mercredi 29 janvier 2020

Terpsichore en baskets et autres marcheurs de fond.Conférence "déroutante", vers Mathilde.

Conférence]-Rencontres avec la chorégraphe Mathilde Monnier 💃.
- Déroutes ou la marche en danse -
Déplier les enjeux esthétiques, politiques et historiques à partir d'un geste élémentaire : la marche !
Ce thème qui s'inscrit dans l'histoire de la danse contemporaine à travers des forces militantes, politiques mais aussi dans une multitude de gestes créatifs, d'expérimentations et d'explorations artistiques, sera l'occasion de trois rencontres qui mettront en dialogue Mathilde Monnier avec des invités venus d'horizons différents.




Leurs échanges portent sur le Lenz de Büchner qui a servi de point de départ à l'oeuvre de Mathilde Monnier, Déroutes. Cette rencontre est également l'occasion d'un mini concert exceptionnel de chansons de Rodolphe Burger autour du projet Lenz (mené en collaboration avec Jean-Luc Nancy).

"Si la marche est à la danse, ce que la prose est à la poésie"(Valéry), si danser pour mieux aimer son corps (Nietsche) sont des références,  c'est "au pas" que l'on se glisse dans les univers croisés de deux complices (le maitre et l'élève) :  le couple, duo,Nancy/ Burger, le second introduisant la "performance" du jour, de sa voix chaleureuse, chaloupant les idées qui viennent de surgir.

photo robert becker

Le rêve de Jean-Luc: se déguiser, se costumer en Rousseau, Marx, Hegel, Lenz, la coiffe à chaque fois changeante pour incarner jusqu'à Nietzsche: tous ceux qui, promeneur solitaire, marcheur, fréquentent balade et errance. Alors que Rodolphe Burger chatouille la guitare, entonne ou murmure textes et citations diverses, Jean-Luc Nancy, aguerri à la scène semble "marcher sur la tête" en toute lucidité. A la renverse aussi comme Mathilde, en route sans faillir aux désirs de suivre les chemins de traverse, les chemins de l'âne: celui qui broute où le mènent parfums, saveurs sauvages.

photo robert becker

 

On ne nous "fait pas marcher" ce soir là, mais on nous introduit, nous guide dans les contrées de références des uns et des autres, dans un vaste paysage: celui des images magnifiques projetées simultanément: celles de forêts dans le brouillard, de Schirmeck à Sainte Marie aux Mines: un personnage énigmatique, longs cheveux blancs hirsute, court, chute, se lance à l'assaut de ses espaces, parcourt, marche et suit son chemin jusqu'aux étoiles... C'est Lenz, sauvage, débridé, en fugue, en cavale, le corps en marche.


photos robert becker

La silhouette de Jean-Luc Nancy se confondant dans la nature, dos à dos avec ce Lenz fantomatique qui parcourt l'écran. Beaucoup de finesse dans cette évocation des sources d'inspiration de Mathilde Monnier pour ses recherches donnant naissance à "Déroutes", cet opus si fort où les corps en branle s'égarent, où la marche anime les idées et leur donne corps et graphie. Les danseurs comme des voyageurs à la Rousseau, des penseurs à la Descartes.

"Das Wandern ist des Mullers Lust".. .pour notre "Terpsichore en baskets" : une ode à la promenade, au trajet à la divagation, autant qu'au but fixé que l'on atteint jamais.

Cette rencontre singulière, objet scénographique, scène emplie de la joie de la marche pourrait aussi renvoyer à la lecture de "De la marche" de Henry David Thoreau : "nous devrions entreprendre chaque balade, sans doute, dans un esprit d'aventure éternelle, sans retour". "On nait marcheur, on ne le devient pas" !

« À quoi bon emprunter sans cesse le même vieux sentier? Vous devez tracer des sentiers vers l'inconnu. Si je ne suis pas moi, qui le sera? » Inspiré par Ralph Waldo Emerson et son Nature, Henry David Thoreau (1817-1906) quitte à vingt-huit ans sa ville natale pour aller vivre seul dans une forêt, près du lac Walden. Installé dans une cabane de 1845 à 1847, il ne marche pas moins de quatre heures par jour !
Pour l'auteur de la Désobéissance civile, farouchement épris de liberté, c'est bien dans la vie sauvage - sans contrainte - que réside la philosophie. Par cet éloge de la marche, exercice salutaire et libérateur, Thoreau fait l'apologie de la valeur suprême de l' individu. Conférence donnée en 1851, De la Marche constitue un bréviaire indispensable de l'éveil à soi par la communion avec la nature. 

sally banes terpsichore en baskets

 

  A suivre.....

Deux autres rencontres avec David Le Breton (sociologue) et Irène Filiberti (dramaturge et critique), puis avec Bruno Bouché (chorégraphe et directeur du Ballet de l'Opéra du Rhin) et Gérard Mayen (journaliste et critique), prévues respectivement les 12 février et 3 mars 2020, porteront sur les usages et pratiques de la marche dans l'histoire de la danse, la philosophie et, plus largement, les sciences humaines.

Ce cycle de conférence "Déroutes ou la marche en danse" a comme objet de déplier les enjeux esthétiques, politiques et historiques à partir d'un geste élémentaire: la marche. Ce thème qui s'inscrit dans l'histoire de la danse contemporaine à travers des forces militantes, politiques mais aussi dans une multitude de gestes créatifs, d'expérimentations et d'explorations artistiques, sera l'occasion de trois rencontres qui mettront en dialogue Mathilde Monnier avec des invités venus d'horizons différents.

📍 Mercredi 29/01/20 à 18h30 | Auditorium 1er étage 


Vingt ans avant De la marche de Henry David Thoreau, Balzac écrit Théorie de la démarche, article qu’il fait paraître en 1833. La marche, c’est la liberté dans la nature, la démarche, c’est la contrainte dans la société. Le pavé de Paris est piétiné tous les jours par une foule de marcheurs ; mais marchent-ils tous, ces citadins, de la même manière ? Et leurs différentes démarches, que signifient-elles ? Figurez-vous Balzac assis à la terrasse d’un café, analysant le pas de chacun et cherchant, non sans ironie, à élaborer une nouvelle science. La Théorie de la démarche est issue de cette observation, qui ouvre à la psychologie et à la sociologie de La Comédie humaine

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