jeudi 20 mars 2025

TRAVAUX PUBLICS William Cardoso – "Deadline" : brut de coffrage, tabula non rasa cathartique.

 


TRAVAUX PUBLICS
William Cardoso – Deadline   


Indispensables lieux de fabrique, les CDCN permettent chaque année à des dizaines d’artistes de créer de nouveaux spectacles dans de bonnes conditions techniques et financières. À POLE-SUD, un grand espace leur est dédié et nous participons, grâce à ce dispositif financé par le Ministère de la Culture et les collectivités locales, à la production d’œuvres régionales, nationales et internationales.   Certaines de ces résidences ouvrent leurs portes au public lors de soirées 2 en 1 où vous pouvez découvrir gratuitement une étape de travail, les « Travaux publics », à 19:00 et un spectacle de notre saison à 20:30.   


La compagnie de William Cardoso est basée au Luxembourg et se produit sur le territoire national et international. Son travail est connu pour son esprit contradictoire, imprévisible, créatif et engagé. Abordant des thématiques intimes et personnelles, ses pièces pointent du doigt une société hétéronormée et patriarcale. Affamé par le changement et habité par la rage de l’injustice, son travail se concentre beaucoup sur une idée de combat, une danse contacte prise à contre sens qui se résume par un aspect non fluide et des mouvements secs et bruts.    

Que voici un riche moment de découverte et d'échange en compagnie d'une oeuvre en train de naitre et de se fabriquer en toute modestie et sans jugement. Lumière brute de néons d'ambiance globale au studio pour le public et sur le plateau. Trois corps sont déjà présents juchés sur un dispositif curieux de tables alignées, surhaussées: tables opératoires, paillasses de laboratoire...L'imagination est déjà ébranlée et convoquée. Les visages occultés par des bandelettes, pansements ou tissus médicaux. Les têtes sont penchées, les dos courbés, soumis à une douleur , une affectation, un traumatisme. Deux de ces être hybrides manipulent un troisième corps étiré, tiraillé qui tente de reprendre pied sur ce socle tabulaire. Vision dantesque de tyrannie, d'oppression. De soumission mais de résistance aussi à ce qui est infligé à ce corps meurtri. Les ébauches de chorégraphies font état de corps tant la plastique, la sculpture des muscles des interprètes est sensible et facture de sens et de beauté quasi masochiste. Trois êtres masqués offrent des visions corporelles qui en disent long et interpellent. Pourtant avec peu de moyen encore mais des intentions claires et limpides sur le propos de la fracture. Ce trio indisciplinaire se meut, animal, batracien collé au mur ou reptiles à deux pattes. A demi nus, torse à découvert, slip blancs comme une certaine virginité convoquée par le chorégraphe. Un compte à rebours en langue allemande est simulacre de vanité, une musique s'immisce dans ce chaos corporel, physique à vous couper le souffle. Une énergie féroce, assumée déborde et l'empathie est soudaine, perdure durant ce court laps de temps où l'on est invité à regarder, apprécier un opus en cours de fabrication. Les interprètes aux regards masqués soulignent ce désir de communiquer par le biais du corps, de sa matière, de son existence, de sa présence sur le plateau. Et les tables de se transformer en ère de jeu comme un puzzle ou mikado géant pour accueillir les sauts écartelés, les jambes musclées et les corps charpentés de ces artistes à l'affut du risque, de la tension, du drame charnel de rupture. Tout cela augure d'une pièce à venir forte et sans concession à la forme. Du vécu autant pour celui qui regarde que pour ceux qui occupent le plateau avec une conviction et un engagement évident. William Cardoso à l'écoute de ses complices danseurs performeurs brutes de coffrage à la charpente solide dans cette atmosphère clinique sans équivoque. A découvrir sans délai et avec impatience.

 Résidence : LU 17 > VE 21 MARS 

A Pole Sud le 20 Mars

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