mardi 28 février 2017

Concordan(s)e: "The Spleen": Frank Micheletti et Charles Robinson: les naufragés du délire.

Photo robert becker
La cuvée 2017 de l'expérience "Concordanse" s'annonce gouleyante et enjouée avec la première "mondiale" du duo singulier Frank Micheletti et Charles Robinson: ils ne se connaissaient pas, se rencontrent et tissent trame et chaîne de concert pour une pièce dansée, jouée,racontée par l'un et l'autre à deux voix, à deux corps et accessoires! Une fugue dans des univers drôles et rarissimes, inédits, singuliers, inouïs Fin d'après midi dans la bibliothèque Audoux au Carreau du Temple à Paris..Il apparaît dans le décor, on se soupçonne d'être l'écrivain , mais il bouge très bien et l'autre se meut délicieusement, au sol ou bien ancré dans son grand corps charpenté, tresses et nattes déroulées sur ses épaules: deux hommes, compères, complices, dialoguent, se répondent, cheminent le long des ponts de la rivière d'un texte sur les tripes, l'enveloppe corporelle, la peau. Ce qui fait que l'on se touche, communique: la danse, en fait, la patrole aussi, le verbe à l'appui
Comme une lecture dansée mais pas tout à fait, ce duo se joue des mots et objets hétéroclites, s'amuse ou se regarde, s'interroge, se questionne.La science du jour, la "spleenologie" pour mieux cerner les symptômes d'un mal triomphant.Comme une introspection à deux, un collage d'idées, une dissection étrange de chair et de mots, des entrailles de la pensée en mouvement
Nos deux escogriffes, avec leur arsenal d'objets inutiles ou improbables font les trublions dans les rayons de la bibliothèque avant de saluer le public enchanté de cette rencontre fortuite ou organisée!
La rencontre-échange après spectacle est vive et atteste de tout l'intérêt de la démarche. Qui fait quoi, qui écrit, danse, chorégraphie, qui met en scène, compacte les propositions multiples qui fusent durant les trois mois interrogateurs de préparation où chacun apporte sa pierre à l'édifice?
Pas de "recette" mais un festin généreux à partager encore durant une tournée de ce "Spleen" jusqu'au 30 Mars...
www.concordanse.com

Photo robert becker



"Répertoire": Cécilia Bengoléa et François Chaignaud au CND Pantin:au "Centre", François, Cecilia et les autres.... Focus!


Au tour de "Vlovajob Pru", après Trajall Harrell en 2016 de mettre en lumière leur oeuvre, panorama vivant d'un répertoire contemporain qui se construit et vibre encore, d'actualité, de tendresse, de baroque, de folie mais aussi de réalité cruelle.Cécilia et François serait-on tenter de les citer, de les nommer, Eva et Adèle de la danse, main dans la main, glamours ou sérieux, éphémères ou pérenne, audacieux, toujours!
Une installation à découvrir dans le grand hall à la Galerie du CND, le "centre" incontournable animé par Mathilde Monnier, la maison des danseurs, du métier à tisser toutes les ramifications, convergences et rhizomes de la déesse et muse Terpsichore
Installations avec beaucoup d'extraits de séquences filmées tonitruantes de Bengolia Chaignaud, de photos, croquis, dessins de ses explorateurs de l'espace dansé, ses orpailleurs de la moindre pépite de chorégraphie, de gestuelles qui émeuvent ou se meuvent dans la chair du vivant de l'espèce humaine et animale.Deux courts métrages délicieux "Bombom's Dream et "Rythmasspoetry" à découvrir pour la saveur colorée des images, le hors-champ de l'imaginaire du binôme créateur, ici accompagné par Jeremy Deller. Des rushs, filmés lors de leurs pérégrinations au Japon, sur quatre moniteurs en diffusion simultanée: à vous de lire tout ce qui se passe dans l'espace urbain, de choisir votre espace ou de tenter d'en faire une synthèse en régie directe!


