mardi 31 mars 2020

"Le saut de l'ange": Dominique Bagouet plane !

Rien n'est plus drôle, tendre et léger que la façon dont Dominique Bagoüet se moque de la danse et des danseurs dans ce Saut de l'ange _ dont c'est ici la première reprise à Paris, après sa création au Festival de Montpellier 1987 et quelques tournées.
Regardez, nous dit-il, la danse, ça peut être à la fois très joli et assez laid, les danseurs sont des gens sublimes et un petit peu ridicules... Il faut un talent fou pour manier cette autodérision sans tomber une seconde dans la parodie, pour faire chérir la danse en la montrant si nue, si dépouillée, si simple.
Les petits personnages disparates que Bagoüet lance dans l'espace font penser aux petits sujets en fil de fer du Cirque de Calder. Même fragilité têtue, même art du presque rien, même grâce insolite. Ils sont ravissamment vêtus (par Dominique Fabrègue) comme si chacun avait exprimé son fantasme dans son costume : une danseuse à la Degas, en tutu jaune (et aux pieds, ce n'est pas par hasard, des " ballerines "), un athlète de foire, une danseuse de flamenco, une Musidora en collant, cagoule et cape noire... Ils ne sont ni beaux ni laids, ils sont, tout simplement comme vous et moi. A la fois très proches et distants.
Ils ne " racontent " rien, pas d'anecdote, pas d'histoire. On a tout juste le temps de noter des sensations. On est délicieusement désemparé, chez Bagoüet : il casse toutes nos habitudes, non seulement celles héritées du classique, cela va de soi, on est ici aux antipodes, mais aussi celles du contemorain, qui a également ses académismes. Il gomme, efface, pulvérise toute notion de virtuosité. Ses danseurs ne vont jamais où on les attend, ne font jamais ce qu'on prévoit : leurs petits gestes incongrus, saugrenus, farfelus, appartiennent bien à la planète Bagoüet, à nulle autre pareille. Beaucoup de mouvements des bras, des mains, des doigts : nouveaux sémaphores, alphabet de sourds-muets.
Même fausse naiveté dans le décor de Christian Boltanski. Sur la partie droite du plateau, un podium habillé de velours rouge, celui que le maire d'une petite ville ferait édifier pour une " soirée de danse " ; au fond, guirlandes d'ampoules dessinant les contours de l'architecture de la cour Jacques-Coeur, à Montpellier (reproduite ici en structures métalliques), détournant l'idée de " festival ".

"Je ne suis pas quelqu'un de tranquille. Je suis sans cesse perturbé par les autres, par ce que font les autres. Je dois sans cesse maintenir mon identité à flot, et ce n'est jamais gagné. " Ces propos de Dominique Bagouet datent de 1989 : impossible de ne pas être ému par l'inquiétude d'un artiste qui, chaque année, depuis 1984, signait des pièces essentielles pour la danse, ouvertes, en effet, aux autres créateurs, aux autres disciplines artistiques.
Des oeuvres, toutes profondément enlacées, toutes profondément différentes : Déserts d'amour (1984) et le Crawl de Lucien (1985) sur les musiques de Gilles Grand, le fidèle ; Assaï (1986), écrit sur une partition homonyme de Pascal Dusapin ; avec ce dernier encore, l'année suivante, l'aventure magnifique menée avec Christian Boltanski : le Saut de l'ange, la pièce maîtresse d'un ensemble très solide ; ou encore les Petites Pièces de Berlin, et l'étonnant Meublé sommairement (1989), dans lequel la comédienne Nelly Borgeaud _ sublime _ se mêlait à la danse pour interpréter Aftalion Alexandre, d'Emmanuel Bove.
Cette inquiétude de Dominique Bagouet, on peut la faire remonter aux jeunes années : " Pendant toute ma petite enfance, j'ai dansé. Aux réunions de famille, à la moindre occasion, on me faisait danser. J'étais extrêmement fier, très fanfaron, [...] rien ne m'intimidait, on m'applaudissait. (1) " Bagouet dansait pour être aimé. La petite histoire attribue ce goût immodéré pour la danse à un spectacle de flamenco, vu à Barcelone, quand l'enfant avait cinq ans...
Depuis Rastignac, on sait que, pour réussir, il faut quitter Angoulême _ où Bagouet était né le 9 juillet 1951. Après différentes expériences, c'est à Cannes, chez Rosella Hightower, que l'adolescent va épanouir son talent. Danse classique et apprentissage musical. Il attrape le virus du baroque. Quand arrive mai 68, il devient difficile pour Bagouet de supporter les codes étouffants de la danse classique.
Commencent alors des années d'apprentissage et de voyages dans la pure tradition du roman picaresque : il est engagé dans la Compagnie contemporaine de Félix Blaska, découvre l'effervescence artistique de la création à Paris, puis décide de partir chez Béjart à Bruxelles. Malgré l'amitié qui le lie au maître de la Monnaie, il est frustré de véritables recherches. Retour à Paris : Carolyn Carlson lui révèle la technique d'Alwin Nikolaïs, Peter Goss les secrets de celle de Jose Limon. Départ pour New-York. La rupture avec le classique est alors consommée. En se coupant ainsi, non sans masochisme, de ses origines, Dominique Bagouet lançait un processus de création qu'il allait mettre près de dix ans à maîtriser. 1976 : il gagne le Concours de Bagnolet avec Chanson de nuit. Un succès qui lui vaut une invitation au Festival d'Avignon. Sa danse se cherche du côté du théâtre, hésite, change de style, sans jamais pourtant manquer de sincérité. Les amours de Bagouet vont à Bob Wilson, à Claude Régy. Cet écorché vif masque ses peurs sous l'humour et la séduction. Ribbatz, Ribbatz, sur des musiques auvergnates, enchaîne avec Suite pour violes, sur des airs de Couperin. Il sait pourtant qu'il ne s'en tirera pas ainsi. Il dit de cette époque : " Pour moi, c'est comme si, dès le départ, les dés étaient pipés. Je n'ai pas su prendre mon temps. " Deux pièces vont cependant stabiliser sa réputation : Voyage organisé (1977) et Grand Corridor (1980).



samedi 28 mars 2020

Le "virus" gaga de Naharin ! prémonitoire !!!!

Naharin's Virus

Ohad Naharin (Chorégraphie)




Quelques jours avant la reprise de Decadance, l’un de ses succès historiques, la Batsheva Dance Company présente une série de représentations de Naharin’s Virus, fruit de la collaboration entre Ohad Naharin, directeur artistique et chorégraphe de la compagnie, et les danseurs. Une façon de lancer les interprètes dans le grand bain de la créativité. On y retrouve, bien sûr, l’énergie qui irradie la danse de cette compagnie, mais aussi la profondeur d’une gestuelle qui, sans être narrative, touche chacun au plus profond de soi. Cette pièce est aussi un dialogue entre le mouvement de la danse et l’écriture de Peter Handke, l’un des plus grands auteurs vivants. En effet, Naharin’s Virus s’inspire de sa pièce Outrage au public. De larges parties du texte constituent une trame idéale tandis que la musique épouse la chorégraphie. Peter Handke dit voir dans son oeuvre « une pièce sans histoire, sans intrigue, sans fil narratif, une pièce qui se raconte elle-même. Pas d’histoire pour nous accrocher comme à un hameçon, pas d’histoire conçue pour s’évader, mais seulement la réalité nue du moment dans l’espace. » Ohad Naharin fait sien cet espace, imaginant une gestuelle débordant d’invention et emmenant ses interprètes toujours plus loin dans l’émotion et la virtuosité.
Philippe Noisette

vendredi 27 mars 2020

Les Wilis de Christine Lauffenburger


STRASBOURG ART PHOTOGRAPHIE
Exposition photos par
Christine LAUFFENBURGER 

DANSE AUX BAINS MUNICIPAUX 

Photos argentique N&B au rolleiflex  
Magasin BULTHAUP
6, RUE DE LA NUÉE BLEUE
67000 STRASBOURG

Résultat de séances aux bains municipaux de Strasbourg où la photographe a jeté son dévolu
Photographie d'un lieu hanté par des spectres, ectoplasmes dansant, floutés, où la rémanence sème le trouble et l'indéfini.Sylphides ou Wilis aux tutus romantiques qui se fondent dans l'espace et le scintillement du gris-noir et blanc des planques photographiques
Comme des apparitions fugaces, des électrons futiles qui ne peuvent se figer, toujours en mouvement, en coup de vent!
Habitante de ces lieux désaffectés, vidé de ses créatures fantomatiques qui déambulaient entre les différents bassins.
L'ambiance est légère, étrange et volatile et un souffle parcourt l'exposition, fragiles esquisses de danse vaporeuse, évaporée, défaite de toute corporéité!
Dans ces bains sans eau, ses piscines, ses cabines où rodent vapeurs, brouillard opaque et nuages de bruine humide, la danseuse erre, se meut à l'envie.  
Brumeuses apparitions spectrales par excellence.
Un univers étrange et nostalgique, mélancolique et onirique à souhait

Dessins d'enfance !





Le Monte Vérita ! Chips qui dansent !





Cartes sur table !




Confi-danse !




Santé !





mardi 24 mars 2020

" Le rêve du collectionneur" n'est pas ce que l'on croit !


Collectionner c'est donner corps à un "trop", une soif de plus, toujours et encore récollecter des objets ou autres supports sur un thème qui vous est "chaire", eau et sang. Sans laquelle collection, il serait impossible de crouler sous le poids des peluches, poupées, stylos et autres trouvailles insolites qui ont trait à la Danse, cet art éphémère, mobile qui échappe au temps.
Alors "collectionner" c'est vaincre la fluidité, l'éther et la légèreté de Terpsichore qui vole au vent et se détache de l'immobilier?
C'est rattraper, figer, capturer des énergies pour les engranger dans des placards, buffets et autres vitrines dont ils finissent par déborder?
C'est découper tous les visuels qui vous font "penser" à la danse, au mouvement...
C'est entasser des livres de tout poil-BD, romans, biographie, recueils, manifestes...- qui traiteraient de cet art qui s'amuse de l'immobilisme pour prêcher le vivant, le nomade !
C'est faire un bastion , une muraille de trésors où les orpailleurs se régaleraient de pouvoir voir et accéder à cette manne divine!
Alors, si c'est tout ça, je vais enfiler ma chemise de nuit, barboteuse très sexy de dentelles et toile blanche, et fermer les yeux pour rêver qu'elle n'existe pas et que je suis "libre" du poids de cette mémoire, armoire à malice qui s’immisce dans ma vie quotidienne comme un boulet  auquel on est très attaché.
Rêver que d'autres la portent, la transportent aussi, la visitent, la dérangent et lui donnent une forme, une cohérence, du plein et du délié.
C'est se libérer, se délivrer, offrir à voir les abimes de ma mémoire , de mon être à part, à part entière.
Rêver que tout s'envole ailleurs, se livre derrière une vitrine, porte ouverte à tous les regards , jour et nuit
C'est rêver que tous ces "joujoux" s'animent, marchent, dansent, se suspendent, se mettent à se mouvoir et ébranler l'intérieur de mon corps
Palimpseste de mes années, tranches de vie et d'émerveillement face aux imaginaires que la danse à déployés.
De l'infime boucle d'oreille, pendentif, à la boite à musique, de la pub Banania en Joséphine Baker, au badge d'Annette Messager où figure un chausson noir...
Du Bal d'Astérix, au Shadock en tutu rose, de la Barbie qui pivote, à l'hippopotame de Fantasia..
Que font-ils la nuit dans le"Petit musée de la Danse"?
Mille et une arabesques, et autres divagations pour échapper au huis-clos de la détention en milieu de collection !
Dans l'édicule, cabinet de curiosités va se dessiner une esquisse de pas de danse à trois qui va bousculer l'ordre et la pesanteur des choses pour suspendre, répandre et afficher une "collection".
Petits curieux à vos marques, prêts, partez pour une balade au pays de Terpsichore !!

"fase"


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Fase

                   
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Fase Four Movements
to the Music of Steve Reich
Genre Danse contemporaine
Chorégraphe Anne Teresa De Keersmaeker
Musique Steve Reich
Interprètes Duos et solo
Durée approximative 50 minutes environ
Dates d'écriture 1981-1982
Création 18 mars 1982
Beursschouwburg de Bruxelles en Belgique
Vidéographie Thierry De Mey (2002)
Versions successives
Représentations notables
  • Plus de 160 représentations
Fase, Four Movements to the Music of Steve Reich est une chorégraphie de danse contemporaine de la chorégraphe belge Anne Teresa De Keersmaeker, créée en 1982 pour deux danseuses sur des compositions de musique de phase de Steve Reich. Fase est la deuxième composition d'Anne Teresa De Keersmaeker, dont l'écriture fut initiée en 1980 lors de son séjour aux États-Unis et terminée à son retour à Bruxelles l'année suivante. La création de la version intégrale a eu lieu le 18 mars 1982 au Beursschouwburg de Bruxelles. Cette œuvre est considérée comme une pièce séminale du travail de la chorégraphe[1],[2],[3],[4] et une chorégraphie majeure de la danse contemporaine mondiale[5],[6],[7].
Cette œuvre est composée de quatre mouvements distincts, constitués de trois pas de deux et un solo, qui reprennent directement les titres de quatre œuvres de Steve Reich — Piano Phase (1967), Violin Phase (1967), Come Out (1966) et Clapping Music (1972) —, pouvant tous être interprétés isolément ou de manière combinatoire. Dansé pendant des années avec sa complice Michèle Anne De Mey, Anne Teresa De Keersmaeker a obtenu en 1999 pour cette chorégraphie un Bessie Award à New York. Fase est régulièrement programmé depuis 30 ans dans le cadre de différents spectacles ou manifestations culturelles à travers le monde cumulant plus de 160 représentations. Cette pièce marque le renouveau du lien étroit entre la danse et la musique que développera Anne Teresa De Keersmaeker tout au long de sa carrière[1] et son succès immédiat fut également l’élément déclenchant pour la fondation de la compagnie Rosas en 1983 à Bruxelles par la chorégraphe belge.

  Historique

Après Asch, première œuvre d'Anne Teresa De Keersmaeker datant de 1980, l'ensemble Fase constitue la deuxième chorégraphie de la jeune artiste flamande. Il se compose de quatre mouvements écrits en réalité en deux temps et en deux lieux différents. Les mouvements Violin Phase et Come Out ont été créés aux États-Unis en 1981 dans le cadre des études d'Anne Teresa De Keersmaeker à la Tisch School of the Arts de l’Université de New York (NYU) de 1980 à fin 1981[8],[9], alors que Piano Phase et Clapping Music furent conçus après son retour à Bruxelles en janvier 1982[4],[10]. Les répétitions de l'ensemble ont été réalisées avec Michèle Anne De Mey[notes 1] – qui prit part à la création lors des répétitions avec De Keersmaeker – au studio du Trojaanse Paard de la compagnie de Jan Decorte à Schaerbeek. La première de Fase, four movements to the music of Steve Reich eut lieu le 18 mars 1982 au Théâtre de la Bourse de Bruxelles, et la pièce fut donnée dans différents centres culturels flamands cette année-là avec le soutien d'Hugo De Greef[11]. Le succès immédiat de Fase et la reconnaissance internationale d'Anne Teresa De Keersmaeker se concrétisent en 1983 lors du Dance Umbrella Festival de Londres puis lors de sa présentation au Centre Pompidou à Paris[4]. Durant la période allant de 1982 à 1985 Fase est donné plus de cent fois[12] et la carrière de la chorégraphe est dès lors lancée en Europe[4],[13].
Dansé durant de nombreuses années par le duo Anne Teresa De Keersmaeker et Michèle Anne De Mey, invitées à se produire dans le cadre de festivals internationaux, les représentations de Fase furent interrompues entre 1985 et 1992 ; la chorégraphe ayant décidé de ne plus interpréter la pièce[14],[15]. Poussée par l'envie de danser à nouveau[15], alors qu'elle s'était éloignée de la scène pour se consacrer exclusivement à l'écriture chorégraphique, De Keersmaeker la reprogramme ponctuellement à partir de 1992, accompagnée alors par une autre danseuse, Tale Dolven, pour les duos. Le succès de Fase contribua pour beaucoup à la création de la Compagnie Rosas, l'année suivante en 1983. L'importance de cette pièce et la reconnaissance croissante de la compagnie, feront que Fase sera jouée en 1985 avec les membres du Steve Reich and Musicians qui donnèrent une interprétation en direct de la musique, à l'occasion de la fin de la tournée internationale de la pièce initiée en 1982[3].
Steve Reich, qui avait donné son accord en 1982 pour l'utilisation de ses compositions[16], alors que De Keersmaeker travaillait à New York en 1981 avec trois des membres du Steve Reich Ensemble[4] (Edmund Niemann et Nurit Tilles aux pianos, Shem Guibbory au violon[13] qui joueront durant deux ans la musique sur scène avec la compagnie), n'a vu Fase réellement pour la première fois qu'en 1998 lors du retour de l'œuvre à The Kitchen à New York. Il écrira à ce propos :
« Ce n'est qu'en 1998 que j'eus l'occasion de découvrir Fase, le chef d'œuvre qu'elle avait élaboré à l'époque. Jamais je n'avais vu une telle révélation chorégraphique à partir de mon travail. Elle avait totalement compris l'essence de mes œuvres de jeunesse[17] », allant jusqu'à déclarer que le travail de Anne Teresa De Keersmaeker « était équivalent à la musique. Sur le plan émotionnel et psychologique, j'ai senti que j'avais appris quelque chose à propos de mon propre travail[notes 2],[13]. »
Reich imposera la présence de la pièce l'année suivante au festival du Lincoln Center pour une rétrospective consacrée à son œuvre[10]. À cette occasion, Anne Teresa De Keersmaeker recevra un deuxième Bessie Award « Pour récompenser la grande théorie d'ensemble du nombre et de la danse, le plein épanouissement de rigueur intellectuelle et de sens musical, le désir brûlant du corps et de l'esprit incarnés dans les vingt ans d'histoire de Rosas, et plus emblématiquement dans son atome de départ, Fase »[10]. Également en hommage, Fase, qui fut jouée à la Brooklyn Academy of Music en octobre 2006, a lancé l’ouverture de la célébration par la ville de New York du 70e anniversaire de Steve Reich lors du festival Steve Reich @ 70[14]. La partie Piano Fase, dansé alors par Cynthia Loemij et Tale Dolven, a été incorporée dans la création Steve Reich Evening qui fut donnée dans de nombreuses villes dans le monde entre 2006 et 2008. Du 12 au 16 janvier 2011, la section Violin Fase est de nouveau dansée par Anne Teresa De Keersmaeker au Museum of Modern Art de New York dans le cadre des « Performance Exhibition Series » sur le thème du tracé dans l'art du XXe siècle[notes 3],[9],[18],[19]. La même année en mars, l'ensemble est dansé intégralement par Anne Teresa De Keersmaeker et Cynthia Loemij dans le cadre d'un cycle répertoire organisé par le Kaaitheater et incluant quatre pièces fondatrices de la chorégraphe[20] puis donné à nouveau pour trois représentations en juillet en complément de la création de Cesena lors du festival d'Avignon, cette fois-ci avec Tale Dolven comme partenaire[21].

  Présentation générale

Fase est une œuvre en quatre mouvements[notes 4] :
  1. Piano Phase[22] ;
  2. Violin Phase[23] ;
  3. Come Out[24] ;
  4. Clapping Music[25].
Elle est constituée de trois duos sous la forme de pas de deux et d'un solo (Violin Phase), pouvant être joués séparément ou partiellement mais constituant un tout. Sa durée d'exécution totale est d'environ 50 minutes. Elle est intimement liée à la musique de phase de Steve Reich que De Keersmaeker a découverte à New York entre 1980 et 1982 lors de ses études à NYU et qui sera dès lors « le compagnon de route et le point d'ancrage » de la chorégraphe[5]. Comme la musique qui le supporte, le principe de base de Fase est une écriture chorégraphique épurée voire austère[26], extrêmement rigoureuse, mathématique et géométrique avec l'alternance de l'utilisation du cercle et de la ligne droite. La chorégraphe reconnaît elle même que la pièce est « radicale » basée sur la recherche de ce que son corps voulait alors exprimer avec une espèce de « non-savoir-faire[20] ».
Fase est composée de cycles répétitifs de mouvements simples jouant sur la performance extrêmement physique de maintien du rythme et la logique du déphasage/rephasage lors des duos[notes 5],[3]. Bien qu'il s'agisse d'une écriture dite « minimaliste », le mouvement est expansif et évolutif[27], utilise la déclinaison autour du motif central, et est techniquement extrêmement difficile à tenir[notes 6]. Fase puise une grande partie de son inspiration d'une part dans les processus d'accumulation de Trisha Brown que De Keersmaeker admire et d'autre part dans le travail de Lucinda Childs[28] qui durant les années 1960-1970 collabore étroitement avec l'école minimaliste new-yorkaise au sein du Judson Dance Theater et notamment avec le compositeur Philip Glass et le plasticien Sol LeWitt qui réalisent respectivement la partition homonyme et la scénographie/vidéo d'une des plus importantes pièces de Childs intitulée Dance[29] et créée à la Brooklyn Academy of Music en 1979[30]. Cette œuvre, et en particulier ses deux premiers mouvements, inspire à Anne Teresa De Keersmaeker la composition des parties Violin Phase et Piano Phase où se retrouvent des bases stylistes similaires, des techniques épurées (jetés des bras et des jambes, mouvements répétés), et quelques principes chorégraphiques (décalages, utilisation du cercle et de la ligne)[30] qui sont toutefois poussés à l'extrême dans la proposition de la chorégraphe belge, en raison notamment de l'utilisation de la musique de Reich, plus théorique et radicale que celle de Glass sur les principes de répétition de motifs et de décalage de phases.
L'éclairage, réalisé par Remon Fromont et Mark Schwentner, est une part essentielle de la mise en scène de Fase puisqu'il donne à voir et accentue[16], notamment grâce aux ombres chevauchantes générées lors du premier mouvement, les processus de décalages tout en donnant l'impression que les danseuses sont alternativement cinq ou six et non deux[31], à la manière de l'utilisation de la vidéo projetée de Sol LeWitt par Lucinda Childs pour Dance. Par ailleurs, les costumes simples presque austères – petites robes grises et mauves, tournoyantes, baskets et socquettes blanches enfantines dans les deux premiers mouvements, puis pantalons et chemises serrées ensuite – seront eux aussi une marque de fabrique durant de longues années de l’identité visuelle de De Keersmaeker[1].

  Premier mouvement : Piano Phase


  Motif musical principal de douze notes de Piano Phase (1967) de Steve Reich.
Écrite lors de son retour à Bruxelles en 1982, il s’agit probablement de la partie la plus célèbre de l’œuvre, et la plus jouée indépendamment des autres mouvements. Peut-être aussi la plus spectaculaire car certainement la plus visuelle en raison du jeu d'ombres portées démultipliant les danseuses. Dans cette première partie, De Keersmaeker expose les bases de sa danse répétitive et donne à voir le processus de phasage/déphasage de la célèbre musique Piano Phase de Reich composée en 1967. Les deux danseuses, éclairées puissamment par quatre projecteurs latéraux créant leurs ombres individuelles et superposées sur un fond blanc, vont répéter pendant environ 15 minutes un mouvement de balancier du bras et du corps, associé à un demi-tour saccadé ponctuel et vigoureux, entrecoupée d’une montée sur une pointe de pied laissée en suspens avant de reprendre la séquence[12]. Suivant la musique et son principe de décalage de phase, l’une des danseuses va accélérer son mouvement d’un douzième de phase, décalant ainsi par rapport à sa partenaire sa séquence, jusqu’à l’opposition de phase, et au rephasage complet après quelques minutes[12]. Les deux danseuses restent alignées dans un même plan, mais vont progressivement et insensiblement bouger vers l’avant de la scène en créant un déplacement diagonal (avec notamment deux passages dans un plan perpendiculaire au plan initial, face spectateurs), continuer leur séquence sur ce nouveau plan, avant de regagner le plan initial à la fin de l’œuvre musicale retrouvant une nouvelle fois la synchronicité du début de la pièce[32].

  Deuxième mouvement : Violin Phase


  Représentation schématique du motif en rosace résultant, du sens de déplacement et de l'ordre d'exécution des mouvements de Violin Phase.
C’est le solo de l’ensemble, dansé par Anne Teresa De Keersmaeker – cette fois dans un cercle giratoire éclairé de manière zénithale – sur Violin Phase, œuvre que Steve Reich a composée en 1967. Cette partie, d’une durée d'environ 18 minutes, est en réalité la première écrite par la chorégraphe et donnée en avril 1981 dans le cadre du Festival of the Early Years de l'Université d'État de New York (SUNY) à Purchase dans l’État de New York[8],[19]. Elle est directement inspirée du second mouvement de Dance (1979) de Lucinda Childs. Anne Teresa De Keersmaeker utilise également un motif de pirouette proche de celui de Piano Phase en joignant de manière rigoureuse les différents points cardinaux du cercle imaginaire autour duquel évolue la danseuse de manière alternativement centrifuge et centripète. Seule l’épure du geste et des mouvements du corps sont montrés dessinant au sol de la pointe du pied une rosace fictive de huit segments (celle-ci est explicitement montrée avec les dessins dans le sable que trace Anne Teresa De Keersmaeker dans la vidéo de Thierry De Mey de 2002[23] ou bien lors des représentation au MoMA à New York en 2011 reprenant pour la première fois ce dispositif sur scène à des fins pédagogiques autour du thème de « la ligne au XXe siècle[9],[19] »). Le mouvement culmine autour d'un point d'orgue musical et chorégraphique vers les deux-tiers de la pièce par un triple mouvement de balancier qu'effectue la danseuse au centre du cercle créé avec sa jambe droite tout en restant en équilibre sur la jambe gauche immobile, puis qu'elle réitère plus succinctement aux quatre points cardinaux[8]. La rotation des figures et de la danseuse, amplifiée par celui de la robe légère, font tout à la fois référence à la circumambulation spirituelle et physique de la danse Samâ' des derviches tourneurs soufiques et aux danses enfantines et espiègles des petites filles faisant tourner leurs robes et apparaître leurs culottes lors des bals de village[8],[19]. Certains des mouvements de cette partie deviendront des motifs typiques, des signatures, des chorégraphies ultérieures de la chorégraphe telle l'utilisation de la spirale qu'elle considère comme le « mouvement absolu »[notes 7] et que l'universitaire Philippe Guisgand qualifie d'« obsession spatiale majeure de De Keersmaeker[3] ». Elle-même confirme cette idée en déclarant en 2002 à propos de l'ensemble de son œuvre que
« Violin Phase est le noyau qui contenait tout ce qui a suivi[33] »
Dans ce mouvement, Anne Teresa De Keersmaeker démontre que la musique ne peut pas être qu'un simple accompagnement de la danse. Pour elle, son travail consiste en réalité à aborder un aspect essentiel de l'écriture musicale et d'en faire un fondement de sa grammaire chorégraphique, que ce soit par l'utilisation de l'espace, du temps ou du geste lui-même. Ainsi la partition de Violin Phase, qui s'inscrit dans la forme du rondo, implique, par transposition littérale, l'utilisation du cercle pour la composition chorégraphique[3].

  Troisième mouvement : Come out

Ce mouvement d'environ 11 minutes a été écrit avec Jennifer Everhard, une condisciple de Anne Teresa De Keersmaeker, et joué indépendamment de l'ensemble pour sa première en octobre 1981 à la Tisch School of the Arts de NYU. Sous deux lampes suspendues, les danseuses dès lors vêtues de pantalons gris, chemises claires et bottines, assises sur leurs tabourets, répètent sept mouvements distincts de bras et de bustes[34], sans se lever, de manière extrêmement saccadée et chaotique, mais en tournant progressivement au rythme de la phrase enregistrée « Come out to show them » de Come Out, la seconde œuvre écrite par Reich en 1966[32]. Cette partie est une illustration assez figurative du contexte historique de la composition de Reich, écrite dans à la suite des émeutes de la population afro-américaine réclamant l'application des droits civiques. En particulier, les mouvements des danseuses miment la phrase initiale : « I had to, like, open the bruise up and let some of the bruise blood come out to show them » (signifiant : « J'ai du ouvrir mes bleus et laisser le sang couler pour leur prouver »[notes 8]) sous la lumière crue de deux lampes à lumière crue évoquant un interrogatoire brutal dans un poste de police[16].
Ce mouvement constituera par ailleurs la base de travail du deuxième mouvement de Rosas danst Rosas, la chorégraphie suivante de Anne Teresa De Keersmaeker écrite en 1983.

  Quatrième mouvement : Clapping Music

Également écrit lors de son retour à Bruxelles en 1982, ce mouvement final est constitué par le déplacement en diagonale des deux danseuses, depuis l'arrière-scène côté cour vers l'avant-scène côté jardin en passant à la verticale des deux lampes de Come Out où se finira le mouvement, sur la base d'un simple mouvement synchrone/asynchrone de leurs pieds allant des demi-pointes aux pieds à plat sur le sol, avec flexion brusque des genoux en tension accompagnée d'un mouvement opposé des bras en demi-flexion[3]. Il dure 4 à 5 minutes et suit les douze temps de déphasage des battements de mains de Clapping Music (1972) réalisé en direct par deux personnes.

samedi 14 mars 2020

"Corps-voix": un stage de Sarah Brado Durand. Faire entendre sa voix, trouver sa voie.



Journées de stage de technique vocale, écoute et interprétation, comprenant ateliers collectifs et temps de travail individuels. Vous pouvez assister à une seule journée ou à plusieurs, selon les possibilités et si les thèmes vous parlent.

Horaires : de 10h à 18h.
Tarif : 100€/jour

INSCRIPTIONS UNIQUEMENT SUR https://cally.com/pbxn9w9v7ut9znij
merci de me laisser votre adresse mail dans les remarques lors de votre inscription, que je puis vous contacter si besoin

programme détaillé

mardi 10 mars : oser découvrir et sortir sa voix
journée destinée à toutes les voix qui s'ignorent, n'osent pas sortir, se coincent, se bloquent, restent cachées à l'intérieur, mais qui voudraient se découvrir, s'envoler et se déployer !

mercredi 11 mars : interprétation
au delà de la technique, qui n'est qu'un outil, le but ultime de notre travail : interpréter, transmettre et donner à ressentir ce que nous chantons.

jeudi 12 mars : la voix parlée
exploration des mécanismes de placement et de projection de la voix parlée selon l'utilisation souhaitée : radio, enregistrement, spectacle, conférence, cours....


VENDREDI 13 MARS : connexion corps/voix

Une journée surtout de technique vocale pour que le corps-instrument permette de bien soutenir la voix : comment le corps est support de la voix, comme la respiration se déploie pour soutenir la chant, les mécanismes de mise en vibration du son dans le crâne et de projection....


Superbe session, imaginative, créative, respectueuse mais surtout hors norme, énorme travail subtil de pédagogie ludique, corporelle, intuitive, sensible: les unes et les autres avançant dans la découverte de leur instrument, corps-dansant-chantant aux possibilités infinies d'abandon: le tout orchestré par "une cheffe de cœur du "milieu", non conforme à tout formatage ou apprentissage forcé.De la "kinésiologie" de la voix, de la sophro-danse phoniée extra-ordinaire. Du "sur mesure" taillé dans le collectif pour des habits de lune, de soleil comme "peau d'âne": "préparez votre pâte", votre voix, " dans une "jatte plate": un corps préparé comme un piano à la John Cage.
Les voix émergent, uniques, celle de chacune: timbre, hauteur, volume.
Les résonances s'éveillent, les psoas et périnées s'expriment, les nuques se dégagent, les fréquences et vibratos sont ajustés comme des vêtements taillés sur mesure, haute couture dans cet atelier chaleureux, accueillant, clair et lumineux.
Sarah Brado, praticienne aguerrie, à l'écoute, rebondissant sur les propositions de chacune et telle un pygmalion, façonnant des sculptures mouvantes des corps, accordés aux cordes vocales: autant d'instrument sur lesquels jouer, jouir et s'amuser avec le plus grand sérieux professionnel.
Pétillante et "contagieuse" animatrice-artiste qui a du "chien", du "clito", de la verve à partager
On se sépare, riches d'une expérience unique, émouvante où l'on a "avancé" sur le chemin de l'âne, broutant le meilleur des fourrés savoureux et sauvages.
 Vivement la suite.Je ferai l'intégrale. Merci !

samedi 14 mars : oreille spectrale
On vous a déjà dit que vous chantiez faux ? Que vous cassiez les oreilles de votre entourage, voire que vous aviez peut-être joué un rôle dans les dernières tempêtes ? Reconnaître et reproduire la hauteur des sons vous demande de la concentration, alors que vous en percevez facilement la clarté ou l'obscurité ? Et si vous n'aviez pas de problème, mais juste une spécificité : l'oreille spectrale.... Ce thème est pour vous : Une journée à destination des personnes dont l'écoute est principalement harmonique (écoute des couleurs plus que des hauteurs) : comment appréhender cette différence d'audition et en faire un atout, différencier les hauteurs des couleurs du son, y trouver ses repères et équilibrer les deux


organisation standard d'une journée :

- 10h - 11h : travail corporel, échauffement
- 11h - 12h : atelier collectif
- 12h - 13h : pause repas (à la charge de chaque participant·e d'apporter son repas ou de s'absenter sur le temps de midi)
- 13h - 17h : cours individuels (et publics, chacun·e assiste aux cours des autres)
- 17h - 18h : atelier collectif final