mercredi 26 septembre 2018

Talea Ensemble "Sideshow" :"baraqué", "attractif" ce Quasimodo de la création musicale !




Jeu de massacre!
Sideshow, oeuvre du compositeur Steven Kazuo Takasugi pour octuor amplifié et électronique, est une belle occasion d’accueillir pour la première fois à Musica les New-yorkais du Talea Ensemble.
La pièce démarre avec, face au public, une galerie de portraits frontale, bien vivante: huit musiciens impassibles se mettent imperceptiblement à grimacer: le ton est donné: grotesque, mimétique, loufoque, burlesque!
Touche humoristique que le spectacle ne quittera pas, durant son déroulement, les protagonistes, assis, visibles comme des hommes-troncs dans un théâtre de guignol ou un jeu de massacre. On est aussi dans un jeu de tonneau et surtout dans une foire, une fête foraine où l'on montre encore des monstres, des êtres ou créatures fantastiques.
Ici, c'est la musique que l'on désignera comme "monstrueuse", faite d'ingrédients savoureux, acides ou amers, plats de résistance d'un banquet tantôt somptueux, tantôt très "arte povera"!
En saccades mécaniques, ces hommes et femmes sans corps vibrent comme des mécaniques bien remontées, rythmes et gestes heurtés, tétaniques, hachés, figures d'automates sortis tout droit d'un musée du jouet.Leurs regards s'envolent au plafond à l'unisson, les directions des visages s'inversent: la chorégraphie se dessine, stricte et mesurée, très organisée. Jeu de pantins, d'animaux de cirque en vitrine qui nous regardent, bien sur, comme aussi des bêtes curieuses! Figés, hiératiques ou animés de bons sentiments à notre égard, mais moqueur et flambeurs, irrévérencieux en diable!
Qui sont les monstres: les "regardés" ou ceux, voyeurs, qui regardent et payent pour voir la musique, entendre les gestes et facéties multiples de cet octuor merveilleux ou salace! Barrissements, sirènes, tropes d'éléphant, mugissements sont de la partie, plainte, bruits de bouche...Poisson, la bouche ouverte, comme des carpes muettes dans un étang, les visions affluent, l'imaginaire travaille: des vampires aussi se montrent, gentils êtres passagers, akais japonais peuplant l'espace et l'univers fantasmagorique! Détournement des instruments que l'on redécouvre, faits pour toute autre chose et surtout mise en scène parfaite, sobre de cet alignement d'hybrides musicaux qui émettent des sons, des bruits et délivrent des images de contes fantastiques, de BD Manga drolatique. Ils nous fixent, nous dévisagent, immobiles dans des silences évocateurs qui parlent à nos fantaisie: irrésistible jeu de mime, de guignol ou dramatique expression de ces cabossés de la vie, cible et témoins de notre cruauté, ici bien récompensée!
La musique est capricieuse, changeante, versatile et enjolivante, ils nous font "la cène" à huit apôtres, gazouillent, vocifèrent musicalement, fébriles, animés dans un grand désordre virulent, un fatras à la Prévert, un inventaire des farces et attrapes d'un magasin de carnaval, une boutique fantasque de forains!
Divertissement savant et critique, miroir réfléchissant de nos cruelles et sadiques pensées! On songe à Ionesco , Kafka ou aux titres d'Erik Satie: "moisissures d'une chambre intérieure", ou "l'éternel retour de l'dentique" !
C'est du sérieux ce cataclysme, cette hécatombe, ce capharnaüm dévolu au sourire, au rire, à la moquerie, aux sarcasmes et à la caricature. Daumier veille au grain et s'incarne en Steven Kazuo Takagugi, maître d'un art martial nouveau: la musique de foire qui n'en est pas une! Jeu de figurines, chaos, tohu-bohu salvateur, casse t^te ou casse-pipe de la musique contemporaine! Exhibition dans un théâtre musical, chargé d'absurdités, de "non-gestes" évocateurs
Faites vos jeux !La partie de pétanque est finie, on garde les pieds tanqués et on se fait la belle ou la revanche!

A l'auditorium de Fance 3 le 25 Septembre


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