Jeux et plaisir de rencontrer ici le cœur de leur processus de création, à cœur ouvert.
Expo où l'on fait le visiteur improbable d'une expérience partagée, retrouvée.
Huit spectacles au menu dont les deux "premiers" "Dumy Moyi" et "Buss dem head" font figures d'amuse bouche réjouissant, accès direct à leur tempérament, style et signature.
Le solo de François Chaigaud en ouverture, le "Dumy Moyi" découvert à Montpellier danse 2013, ici dans l'espace singulier de béton et mezzanine intérieure du CND est une belle retrouvaille. Lui, seul avec sa voix tantôt de basse ou de ténor (voisine de la haute contre) et sa danse ethnique en diable, affublé de plumes et corolle crinoline polychrome bigarrée...Vus d'en haut, les tournoiements chamaniques de son corps derviche tourneur en extase sont sublimes!Et de chantez tout en dansant sur ces mélodies ukrainiennes, du Tchaikovsky,, des sonorités séphardiques médiévales, des mélopées sur foind de tarentelle ou air de zarzuella, une chanson espagnole ou un air de John Dowland: tout un voyage à travers contrées et paysages physiques, joyeux, arides, résonnant au cœur du béton du CDD, en échos rebondissants: les muses des arts s'y régalent et se joignent à ce bal pour solitaire intempestif, pour chamane ou papas, pour être épris de liberté et de traditions mêlées. "Ma maison, mon lieu utopique, ma demeure, que Chaignaud partage de très près avec le public, debout à ces côtés, frissonnant de cette proximité demandée, revendiquée, acquise, conquise et acceptée!
Une présence haute en couleurs, relevée par une plasticité charpentée d'un corps sculpté par la lumière qui le poursuit, le dessine dans l'espace réduit, le traque ou le révèle à l'envi.

Suite de la soirée avec "Buss dem head","Eclatez-leur la tête" un florilège rastafariste de danses urbaines de la Jamaïque interprété par trois danseurs "pêchus" galvanisés par une musique tonitruante et salvatrice. Au studio, sur les gradins, le public réjoui est en empathie avec tant de fougue et d'enthousiasme de la part de  Cassie dancer et Famous; Cécilia Bengolea délivre ici une composition chorégraphique simple, des gestes empruntés aux cultures urbaines tous azimuts: rebondissante, enjouée et participative, la danse n'a de qualité que de par sa verve, sa chaleureuse tonicité, son énergie jeune et belle, frêle ou puissante selon les corps convoqués à s'en emparer!
L'ambiance chauffe et se communique quand quelques amateurs rejoignent le plateau et s'en donne à cœur joie sur les consignes mimétiques des deux "animateurs fougueux, le temps de la soirée partagée.
Le CND vibre encore tut le mois de Mars des ondes bienfaitrices du couple Bengoléa-Chaignaud, trublions chéris du "centre" le temps de cette judicieuse rétrospective, "répertoire" tout neuf d'une danse qui s'invente et se construit une "histoire à sa façon".
Au CND Pantin, jusqu'au 31 Mars .

lundi 27 février 2017

"Flexible Silence" de Saburo Teshigawara: l'oeuvre d'or !


Quand Saburo Teshigawara rencontre la musique de Messian et de Toru Takemitsu, prend alors corps une formule magique, condensé, concentré de cristaux qui se cristallisent se focalisent pour œuvrer dans le registre de la cérémonie, du rituel, du passage de la mutation.Et créer une matière plastique toute de lumière, de fulgurances corporelles, d'évanescence: du mystère s'il s'en faut !
Belle prestation pour l'occasion en live de L'Ensemble intercontemporain, présent sur scène et maître, métronome de ballet !

Création inédite devant nos yeux d'une danse libre, déliée de Saburo, de ses danseurs en lien étroit avec la présence des inteprètes musiciens "acoustiques".
Messian en ouverture avec son oeuvre "Fêtes des belles eaux" de 1937, musique intimiste, envoûtante, emplie de "silences", ceux qui font vibrer l'espace et les corps, ces silences intérieurs qui emplissent et se répandent en échos fertiles Teshigawara explore tous les interstices, les failles des plages musicales mélodiques pour inscrire dans l'espace, courbes et méandres, entrelacs et tissage de lenteur.Solo fulgurant, duos de choc, ensemble de danseurs virevoltants dans la candeur du noir et blanc: tout est "fait maison" de main de maître, unique créateur des lumières, costumes, décor et chorégraphie. Maitre de cérémonie, danseur hors pair aux gestes précis et mesurés, tournoyant en derviche, ému et enivré de musique et de frissons. Toujours fragile, stylé, rayonnant de modestie et de mesure, jamais dans la démonstration ni la "performance".Dans des cercles et ronds de lumière qui se multiplient, divaguent, et se franchissent à l'envi.


