Sharon Fridman, chorégraphe israélien affiche avec son spectacle, présenté par Pôle Sud et le Maillon, un diabolique savoir faire en matière de direction artistique . Sur le plateau pour "Au moins deux visages", un mur, deux danseurs et un énigmatique personnage qui hante les lieux: observateur, voyeur, simple spectateur?
Il est aussi manipulateur d'un judicieux dispositif, ce triptyque de bois, comme un habitacle ouvert, architecture mouvante qui permet aux deux interprètes de se glisser dans les interstices du bâti.
Mur, murmures: ils ont des regards...
Un duo démarre qui ne cessera une heure durant, dans une dépense inouïe du couple qui se fait et se défait à l'envi.
Beauté des corps, des chevelures, blonde et brune, longues qui prolongent les mouvements de la nuque dans une grande sensualité.Vrilles, volutes, tourbillons, une grande aisance, un laissez aller nonchalant distillent une mouvance fluide, ininterrompue, jouissive.
L'abandon est de mise, le don de soi et de son corps à l'autre par des portés, comme éphémères, sans heurt, lisses et stabiles.
Une grande empathie s'empare de celui qui regarde, qui croise ces deux êtres voluptueux, fragiles et massifs à la fois
Autant de prises que d'enlacements, de fugues versatiles, d’incertitudes, de déséquilibres, d'instabilité.
Le monde est fébrile, pulsatile et léger qui guide cette ode à l'amour, à l'ivresse du mouvement sempiternel des corps animés par la grâce, tendus par l'urgence de s'attraper sans se lâcher.
Les regards se focalisent sur cet enchevêtrement d'énergie incertaine qui conduit à l'hypnose, alors que la musique de Luis Miguel Cobo tend et sous tend le rythme effréné de ces évolutions.
Comme un arc qui délivre le trajet de la flèche, comme un arceau, une toile tendue, les corps délivrent une architecture qui les supporte, les assiste dans leurs évolutions d'équilibristes virtuoses, avec brio et modestie, simplicité, toujours
En training, vastes et souples vêtements de répétition ou d'entrainement ,tuniques vaporeuses, béantes qui laissent fondre le mouvement et surgir au coin d'une épaule, au détour d'une hanche, le vaste paysage du bassin du corps: une petite géographie sensuelle des secrets corporels, dévoilée par l'attirance de celui qui accompagne les deux danseurs.
Un observateur tranquille qui veille et indique,focalise les points de vue, les repères et affuts du regard.
Comme un chasseur attentif à l'abri, à l'affût des petits instants de la vie.
Sublime interprétation de Arthur Bernard Bazin, Sharon Fridman et Antonio Ramirez-Stabivo.
En état de grâce, de communion, de connivence, le spectateur navigue dans cet océan vertigineux où l'on perd pied sans jamais perdre le cap, ni la raison.
jeudi 28 mars 2013
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