Sa gestuelle douce et tranchante à la fois la conduit à quitter son écrin de noir et blanc pour se fondre dans un univers où la lumière sculpte son corps mouvant
Elle est aussi sculptrice d'espace, les doigts caressant l'éther pour en faire un partenaire à part entière
Puis elle disparaît laissant place à un spectre virtuel sur l'écran, comme une incarnation de Mary Wigman dans "Totenmal", son image, vêtue de plissés savants se love, se plie et se replie de toute sa respiration factice: c'est impressionnant, stupéfiant, hypnotique et saisissant de beauté
Fantôme ou ectoplasme, revenant d'autres contrées, Kazuo Ohno ou Hijikata se rencontrent dans son icone floutée gris De feu aussi, sa seconde apparition, son corps moulé dans une robe fourreau rouge pailleté, comme gainé de souvenir d'atours spectaculaires.Des gants ourlés d'ailes pour allonger ses bras, dénuder ses épaules. La lumière savamment en dessine les contours et son visage, à peine expressif reflète des émotions surgies de strates d' esquisses picturales ancestrales
Si le souvenir est présent, si une ode au Butô est vivante ici, la danse demeure seule et incarnée, présente et comme une offrande, cérémonie de deuil, petite messe où la musique, le silence se rejoignent pour commémorer dans l'instant, l'art de l'éphémère
Terpsichore veille, guette et traque la beauté des gestes qui se fondent et réaniment l'espace. Ré-création du corps de la danseuse,architecturée, colossale et fragile à la fois dans une interprétation sobre et forte de personnages de légende.
Emilio Urbina et Harris Gkekas offrent deux gestuelles pétries de cultures singulières, de lignes divergentes et complémentaires!
les bords des corps dansants. Ils s'ignorent, chacun dans leur écriture singulière, tracent dans l'espace vide autant de lignes ,points et suspensions. Des rémanences optiques s'affichent dans cette fulgurante vélocité à la Pina Bausch, danse d'expression, de flux et reflux incessants.
Puis les deux hommes se confondent dans une course folle contre le temps, la musique et la lumière en poursuite obsédante, traquante! Qui l'emportera dans cette joute ouverte, cette rixe des corps qui s'enlacent, se séparent, se refusent, s'ignorent?La musique s'emballe, les dépasse, les attend et patiente le temps de récupérer leur espace qui se fait et se défait sempiternellement
Ils disparaîtront dans la lumière descendante comme ils sont apparus, sans leurs ombres portées, dans une absence concertée.Sur le plateau de Pôle Sud, les tracés demeurent et le public, recueilli, exprime son empathie dans des applaudissements mesurés, en phase avec ce très bel hommage à la danse des ténèbres si clairement offerte aux regards contemporains! Antonin Artaud et son "Théâtre de la cruauté" en serait tout retourné, tant l'objectivité de Catherine Diverres est au service d'un art incarné, offert et donné à voir dans sa plus belle crudité!
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