Les pièces de Toru Takemitsu sont de petits chapitres légers: "Air", comme le flux de la mer, le souffle et les respirations du vent, de l'air qui se déplace et fuit la pesanteur. Les corps font de même et glissent, rapides, vifs argent sur le plateau, lumières sculptant l'espace parfois comme des lignes de partitions imaginaires .Le souffle des instruments, la harpe égrainent de petites touches subtiles en rebonds multiples, en écho: les corps anticipent ou répondent, accélèrent ou s'immobilisent à l'envi et la magie opère.La danse envahit l'immense plateau de la salle de Chaillot , gravite, habite l'espace et le crée, en silence aussi dans le bruissement des pas et tracés des danseurs.
On es fasciné par la lenteur ou l'abandon à une gestuelle sobre, enroulée qui se couvre et se découvre en torsades répétées, signature de Saburo, signes et traces dans le vent.
Quel souffle ce soir là parmi danseurs, musiciens et public, emporté par ces ondes et mouvances tactiles, légères, ponctuées de sobriété, de recueillement, cérémonie de la beauté, musique de l'univers, rituel de bonheur.
Félicité d'une pièce rare, apaisante, envoûtante pour celui qui voudra bien se laisser prendre, ravir et capturer, porté par le charme de l'étrangeté.
"Flexible Sience" à Chaillot, TND à Paris jusqu'au 3 Mars

"Tree of codes": mot à mot dans le livre cinétique de l'espace dansé..


Quand Wayne McGregor rencontre l'oeuvre atypique de l'écrivain Jonathan Safran Foer, un livre architecturé transformé en autant de strates et tel un palimpseste archaïque, il se joint à Jamie xx et Olafur Eliasson pour recréer pour le Ballet de l'Opéra de Paris( après une première version pour le Manchester International Festival) un étrange manifeste chorégraphique: "Tree of codes".

Mot à mot, pas à pas

Cheminant dans l'oeuvre littéraire de Bruno Schulz, Jonathan Safran Foer fait de "The steet of crocodiles" un objet d'art, tactile, en volume, à manipuler comme un objet rare et mobile.
Wayne Mac Grégor, le champion des chemins de traverse, opère alors en sa position de chorégraphe comme un alchimiste au scalpel fin pour transformer les mots, les signes et les écrits en autant d'électrons libres sur une proposition musicale audacieuse et un environnement plastique à la hauteur de ses fantasmes.

Sa compagnie de danse se joint en partie à quelques excellents danseurs de l'Opéra de Paris pour remettre à jour cet étrange ballet initiatique, emplit de mystère à décrypter, d'énigmes à déchiffrer.
 Préambule en musique électronique très flamenco, et nous voilà embarqués pour un voyage au long cour, exaltant, haletant, plus d'une heure durant; un florilège d'arts mixés, de traverses et de carrefours où l'on croise et rencontre sons et ambiances toniques de Jamie xx, lumières, corps en mouvement et sculptures architecturées d'Olafur Eliasson
C'est peu dire que se éclanche un feu d'artifice qui ira en crescendo, d'une danse fluide et sensuelle, corps quasi nus mais masqués de tissu moulant de couleur chair transparente et très suggestive à une expression plus libre et décalée, sauvage et intuitive.
Comme autant de séquences cinématographiques, la proposition de ce trio d'artistes hors pair va dans le sens de la découverte et de l'intuition: comment illustrer ce "codex", ce livre d'enluminures en volumes, cet objet de lecture tactile, en représentation plastique, éphémère et vivante?
Rencontre fertile et donnant naissance à un déferlement de propositions visuelles et sonores, galvanisantes, toniques et déroutantes. Les corps faisant corps avec à la fois le résultat d'un travail d'improvisation et la structure très élaborée de la pensée des maîtres d'oeuvre..Le décor se fait forme vivante et mobile, jets et traces de lumières au dessus des danseurs, les miroirs, des facettes multidirectionnelles réfléchissant l'espace à l'infini.

Comme un rêve de simultanéité, stimulante, ravigotante pour l'éveil de la pupille et de l'iris du spectateur, subjugué par les prismes, kaléidoscopes et autre lanternes magiques de prestidigitateur!
Un monde virtuel, lumineux fluorescent, des lucioles en préambule pour faire naître des êtres hybrides inconnus et énigmatiques...Des arches, des courbes à la Buren, des lumières et miroirs à la Decouflé, via Nikolais et Loie Fuller, de belles citations et références à l'art cinétique aussi, un voyage dans le temps et la stratification de la sculpture contemporaine La scène, le plateau se révélant au confluent de ses mouvances fertiles qui s'engendrent les une, les autres!
Jeu de miroir pour démultiplier à l'infini, des corps, en duo ou alignés, suspensions en cercle amovibles, colorés se jouant des volumes et résonnants de reflets et miroitement.
La scénographie envahit l'espace, détermine les déplacements des danseurs, tous différents ou à l'unisson de leur désir d'architecturer sempiternellement ce feu d'artifice, ce ballet de faisceaux lumineux, de rémanence, de ricochets et autres échos.
Tricotage subtil des disciplines, noué par des interprètes performants, dont la belle performance de Marie Agnès Gillot que l'on retrouve avec étonnement sur la scène.Tous galvanisés par ce mélange subtil et suprême de sons, de couleurs dans des costumes sobres et colorés, ludique, parfois sur pointes, plutôt les pieds nus bien dans le sol


