LA FÊTE SAUVAGE
FRÉDÉRIC ROSSIF, LUCIE ANTUNES
La Fête Sauvage est un film de Frédéric Rossif sorti en 1976, sur une bande originale de Vangelis et des commentaires de Madeleine Chapsal. À la fois ovni et pionnier du genre documentaire, Frédéric Rossif propose une ode à la nature dans une grande fête sauvage. En 2022, Lucie Antunes s’attaque à ce film magistral en composant une nouvelle bande son électro et minimaliste avec les Percussions de Strasbourg et Axel Rigaud en gardant cette idée de grande fête et de contemplation de la beauté animale.
Un film animalier, des percussions et bande électroacoustique, c'est un mix de surprises, de ralentis, de décomposition du mouvement à la Muybridge ou Marey, de montage et découpage comme une partition picturale à la Kandinsky...Alors le métissage des genres et disciplines est évident et l'on se régales des ébats amoureux de félins pour l'autre, de cous de girafes délectables, de sauts et de courses folles contre la montre et la mort d'animaux à l'affut du gibier.
Anthropophages par nature ou nécessité, les animaux sont chasseurs et parfois cueilleurs...Les images défilent "tambour battant", les trois musiciens des Percussions s'adonnant sans regarder les icônes à l'écran, sans chef. Olivia Martin, Rémi Schwartz, Enrico Pedicone et Axel Rigaud aux consoles électroniques s'adaptent et transcendent la narration animalière pour une dramaturgie musicale pleine d’élan d'allant, de verve, de ferveur. Cruauté des séquences et acharnement musical pour mieux battre en retraite et vaincre la peur de cette réalité.
Les coups sont bas et les séquences fort belles, les personnages se succèdent , les suricates sont sublimes, debout, les têtes aux aguets, les sonorités percussives les accompagnant pour un accomplissement rythmique, calé, débordant d'humour et de véracité. Les éléphants, oreilles au vent, frémissent, les hippopotames dansent et soufflent, les flamands roses marchent, avancent comme la partition et le voyage est un état de siège permanent. Une navigation terrestre de rêve, un embarquement entre terre et ciel, oiseaux d'envergure ou petit renard affolé. Et si les animaux dansent, en parade nuptiale, en consentement amoureux, en calins ou étreintes, les gosiers s'échauffent et enflent en couleur, les zèbres font une affiche en noir et blanc, rayée, comme la décomposition cinétique du mouvement. Un film chorégraphique, "articulé" plein de anches et ligatures, de coffres, de respirations comme un instrument hybride, un ovni sans qualificatif qui fait du bien. Pas un seul humain à l'écran....
edi dubien |
françoise pétrovitch |
14.11.2024 théâtre de Hautepierre, Strasbourg
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire