Scène encombrée, empêchée comme un handicap pour les futurs habitants de cette geôle improbable...En route pour un huit clos farci de hors champ, une fable truffée d'histoires, de textes qui ripent, s'entrechoquent dans des univers divers, opaques ou lucides, clairvoyants dans cet espace aveugle et parfois lumineux...Un voyage extra-ordinaire au pays de François Tanguy, cela ne se rate pas: on y plonge, toutes sensations en branle, les yeux grands ouverts pour capturer l'absurde et le non conventionnel, du texte à la diction, des costumes aux accoutrements bigarrés de cinq personnages en quête d'auteurs...Choisissez qui de l'âne ou d'Ovide vous fera réfléchir, ployer vers des pensées incongrues dans des métamorphoses stylées, incomparables tricheries ou leurres de ce microcosme étrange qui navigue à vue sur le plateau: plateau jonché de planches, tables dressées qui migrent comme des iceberg en débâcle, portes arrachées...Tout fout le camp sur ce radeau qui méduse.....Et hypnotise à bon escient son public, frappé par tant de mystère...
"De même, en outre, en plus": item et alors? Cela questionne !
On en remet une couche, palimpseste savant et poétique d'une ritournelle qui s'enchaine à l'envi et séduit par sa sensible et apparente incohérence...On se régale des mots, des accents suisses, d'une langue allemande (on croit entendre Bruno Ganz), on vogue avec le navire sans secousse ni tempête.Ovide, Walzer, Dostoevski, Goethe, Brecht pour ce bal des Laze, fête paienne du texte, radicalité du jeu qui est un autre: les comédiens se "métamorphosent" balancent leurs corps dans le vide, obscurcissent l'atmosphère ou la magnifient afin que l'on passe derrière le miroir sans encombre: magie ou alchimie de la mise en scène, du verbe ou de la musicalité des mots, qui l'emporte, peu importe pour ce tableau à multiples entrées, diorama muséal du monde irréel et fantasmatique d'un metteur en scène aiguisé, galvanisé par sa propre imagination et imagerie mentale; des corps-décors en accord ou désaccord rythmique, c'est cela qu'on pressent, qu'on ressent pour le malaise le plus agréable, la transe ou la vacance sublime du lâcher prise, du laisser aller...très maitrisé!
Prenez "le chemin de l'âne" en bon "idiot", vous serez loin des autoroutes du bonheur factice, près des artefacts de la désobéissance et de l'indisciplinarité rêvées. Broutez où cela vous chante, les meilleures épines des plus belles haies sauvages, à votre gré comme ces cinq hurluberlus, chantres de l'étrange et de l'inconnu.
Le Théâtre du Radeau naît au Mans en 1977, lorsque la comédienne Laurence Chable réunit un groupe d’acteurs. François Tanguy en devient le metteur en scène en 1982, et la compagnie va très vite connaître une reconnaissance nationale et internationale. En 1985, elle s’installe dans une ancienne succursale automobile, qui devient La Fonderie en 1992. Le public du TNS a pu voir Ricercar en 2009, Passim en 2015 et Soubresaut en 2018."
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Du 08/01/2019 au 16/01/2019
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