Rachid Ouramdane a du courage et l'âme d'un combattant, d'un militant, d'un battant pour qui le mensonge ne peut coexister avec vie et société.Et "Polices" à du caractère.
Pourtant la "police" n'est-elle pas souvent le point d'encrage de la veulerie, de la mauvaise foi, et du fanatisme?
Sur le plateau, des bandes de couleurs: bleu, orange, gris.
Comme une chaussée tracée au cordeau, pour guider la circulation des corps, imposer les directions -la bonne direction-, la bonne attitude soumise aux lois et à l'éducation étiquettée et conforme à une certaine bien séance et bon comportement!La marréechaussée donc!
Mais un enfant y surgit, contant son histoire: le texte de Sonia Chiambretto, auteure de "Polices" dont Rachid Ouramdane s'est inspiré, imprégné pour bâtir son spectacle."Zone d'éducation prioritaire" donc pour ce paysage, brossé en quelques gestes et en deux couleurs:bleu et orange.
Bleu comme l'uniforme des policiers qui arpentent la cité en de longues traversées de plateau:tous les mêmes ou presque, hommes vêtus de leur "bleu de travail".
Pas de gadjet, képi ou autre accessoire: juste des corps qui marchent tous dans la même direction sans se poser de question. La musique enfle, se répand, assourdissante.
Un groupe de jeunes filles s'emparent de la scène, oscillant , murmurant en choeur une mélodie lancinantes.
Les témoins et acteurs de la vie de la cité?
Plusieurs femmes en orange s'imiscent dans ce vaste panorama de terrain vague, accompagnent sereinement ce qui sera bientôt le théâtre de drame, de batailles, d'affrontement entre populations de couleur et CRS ou policiers de service.
Policiers, vos papiers!
Des meurtres sont commis par ces derniers sans être réparés. Mensonge, duperie:la voix off nous raconte les faits et gestes des membres d'une communauté dressée en trois semaines à devenir de petits soldats de l'autorité, du pouvoir et de l'intimidation!
Sur le fond de scène, un dispositif de carrés translucides réfléchit une vidéo très esthétisante où se racontent les hostilités.Une adaptation de "Trois frontières" de Mehdi Meddaci.
C'est magnifique:images de corps , les bras ouverts qui semblent étreindre et embrasser le monde et plonger dans le gouffre de la stupidité humaine, celle qui noie les autres, se permet de ne pas enterrer ses victimes, de les laisser choir au fond d'une écluse. Accident? Hasard, erreur bavure? Mais que fait la police?
Elle ignore tout sur tout!
Les acteurs, plus que des figurants, engagés à l'occasion d'une "résidence" du chorégraphe, deux semaines durant in situ sur le terrain strasbourgeois qui les a guidés et seconder dans leur rôle de flics sont tout simplement "formidables":pros, concentrés sur une gestuelle automatique, en canon, robotisée, mécanique.
Flux et reflux de mouvements collectifs en cascades, en réponse et rebond, en ricochet.
Techniquement très au point, en rythme et en osmose.
Connivence entre sujet et gestuelle, complicité des uns avec les autres, c'est un travail collectif remarquable qui a impliqué cette bande, cette foule anonyme, ce choeur-chorale de jeunes filles engagées pour l'occasion dans cette généreuse aventure humaine, politique, artistique.
Non les sirènes ne hurlent pas: c'est sur une psalmodie discrète qui égrène noms et prénoms des habitants du 9/3 que se meut une femme, noire, qui plus tard hurlera sa fougue et son désacord avec tout se qui se trame au fond des cités de banlieue, cernées par les "polices".
Celles des esprits, des corps domptés qui ne se révoltent pas, se soumettent, vivent cependant avec ses "forces de l'ordre".Entre hier et aujourd'hui, tous les faits relatés au sein du texte questionnent nos fantasmes sur cette intitution, municipale ou nationale qui siège dans un "hotel de police", une gendarmerie dont sainte Geneviève serait la patrone(hélas)!
Le CND de Pantin, n'est-ilpas logé dans une ancienne mairie-gendarmerie?...
Pour ne plus "policer" les corps dansants, en révolte?
Le son, celui de Jean Baptiste Julien, fonde ce monde de rythmes, de bruits, de paroles et de lecture du texte.Un personnage à part entière, parmi les voix, le martellement des pieds de ces fantassins de l'ordre tous en rang serrée comme à l'armée.C'est l'espace public, l'opinion publique qui est en cause ici.
A la frontière entre manifeste et spectacle, "Polices" révèle l'absurdité de ce monde civil où des professionnels de l'ordre sévissent à l'envi, selon leur envie.Ils "officient" sans vergogne! Ces officiers de l'ordre.
Un peu de poésie: et si "la terre est bleue comme une orange", ce spectacle aux deux couleurs fondamentales et métissées, est une palette, un tableau aux touches appuyées, comme des taches à effacer peut-être ou à mettre en valeur, à montrer et désigner comme deux tons à ne pas ignorer dans les couleurs de la vie de la cité.Avec ou sans bavure....Circulez, RAS il n'y a tant à signaler!
Dans la gendarmerie, les gens d'armes se rient de tout.
Au Maillon Wacken à StrAsbourg en collaboration avec Pôle Sud jusqu'au 22 MARS
Et allez voir sur les écrans du STAR, ce film antidote à l'ennui sur les policiers "Wrongcops" de Quentin Dupieux.
Décapant et sans képi.
ca décoiffe!!!Et tout y est dit et filmé! Quel corps de métier....Corrompu, veule et sans talent!
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vendredi 21 mars 2014
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