Portés acrobatiques, duos éclectiques, fluidité ou accents tétaniques d'une danse effleurant un mouvement de technologies nouvelles, voici le terreau de cette pièce très de "notre temps" qui n’échappe pas à la beauté, l'esthétisme et le foisonnement de moyens conséquents pour créer un univers joyeux, volubiles, futile et électrique. La musique transportant les corps dansant dans des moments d'extase contagieux: le spectateur lui aussi est transporté, subjugué, en apnée, comme ravi et conquis par tant d'audaces, de sauts dans le vide, de règles enfreintes à contre courant de l'académisme et du bien seyant!

"Tree of codes" à l'Opéra de Paris jusqu'au 23 Février.

dimanche 19 février 2017

Blanche neige !



Le danseur de flamenco de Miro !


Qui l'a peint ?


Faire le mur !




mardi 14 février 2017

"Muse": quand Hélène Schwaller s'amuse et se joue de son destin.... Lettres(être) prioritaires

Hakim Mouhous
"Ne pas plier"
Voilà, elle est là, comédienne, conteuse, diseuse, pour une lecture spectacle dans laquelle elle met en scène la correspondance de James Joyce à Nora et l'articule avec les textos poétiques de Hakim
Cela s'appelle Muses. C'est l'amie Helene Schwaller, formidable comédienne que l'on vit chez Stéphane Braunschweig, Jacques Lassalle , Christophe Rauck, Bernard Sobel, Claude Duparfait, et bien d'autres. Entre soi et le monde. Rare et forcément singulier.
Corps- respond-danse, correspondance: qu'est ce qui rapproche une lettre, d'un texto, qu'est-ce qui  les différencie, les oppose où les rapproche? L'amour, l'envie d'écrire, de partager la séparation mais aussi les instants fusionnels, charnels.... Hélène Schwaller se raconte à travers le choix des lettres de Joyce à Nora, un amour brûlant, foudroyant...Lecture à voix haute, à voix basse, deux pupitres devant elle en pantalon, sobre, posée...Épistolaire récit d'une liaison qui compte et raconte les déboires d'un célèbre auteur iconoclaste: chaste prose délivrant des préoccupations quotidiennes, puis brûlantes et charnelles déclarations d'amour fusionnel
La liseuse, l'yeuse.....
 L'actrice vit et joue de sa beauté singulière, charpentée, solide autant que fragile dans les mains de son bourreau d'amour consentant....Lectrice à fleur de peau, de sexe, de douceur ou de prose torride plus que suggestive sur l'amour "physique": cru et nu, de plus en plus proche des orifices du corps, de la sensualité, de la bête.
..Des images projetées des dessins que l'amour d'Hélène (autobiographique) adressait chaque jour, reçus dans sa boite aux lettres: autant de témoignages d'un profond sentiment de vénération, d'adoration, de la femme, de leurs ébats amoureux...Dessins qui ponctuent la lecture de Joyce, et s'affichent successivement. Et puis, il y a les textos, envoyés par Hakim -on se familiarise très vite avec cet homme aimant- ces haikus, brefs, calligraphiés sur l'écran comme des vers égrenés aux heures incongrues de la journée: il est en tournée, loin et proche à la fois, et chante sa belle comme un ménestrel, un baladin du smartphone...Ces textos qu'elle découvrira en les caressant sur son smartphone, doucement, comme on ouvre une lettre: avec fébrilité, impatience, inquiétude puis soulagement!

Outils d'aujourd'hui, technologies nouvelles qui se subsistent à la plume, la prose épistolaire que l'on ouvre avec fébrilité? Et si tout n'avait pas changé, rien changé: l'amour fou de ses deux êtres est bien là dans les mots, sur les lèvres de la comédienne que l'on suppose vite être cette femme admirée, adulée par Hakim.
Vérité, d'après "une histoire vraie" et c'est cela qui touche: on est en empathie quand elle se défonce sur son punching-ball, quand elle se prend pour Joyce, en fond de scène, la voix grave et chancelante d'un vieil amoureux transit....Touchante autobiographie, distancée par le biopic des lettres de Joyce, cette mise en bouche, en scène signée Hélène Schwaller est la trace revisitée d'une carte blanche donnée à l'actrice par le TNS en 2014: soutenant en compagnonnage le travail remarquable d'une artiste singulière: la "belle" Hélène, en forme de "poire" à la Eric Satie, est une mélodie, une complainte à elle seule, chant du compagnon errant dans les antres de l'amour, les cavernes d'Orphée et Eurydice: non, elle n'est pas Pénélope qui attendrait Ulysse, mais bien la Médée, tendre ou dévorante d'une Odysée personnelle, destin truffé d’embûches surmontées avec courage et pugnacité.
Des images, les dessins de Hakim sont à cette occasion exposés dans la galerie d'art où se déroule cet événement intimiste, cette lecture, "Muse" où le soir de la Saint Valentin , on découvre qu'un amant peut être le Pygmalion d'une femme, son ressort, son inspiration de vie... C'est beau comme l'absence, la disparition de celui qui fut et n'est plus. Les dessins, ces lettres envoyées sont les témoins d'une tranche de vie qui maintient debout, une femme d'aujourd'hui, artiste et amante, religieuse et dévoreuse, comme ces textes et images: ob-scène à travers les rideaux comme "L' Origine du monde" de Courbet;
Ce soir là les valentin-valentine que nous sommes sont gorgés d'érotisme et d'esquisses plus qu' évocatrices de l'Acte d'Amour, fou ! Et haut en couleurs !

C'est encore le 15 février 20 H. C'est à la galerie Philippe Decorde, rue de Molsheim, à quelques encablures du Musée d'Art Moderne à Strasbourg. .

dimanche 12 février 2017

Art danse ! Combas, Picasso et Valadon

le danseur canon

danseuse et picador


Sil vous play ! mobil home !




Souriez !




samedi 11 février 2017

A mon père: "mon vieux " !

"A mon père, une dernière danse et un premier baiser": à "mon vieux"!



Radhouane El Meddeb signe un solo touchant, seul sur scène, de dos toujours, torse nu, pantalon noir Sur un carré blanc au sol, entouré de noir comme un faire part de décès. Immobile puis hochant frénétiquement la t^te par saccade, il frémit, bouge, se meut, renaît? Des bribes de piano égrenées, du JS Bach brisent un lourd silence opaque. Danser de dos, comme Trisha Brown, ne jamais dévoiler sa face, son visage, son identité ou son chagrin, pudiquement: na pas montrer que l'on pleure la mort d'un père!A part le temps d'un petit tour furtif, d'un face à face éphémère avec le public.On découvre cependant, enfin, son corps, luisant de sueur, corps non canonique, banal: celui d'un homme qui danse la tristesse, l'absence, la disparition de son père, compagnon de vie. La scénographie de Annie Tollerer, propose pour évoquer cette culture arabe, la carcasse d'un mouton décapité, tout de plâtre, purifié, poussière des siècles et du temps, objet de rituel et de cérémonie liée à l'image du père conduisant son fils voir les sacrifices halal des moutons pour l'Aid. Au sol, gisant silencieux, éteint, mort.

En apnée, en suspension, on le quitte tout en retenue comme du Bach: les pieds en cinquième position classique, cambré, il rend hommage à la vie, la disparition inéluctable de ceux que l'on a aimés, chéris
Émouvants adieux funèbres, tremblants et plein de secrètes confidences de corps!

Stephen Jones et Barbie, dansent !


En classe !!!


Légo Batman danse !




En noir et blanc, le cygne !


Les corps chapeautés de Stephen Jones !




mercredi 8 février 2017

"L'esprit Boris Vian": es -tu là? Christophe Feltz a du Vian dans les voiles!

Pour mémoire:
"En 2001, Théâtre Lumière fête ses 10 ans et, qui plus est, en très bonne compagnie. Nous débuterons ce millénaire avec Boris Vian, dit Vernon Sullivan ou Bison Ravi. En effet, nous avons voulu passer ce cap dans un esprit festif, ludique, pétillant, musical, enjoué, sincère et profond, en nous immergeant au coeur de l’oeuvre de Monsieur Boris Vian, artiste, poète, musicien et auteur génial et inclassable.
Plus qu’un simple écrivain, il est l’incarnation de la liberté, de la fantaisie et de l’intelligence, une sorte de rebelle de l’âme. Par sa sensibilité, son originalité, et son exploration au plus profond des êtres, il s’inscrit au plus juste du projet artistique de la Compagnie, engagé il y a maintenant 10 ans.
L’Amour Amore met en scène les personnages-clefs de son roman culte « L’Ecume des jours ».
Les deux thématiques majeures développées dans le montage des textes qui est proposé sont l’Amour (Vian dans son rapport aux femmes) et la Mort (Vian se savait condamné, d’où son urgence à vivre et à aimer). Ce spectacle nous fait voyager à l’intérieur d’une mosaïque de sentiments où les différents personnages, à travers les textes et les chansons de Vian, ne cesseront de partager, de vibrer et de s’aimer. Bref, de vivre intensément, de survivre en quelque sorte à leur propre existence, en nous parlant du plus secret et du plus intime : l’Amour, la Mort."

Plus qu'un artiste, Boris Vian est un véritable symbole de liberté, de fantaisie et d'intelligence, une sorte de rebelle face à un démon nazi qui commençait sa conquête de l'Europe. D'une gentillesse extrême, et tout en combattant l'ordre établi (l'armée, la religion, la politique), il ne parlait que d'Amour. Souvent avec dérision et surréalisme, il a essayé de vivre ses 39 printemps avec finesse, sensibilité et imaginaire.

Au cours de ce spectacle, Christophe Feltz accompagné de Grégory Ott et de son piano, mettent en avant le rapport au Monde, aux Êtres et à la Vie de ce poète et écrivain du XXème siècle.

Ensemble, ils parcourent les textes cultes de Boris Vian tels que Le déserteurLa java des bombes atomiques, J’suis snobJe voudrais pas crever, La complainte du progrèsJe boisOn n’est pas là pour se faire engueulerChronique du menteur.




Alors ça swingue, zazou, da dou da dou da, ce soir au Café Brant en compagnie de deux "dandys", bon chic bon genre, pas sages du tout ! On y écume les jours et les nuits coquines, musicales et poétiques en hommage à Boris Vian !
Plus de cent spectateurs ce soir dans une chaleureuse ambiance brasserie!
Tout démarre après le service: ce montage de poésie, textes de chansons de Boris Vian, une heure durant va nous tenir en haleine, en suspension, en apnée tant le charme opère d'emblée.
Aux côtés de Christophe Feltz, Grégory Ott, fidèle compagnon de route, pianiste, compositeur.Fin du ballet des serveurs, début de la valse des mots, des rimes, des vers....Serions-nous au café de Flore?
"Je voudrais pas crever" entame ce voyage au long court dans l'oeuvre et les univers de Vian. Toute une panoplie de genres, de textes plus truculents ou croustillants les uns que les autres. Et ce qu'il y a de curieux et de remarquable, c'est que, raconté, lu, dit sans la musique qui s'y réfère, tout étonne, surprend: ce n'est plus "La complainte des temps modernes" ou "Le déserteur" que l'on reconnait, c'est la tension des textes, le sens, la magie surréaliste des contenus. Épatant, médusant leurre! Mais où sont les chansons de Vian? Dans le texte, dans la voix, sur les lèvres du récitant, du conteur que devient alors le comédien qui raconte, qui vibre, s'enflamme "dans la rue", qui "veut une vie" qui "n'aime pas les femmes"!
Déclamations, ponctuées ou surlignées par les interventions musicales très pertinentes de Grégory Ott qui se fond dans ce jeu malin, coquin, parmi cette écriture élégante, très "snob", sous le signe de l'inventaire, du récit. C'est "la java des bombes atomiques" qui surprend le plus tant le rythme l'emportait sur le texte dans la version chantée, alors qu'ici dans notre cas de figure, c'est le personnage qui l'emporte! Du burlesque, du bizarre, de l'incongru, de l'absurde dans ce beau paysage pas sage de Vian, brossé à coup de gueule, de touches pianistiques par nos deux compères si proches, si en osmose."Tango des bouchers de la Villette", "Cinématographe", "Jonny fais moi mal", "Je bois": on prend le temps de vivre, de "défiler", d'être "Igor", le slave et l'on s'en régale: quelle galerie de portraits revisités par Christophe Feltz qui manie ici fantaisie, gravité, sérieux en savant cocktail à consommer sans modération.
La présence au sein de la Brasserie de ces deux artistes, routiers aguéris de la scène et de l'animation fut un régal, un moment de partage de redécouverte de l'oeuvre très poétique, très mordante et sans concession d'un auteur de charme qui sans cesse surprend et séduit, enchante et déconcerte aussi. Ça danse chez Vian, de valse en tango et le comédien de rythmer son spectacle de façon cavalière et enjouée, vive et engagée: pour le bonheur de ceux qui en empathie sont venus ce soir là, du Vian dans les voiles!

Prochaine "cible" de Christophe Feltz: Jean Yanne: ça va saigner !!
le 29 MARS 20H au café Brant !

