mercredi 21 mai 2014

Soirée "en torse", belle "entorse" aux dérèglements chorégraphiques à Pôle Sud ce 20 Mai!

Le torse, ce demi-corps, à demi vêtu ou dévêtu, aux prises avec le monde en direct, la peau exposée à l'élément aérien mais aussi au regard des autres sur un corps glorieux (chez Béjart ou à l'armée), dans la culture africaine aussi.
Ce torse nu qui dévoile la poitrine de l'homme ou de la femme, seins nus ou muscles exposés à vue...En-torse à la bienséance, convoitise, envie, désir affiché de séduire ou d'être tout simplement à l'aise, sans entrave, au soleil, en proie au danger? Exposé?
Question de corps donc ce soir là dans la programmation toujours étonnante du festival "Nouvelles" à Pôle Sud, Strasbourg!

Chez Thomas Lebrun,dans "Trois décennies d'amour cerné", le corps habité par l'amour:l'amour de l'autre et son "grand corps malade" du sida pour Thomas Lebrun.
Sa mémoire, son vécu, sont hantés par les ravages du sida, mais aussi par la peur,la honte,l'angoisse, le remord et toutes les réactions humaines liées à l a propagation, la contamination, la contagion de la maladie dans les années 1980:celles de sa jeunesse, de ses expériences, de ses moments de doute.
Quatre solo, comme quatre pétales de trèfle, quatre moments de solitude ou d'échange en duo, "à propos" de la confiance en l'autre, à propos des risques encourus à s'aimer au de là des dangers omniprésents, latents,endémiques...
La danse y est hachée menue sur un plateau nu: quelques néons, à bâton rompu à la Morellet en zigzag, zèbrent l'espace le temps d'un éclairage....Intermittent.
D'abord un homme seul, Anthony Cazaux,planté sur ses talons hauts, en jean moulant s'exhibe, beau, musclé, glorieux
Quand il ôte ses vêtements, cagoule et fermeture éclair en mode majeur, il danse son humilité sans fard sans oripeaux rappelant une féminité violente et falsifiée.
Il est homme, être humain dans "De risques": il ose, se frotter au danger.
Suit un couple Anne Emmanuelle Deroo et Raphael Cottin,qui se regarde, se côtoie, torse nu: jusqu'où iront-ils dans leur rapport amoureux, transgressant les risques, sans "De peur" d'être contaminés.
La danse est toujours interrompue, tétanique, retenue De beaux portés, peau contre peau pour se prouver que l'on peut s'aimer, se frotter, se pénétrer.
L'origine du monde, ouverte se tend et s'offre dans ses en-dehors de cuisses et jambes impudiques,osés, justes et mesurés.
Solo "De doute" où Anne Sophie Lancelin évolue au sol ou dans l'éther avec une grâce divine, frôlant la beauté du "De doute", celle qui s'interroge, se questionne, rabâche sa leçon de bonne conduite pour mieux inonder la scène de lucidité ou d'introspection .Masquée par ses longs cheveux, crinière capricieuse, au vent de ses évolutions palpitantes.
Au final Thomas Lebrun, chorégraphe se convoque et s'inscrit dans ce carnet de bal avec le quatrième chapitre, épilogue de la pièce à quatre feuilles.Côté cour, pour équilibrer le côté jardin des évolutions de ses camarades; Toujours concentré, mobile dans "De solitude", réflexion sur la solitude de la décision irrévocable de ne pas céder à la tentation du risque
S'aimer, péché capital aux yeux d'un fléau où la camarde ne saura faire de cadeau?...Ni vous ménager.
Les choix musicaux dont Patti Smith sont judicieux et témoignent d'une époque où la liberté des corps était encore possible, sans contrainte ni risque de contamination.
On est bien con-cernés par ces "décennies  d'amour" encerclé, menacé, terrorisé par le mal.

Succède à cette belle pièce qui laisse songeur, "iFeel2" de Marco Berrettini.
Dans le studio de Pôle Sud le public s'installe sur les gradins alors que dans un décor de jungle aux arbres  luxuriants suspendus ( décor de Victor Roy) évoluent déjà deux personnages: un homme, une femme, de pantalons de cuir vêtus, torse nu! Ils vont une heure durant arpenter ce topique en pas de bourrée contemporaine, les yeux dans les yeux comme hypnotisés l'un par l'auTre, se ravissant par "le bout des yeux"
L'effet d'hypnose opère et l'on se prend à vivre cette perte, cet abandon de soi avec empathie, compassion et enthousiasme
Marie-Caroline Hominal, seins au vent, sourire espiègle au bout des lèvres dessine des circonvolutions gracieuses et de plus en plus audacieuses, face et autour de son partenaire Marco Berrettini: parade amoureuse, danse de séduction sempiternelle, charnelle, vertigineuse, à vous couper le souffle.
Jusqu'à quand, jusqu'où iront-ils dans cette confrontation, face à face, balade , chanson de gestes de plus en plus rythmés jusqu'aux percussions, allusions aux rythmes indous?
Un être malin, faune se dévoile et surgit d'un bosquet: homme sauvage dépliant une table de camping articulée, il s'installe et offre l'objet du délit à,cet Adam, à cette Eve, égarés dans l'Eden, ce paradis perdu.
Une pomme? Non un sandwich- salade qu'il leur tend comme un trophée ou un appât dont la danseuse se fera un ravissement de tenter son partenaire de lui faire miroiter l'objet transitionnel du désir.
Sautillante, alléchante, radieuse, elle le mène par le bout du sandwich, en dévore aussi une bouchée tout en dansant On est sur le dance floor rétro sur des musiques signées Samuel Pajand, répétitives et enivrantes! Et on les envie!
Les deux petits faunes au jardin d'Eden se fondent aussi dans le péché capital, torse nu, tout cru!
A croquer sans modération!
www.pole-sud.fr

0 commentaires:

Enregistrer un commentaire