Danse dans les e-toiles...
Quand internet, poste sur les mobiles, une danse de smartphone et passe au plateau !
"(LA)HORDE réunit un trio de jeunes artistes rebelles travaillant au croisement de la danse et des arts visuels. Leur projet singulier, To Da Bone, s’intéresse aux danses dites « post-internet » à travers la pratique du Jumpstyle, danse issue de la subculture des musiques techno.
Depuis trente ans, le monde de la techno est associé à un foisonnement de pratiques culturelles et festives. Le collectif (LA)HORDE y puise l’originalité de sa démarche. Et si le trio ne renie pas ses convictions, l’adresse frontale n’est pas leur style. Dans To Da Bone, ils explorent le monde fascinant des vidéos de hardstyle postées sur Internet, en particulier le Jumpstyle: « En convoquant des interprètes issus de plusieurs pays, en soulignant l’émancipation qu’apporte Internet, en choisissant cette danse avec son histoire, tout le spectacle est forcément politique.» Marine Brutti, Jonathan Debrouwer et Arthur Harel refusent toute forme de hiérarchie, au sein de leur groupe comme sur scène. Mais depuis leurs débuts en 2011, convaincus que le corps est aujourd’hui impliqué différemment entre espaces réels et virtuels, ils interrogent la représentation, les corps et l’image." I.F.
T'Aka danser....
Ils entrent sur scène un par un, se positionnent, immobiles, en baskets et blousons customisés, comme des graffs ou bombages...Le groupe nous regarde, fait face, quelque peu menaçant. Puis le mouvement démarre, celui que l'on attend de découvrir, ce nouveau "hip-hop", cette nouvelle façon d'exister par la danse, apprise, découverte en ligne sur le net, puis reproduite à l'envi, seul dans sa chambre: danse de solitude, de passeurs d'identité, de technique pour déjà inscrire à l'échelle du patrimoine ou de l'archive, une "nouvelle née", la danse "jumpstyle"!
Les poings serrés, ce portrait de famille de départ, soude la "meute" et "la horde" peut déferler en mouvements inédits: spirales, tricotages volubiles des jambes, maille à l'endroit, maille à l'envers.Machine de guerre en marche, ils vocifèrent, poussent des cris de ralliements: à l'armée, comme à l'armée! Puis on rompt et se disperse, s'éparpille en autant de petites constellations qui tourbillonnent. Solos virtuoses, danse très sportive, technique où la dépense, la perte et le don sont de mise. Indispensable lien entre eux pour tenir en empathie, se soutenir les uns les autres: population singulière, teintée de codes et d'une écriture formelle. Battles, solos et démonstration d'un savoir danser inouï.
Comme un match de foot, une assemblée en marche. Ils sont menaçants, parlent dans leur langue maternelle en bord de plateau dans cet univers hostile. Comme un rituel, en ronde, ils esquissent des traces de danse "trad", enlacés, solidaires, portés par le rythme endiablé. Archéologie du mouvement, du futur de gestes inventés, fouillés dans les strates des muscles profonds.Acharnée, sur la défensive, cette danse de guerriers interroge, intrigue, comme un rituel chamanique où la dépense hypnotise et maintient en transe. Terpsichore en baskets, puis en direct, filmée et reproduite sur écran géant par une caméra témoin: reportage sur l'histoire du jumpstyle: on aura tout compris une e-toile est née dans les lumières jaunes bordées de fumigène, des silhouettes s'adonnent au bonheur et plaisir de constituer un collectif dansant, fort et étrange machinerie, prête à broyer du geste, à digérer la rage et exprimer toute une gamme de dynamiques obsessionnelles. Jusqu'à l'os !
De la "danse savante"au cœur du plateau, hors toile d'internaute qui prend corps et graphie.
A Pôle Sud les 20 et 21 Février