"Le pari" : François Verret joue et gagne ! Et se fait le mur, la belle !

A propos de:

"Centrée sur la fragilité de l’homme contemporain, la démarche de François Verret, poursuit son cours. Le Pari, seconde création réalisée dans le cadre du Chantier 2014-2018, convoque une polyphonie de voix au plateau. Poétique des gestes, mots, rythmes et lumières libèrent maux et rêves de la condition humaine dans une aventureuse chevauchée. 
Après Rhapsodie démente, spectacle créé en 2015, François Verret réinvestit la scène avec le creuset d’artistes –  acteurs-danseurs, musiciens et autres collaborateurs familiers de sa démarche. Et le metteur en scène de décrire les intentions de ce Pari : « Murs, frontières, contrôle, surveillance sont là partout, en nombre incalculable. Il est difficile et dangereux d’aller et venir, d’un endroit à un autre, de quitter la zone réservée où règne une norme sèche, froide, calculatrice… Cependant, certains croient au réveil de « l’homme déprogrammé », à l’exception contre la règle, et font le pari du possible contre le probable, convaincus de trouver une issue. 
C’est sur la toile de fond de ces convictions, que nous faisons notre pari, le pari d’inventer quelques voies de passage pour, ensemble,  « sortir de la nuit » où nous nous trouvons et voir ainsi se dessiner un ciel, un horizon où nous pourrions renouer avec certains rêves de jeunesse, que nous n’avons nullement sacrifiés et qui se rappellent obstinément à nous, avec calme, attendant simplement l’occasion de « prendre corps »."


Plateau singulièrement "préparé" comme une partition, un Piano où tout va se jouer, en ordre, compté, structuré, établi.Des personnages émergent de cet attirail de machines, structures angulaires encombrantes. Une table, longue, revêtue d'une nappe blanche: elle aussi, singulier personnage très présent: animée par une femme qui écrit, compte des maux et mots qui, en flou, se répandent sur un écran suspendu au dessus d'elle: chiffres, mots épars, calligrammes étranges, étrangers: tout l'univers de François Verret semble s'être ramassé, condensé dans cette nouvelle pièce à la ligne éditoriale, note d'intention ambitieuse.On y prend la parole pour se raconter, pour questionner jamais de façon didactique, mais toujours franche et frontale. Une vielle femme, une chaise pour évoquer ce temps qui passe, lentement, dans l'univers domestique. Une autre à contrario, femme d'affaire qui s'interroge sur le pouvoir, la manipulation à l'intérieur de l'entreprise: tailleur seyant, façon "bobo" histoire de feindre la préoccupation dont on se moque aisément: chacun pour soi dans ce monde fragmenté, dissocié, meurtri par l'indifférence généralisée; et puis, le son, le bruit, rouages en direct ou vrombissements et chaos pré enregistrés, atmosphère grave sur le monde du travail: labeur, martyr...Le dispositif que François Verret en personne semble dompter, dresser pour s'en faire un atout, un complice. Machines de guerre, grues portuaire, paysage de chantier articulé et démembré?Pour mieux capturer le sort, apprivoiser le monde? Les autres autour, dansent: les femmes se donnent, l'une dans un solo fulgurant, tranchant face et avec la table, l'autre sur une estrade: vêtue comme une paysanne mais à la robe dorée, elle se tourmente violemment et fascine dans une gestuelle énigmatique Elle reprendra plus tard une danse virtuose, seule, égarée, émiettée, désemparée, tente d'affronter le mur, la frontière qui se dresse devant elle: en vain...Sur les écrans, des visages souffrent, s'animent en gros plans, les "frontières" intérieures s'affirment, se confirment, on ressasse, on rabâche: "avance" dirait Jérôme Andrews! Dans cet univers noir et blanc, sombre, des étincelles d'orpailleur chez les femmes en couverture de survie bruissante...Et toujours ce monde du travail qui hante, martèle, scande la vie de ces étranges pions en marche! Jeu d'échec où chacun avance, rusé ou victime..."Main- tenant" à nous de donner la dimension à rebonds de cette pièce qui "réfléchit" sans fléchir aux maux de notre monde égoïste. Deux personnages grotesques vont clore ce panorama, ce point de vue, danse désarticulée, menacée, elle aussi d'être caricature ou fresque débridée, sans queue ni tête.
Monstres que l'on regarde, puis désigne comme bon à jeter, mépriser, ignorer. Pessimiste cette oeuvre sage et grave? Sans doute, avec cette maturité, digne du temps de gestation que lui donne la longue "résidence" de François Verret à Pôle Sud (quatre années de compagnonnage); c'est rare et singulier, digne d'être saluer: respect de la profession, des artistes, de leurs pensées et avancées personnelles.
C'est sans doute là le vrai "pari" collégial et collectif de cette expérience, livrée aux regards pour le "juste bien" de ceux qui auront bien voulu faire le pas: un pas de travers, sur les sentiers ardus de la non convention.
On en sort grandi: décidément, la "danse" est un terrain de jeu, de combat: cartes sur table, ça Verret le fait avec majesté et humilité ! En silence, en fracas dans le bruit d'une bande son, rarement aussi fouillée, présente, actrice du jeu: comme au cinéma ! Un "chantier" ouvert où tous participent au processus de création: corps de métier de l'image, du son et de l'interprétation extra-ordinaire entre autre des deux actrices-danseuses Charline Grand et Natacha Kouznetsova !
Un spectacle "courageux" et honnête, sans concession, à l'heure des "Bla bla ou plat plat Land" et autres pays de cocagne infantilisants où la danse libère et protège soi disant de la grisaille de la vie ou de la politique!
Un acte pensé, dansé, en mouvement !

