tsunami au rendez-vous: un moment unique par son ampleur et son énergie sonore indescriptible!Frissons et chair de poule en prime.
"Air Mass", Wenchi Tsai, 2018, 8’ / Création mondiale
En petit cercle, huis-clos restreint, les six musiciens se concentrent sur des sons insolites et incongrus d'un orchestre de percussions singulières: bols, peignes et autres verres à boire... Les sons répétitifs se décalent, la petite configuration de chambre, intime et réunie communie de concert: c'est quasi exotique, perlé, décalé et intimiste: une belle unisson, une écoute respectueuse soude la formation et enchante.En compte goutte qui chante l'infime.
"Transir", Michael Levinas, 2005, 16’ / Re-création
C'est Michel Lévinas en personne qui présente sa pièce et donne quelques clefs de lecture.
Un chant, des intonations, une ponctuation singulière , la conduite des échelles qui génèrent une mélodie thématique pour mieux venir "briser" la musique, la métamorphoser, en inclinations multiples.Un rythme endiablé aux vibraphones et tout démarre en trombe pour mieux ralentir en jouer des contrastes. Effets de marche, en sections tectoniques qui progressent inlassablement. En autant de modulations, de surprises. Le son tourne, enivrant comme dans un manège lancé, comme dans un chœur d'amphithéâtre semé des timbres de résonances.Rotatif, répétitif, lancinant, envoûtant, le son entraîne dans son sillage et claudique à cloche pied. On vocalise dans cette syntaxe têtue, affirmée, pugnace: la mécanique freine, s'éteint petit à petit, s'épuise et se meurt pour mieux reprendre du terrain et revivre!
Comme un jouet remonté qui cesse d'avancer faute de batterie chargée! Débâcle, déplacements en ondes de la musique percussive si proche et si dansante!
Un jeu d'enfants !
Un concert réjouissant, haut de gamme qui se termine par un "bis" : les six musiciens comme pour un déjeuner sur l'herbe avec leurs mallettes-jeu de percussions portables-glockenspiel- s'en donnent à cœur joie et avec beaucoup d'humour.
C'est la "touche" maison d'une belle formation sérieuse dirigée par un "chef" ce soir là en habit de toge, peplum noir très seyant, dans les plis et replis de la musique d'aujourd'hui.
Le 14 Mars au théâtre de Hautepierre
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire