Un Monsieur Loyal très humoriste, une meneuse de revue qui babille en anglais et se fait gentillement trahir par son interprète . Ca démarre en fanfare et cela ne cessera . La verve de Decouflé opère toujours avec ou sans surprise mais toujours dans l'enchantement, l'humour et le léger décalé qu'on lui connait.
D'immenses panneaux font laisser apparaître et disparaître cette étrange tribu hétéroclite de personnages chatoyants lors de séquences ou saynètes dignes de Mélies. Le cabaret est passé par là, plein de strass et paillettes :le "Crazy Horse" a laissé de belles strates au chorégraphe qui compose sa pièce montée comme un palimpseste de diverses citations et références personnelles
On songe à l’élan de son "Jump" avec Charles Atlas quand une ballerine surgit en tutu blanc et rouge pour virevolter dans l'espace et rendre contagieuse sa joie et son dynamisme
Truffé aussi de clins d’œils au cinéma dans les allusions comiques à West Side Story pour un match de foot entre ennemis
Les danseurs font écho a de remarquables images façonnées comme dans des kaléidoscopes et polychromie technicolor et autres vagabondages Cinéma muet aussi avec d'étranges images fantomatiques de spectre de Loie Fuller sur les écrans latéraux, d'images à la Besby Berkeley qui se démultiplient comme dans un diaphragme d'appareil photo ou de caméra.
C'est très beau et esthétique, certains plans rappelant des planches d'anatomie osseuse , colonnes vertébrales qui se déplient, se dénouent, se déploient en très grand, surdimentionné.
L'ange de l'anatomie veille, les "5000 doigts du docter T,", "L'homme aux mille mains" de Cocteau: toute la culture cinématographique de Decouflé fait surface et inonde sa fantaisie, son imaginaire, sa rêverie,
Visionnaire comme son maître Nikolais, comme ses origines circassiennes qui ponctuent le show par des apparitions de trapézistes élastonautes, pleines de grâce, en apesanteur
Son acteur danseur fétiche en tête de gondole, Christophe Salengro, dégingandé, un peu raidi en Valentin le Désossé, immense personnage incarne Faust à la recherche de sa Marguerite aux sons de la formation musicale live Nossfell
Notre Docteur Mabuse, notre Nosfératu évoque aussi ce "Kontakthof" légendaire de Pina Bausch, laissant divaguer ses interprètes en diagonale du fou, avec ces gestes légendaires à la Pina
Belles robes et costumes rutilants, perruques rupestres signées Charli Le Mindu, tout concourt au divertissement ludique, à la danse légère et grave à la fois, synonyme de pétulance, de gaieté, de joie
D'absurde aussi : qui est ce Jean Claude évoqué à plusieurs reprises: un prestidigitateur un "Emile Dubois" à la Gallotta, un fantôme, le diable désincarné, Méphistophélès..?
Cela va tambour battant, sans jamais s’essouffler ni se perdre dans l'anecdote: l'exercice est périlleux mais tant de bonnes fées veillent sur ce conte déjanté que l'on songe à un hapy end bien mérité
Mac Laren, imagier du cinéma d'animation ,Muybridge et Marey veillent au grain sur cette petite famille unie, tribu pas comme les autres, charmeuse, enjôleuse, livrée dans les mains de notre prestidigitateur , Robert le Diable, en diable!
Un générique comme au cinéma, plein cadre, et truffé d'enluminures, de petits corps composant un codex d'abécédaire boucle la boucle en beauté pour cette "Planète Decouflé" où il fait bon vivre auprès de tant de créatures hybrides, sorties de l'antre, de la matrice du Chorégraphe, inventeur prolixe et fertile. Bosch et Bruegel se régaleraient!
Decouflé impacte Faust et nous fait rêver : Caramba, ouvrez vos iris et laisser vous aller à l'onirisme dans cette galerie de l'évolution où le danseur se redresse pour mieux jouer et divaguer sa vie!
A La Filatureà Mulhouse, et en coproduction,ce samedi 25 Avril dernier
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