La mère de Jack l'abandonne, et il
fait si froid à Edimbourg en cet hiver 1874 que le coeur du gamin gèle.
Pour le maintenir en vie, une femme médecin, le Dr Madeleine (c'était le
pseudonyme de Jean Valjean, dans Les Misérables), lui greffe une
horloge mécanique : elle bat comme elle peut. Pour continuer à vivre,
Jack n'a pas trois voeux à exaucer, mais trois règles à suivre,
impératives, sous peine de mort : ne pas toucher aux aiguilles, éviter
toute colère et, surtout, ne jamais tomber amoureux. Impossible, bien
sûr, dès lors qu'il rencontre miss Acacia, la toute menue chanteuse
myope que courtise le sombre et détestable Joe.
C'est
un film étonnant. Né de l'imagination du chanteur Mathias Malzieu
(Dionysos) dans un disque de chansons, d'abord, puis dans un album
illustré par sa complice, Nicoletta Ceccoli. Avec l'aide d'un troisième
larron à la réalisation, ils ont inventé ces personnages aux grosses
têtes et aux yeux emplis de tristesse. On sent, très visible,
l'admiration des auteurs pour Tim Burton mais, après tout, autant
s'inspirer des meilleurs. On sent aussi leur goût pour les romantiques
anglais à la Mary Shelley — même si ce n'est pas la créature de
Frankenstein que l'on croise, mais Jack l'Eventreur, le temps d'une
chanson interprétée par Alain Bashung.
L'hommage
le plus fervent, le plus touchant, néanmoins, est celui qu'ils rendent à
un art nouveau que nul, à l'orée du XXe siècle, ne prend encore trop au
sérieux : le cinéma. Car, dans sa quête pour retrouver la femme de sa
vie, Jack rencontre Méliès, comme lui victime des intermittences du
coeur, mais toujours amoureux des femmes, au point de s'éprendre, dans
un parc d'attractions andalou où il projette ses petits films, d'une
fille à deux têtes, chacune aussi ensorcelante que l'autre...
Dans
ce film qui célèbre avec ferveur et extravagance la magie du rêve règne
une sourde mélancolie. Car tous les personnages restent à jamais des
inguérissables, des éclopés, des rejetés : Jack et son palpitant
artificiel, miss Acacia, dont le corps se couvre d'épines à la moindre
frayeur, ou encore Arthur, le poète alcoolique qui squatte la maison
isolée du bon Dr Madeleine. Ils ont tous ce charme fragile, désuet des
survivants malgré eux se déplaçant tant bien que mal dans un monde hors
du temps. D'où ce dénouement romanesque qui tranche avec la joie forcée,
souvent artificielle, des films d'animation habituels. L'émotion qu'il
suscite rappelle les larmes délectables que l'on versait en voyant, sur
un écran, s'éteindre doucement dans la neige la petite marchande
d'allumettes filmée par Jean Renoir.
Et avec les voix de Bashung, Olivia Ruiz, Grand corps malade,Arthur H et Emilie Loiseau, s'il vous plait: c'est dire si c'est dansant et musical!!
Traité aussi à la façon d'une comédie musicale avec une scène désopilante de cabaret, danse macabre endiablée sur fond de vmusique country.
Ca déménage et ça danse à l'envi!
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