Coproduction POLE-SUD Présenté avec Les Migrateurs
les 7 et 8 février à Pôle Sud

mardi 7 février 2017

"Sahara": pas "bêtes" les danseurs ! Danse serpentine !




Un film d'animation de Pierre Coré, pas "bête" avec des personnages hors du commun et peu "sympathiques" d'emblée: serpents, et autres animal venimeux... Et ça danse la danse du ventre et du serpent, dont une certaine Marie Claude, doublée par la voix de Pietragalla !Hilarant !
Lassés d’être les souffre-douleur de leur communauté, Ajar le serpent et son pote Pitt le scorpion décident de tenter leur chance dans l'oasis voisine où vit la haute bourgeoisie du désert saharien et d'y retrouver Eva, une belle serpente dont Ajar est tombé fou amoureux. 

C’est le début de folles aventures qui les amèneront à traverser le désert à la poursuite de l’amour et plus encore à la découverte d’eux-mêmes…

lundi 6 février 2017

Gael Sesboué au MAMCS : un leurre au musée ! intrus ou bienvenu ?

"Faux mouvements"
Par un bel après midi d'ouverture libre de droit d'entrée au public strasbourgeois, dans une des salles d'exposition, commence quelque chose de bizarre, d'intriguant: un jeune homme au comportement singulier, en apparence anodin, va bousculer les lois du réel, en direct, de front, parmi le public dispersé des visiteurs, occupés dans la contemplation des œuvres exposées.
Une certaine rigueur, rigidité chez ce visiteur, en tee shirt banalisé, baskets, aux pieds, Rien d'anormal à priori, sauf sa détermination: marches et changements de direction inopportuns, inopinés...Dans une salle d'exposition, tracer direct ou s'arrêter subitement, n'est pas convenu, plutôt surprenant. Alors on devine un leurre, une supercherie dans cette présence singulière;il marche, se faufile, distrait un public non averti, ou fascine ceux qui complices participent à la mise en scène!
Gael Sesboué est bien "invité" ici à faire une performance, in situ, résultat ou aboutissement d'une résidence au milieu de l'oeuvre de Hans Arp! On en devine aisément la source de ces gestes entrelacés auprès d'un autre corps qui entre dans le jeu:; espaces, interstices, comme dans les sculptures de Arp, façonne en ronde bosse, ce duo masculin, forme évolutive et instable.
Silences, immobilité, ici le recueillement est de mise. On les regarde comme une sculpture qui se fait et se défait.A l'envi. Auparavant sa solitude, égrenée dans les salles, le fait chuter au sol: ici il se redresse et ne surprend plus. "Fernand" comme chez Odile Duboc où tout bascule chez le quidam, le faux monsieur tout le monde qui soudain s'agite ou fait "un faux mouvement"? A sa façon, Gael Sesboué se positionne dans l'art de la performance, surprise, dans l'attention, et la tension du moment.
Et tout se "termine" dans un épilogue sans fin: interruption de la magie des mouvements, aller et venues du danseur, statuaire du duo.
photo robert becker 





Belle initiative qui renoue avec ses premières tentatives de performances de Trisha Brown, des Dupuy, amenant la danse au musée de façon naturelle et complice: art plastique, art du temps au delà de la simple représentation: sans titre, pas de prêteur ni d'origine aux gestes sans cimaises de deux corps vivants, dans l'éphémère sans la pérennité d'une oeuvre exposée, sans début ni fin.