mercredi 15 octobre 2025

Marco D’Agostin "Astéroïde" : Tyrannosaurus Rex paléontologue hémérite.


 Pourquoi, dans une comédie musicale, tout le monde se met-il soudain à chanter et à danser ? Ce genre, à la fois populaire et artificiel, révèle une tension entre spontanéité et mise en scène, entre sincérité et spectacle. Dans son nouveau solo Astéroïde, Marco D’Agostin, chorégraphe et interprète italien, interroge cette mécanique avec autant de profondeur que de décalage. Il imagine un artiste venu parler de la chute d’un astéroïde sur Terre. Mais peu à peu, une force étrange s’empare de lui : le mouvement déborde la parole, la voix se désynchronise, le corps dérive. Le spectacle glisse vers un show à la Broadway, avec ses séductions et ses pièges. Faut-il résister ou céder à l’appel irrésistible de la scène ? Déjà accueilli à POLE-SUD avec Best Regards (2021) et Gli anni (2022), Marco D’Agostin poursuit ici son exploration d’un théâtre chorégraphique où le récit se heurte au désir de performance. Quelle forme peut naître de cette collision entre langage, corps et divertissement ?


Italie Solo 2025 


 On le croirait plutôt sorti d'un western, ce performeur soliste tout de beige vêtu, sorte de costume de safari, chapeau de cowboy en tête de gondole, énorme sac à dos sur les épaules: étrange architecture portable carrée pouvant contenir on ne sait quoi, de formes angulaires. Le mystère règne sur ce curieux personnage qui à lui seul va tenir le plateau devant nos yeux intrigués et curieux. Il se présente dans une langue très française ourlée d'un accent tonique qui fait dresser l’intérêt sur le contenu de ses paroles. Plutôt récit, narration que discours sur le métier de paléontologue de l'impossible. Chercheur en diable d'un lexique verbal et bientôt chorégraphique car à la manière d'un Fred Astaire, il bascule d'un mouvement du quotidien à une esquisse dansée foudroyante. Comme le disait Bernard Rémy éminent philosophe de l'image à la Cinémathèque de la Danse, il glisse d'un registre à l'autre pour subitement danser comme un rapeur, un hip-hopeur folklorique, psychédélique: le groupe T.Rex en figure de proue pour ce paléontologue fantoche de pacotille. Les fossiles gestuels sont primaires et de bon aloi pour ce pourfendeur de la science de l'origine de l'humanité. Nous voici donc dans la galerie de l'évolution au jardin des plantes pour façonner un récit, une histoire d'asréroide guidée par la mémoire d'un savant fou encore sage.Le look évoquant toujours ce pionnier du far ouest venu d'ailleurs. Serait-ce la figure réincarnée de Mary Anning, inventeur de la science des fossiles au XIX siècle? Comédie de la vie sur un ton débonnaire, relâché mais dont les tracés choré-graphiques sont stricts et déterminés, tirés au cordeau comme les structures spatiales d'un genre qu'il tente de dévoiler: la comédie musicale. Celle ci attendra son apogée lors d'un solo en costume pailleté sur fond de cercle de lumière, projecteur focalisant son corps dansant, hachuré par une gestuelle tectonique savante et préméditée.La danse en filigrane du discours, rythmé et captivant. Quand il confie à une partenaire complice en salle, la lecture d'un grimoire scintifique, c'est pour mieux déboussoler et désorienter le public, conquis et fan de ses chansons et de sa voix profonde de chanteur de bel canto , beau chant au timbre et tessiture country!Des ossements, crânes et trophées de Dinosaures pour partenaires de plateau, comme second exosquelette patrimonial d'un héritage bizarre. Et quand la débâcle surgit en ribambelle de projecteurs éblouissants, c'est une curieuse bestiole à six pattes, sabots et platitude arachnéenne qui fait place au corps de l'artiste. Bête de scène manipulée à distance, robot esquissant des pas de danse dans des lumières alléchées.Quel beau voyage sidéral et cosmique pour cet opus singulier, animé par un manipulateur-manipulé digne d'un film burlesque, ou conférence désarticulée, gesticulée à souhait, enthousiasmante à perdre haleine. Ovations d'un public jeune adepte d'histoires de science friction inédite. Un musée zoologique bien vivant aux dioramas comme un décor de camping pique nique de savane plutôt que de lido ou crazy horse, de folies bergères à la Broadway. Cosmic Dancer de t.rex à volonté!.

 

A Pole Sud les 14 et 15 Octobre

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