lundi 2 avril 2018

"Drum Machines": le CD ! eRikm et les Percussions de Strasbourg s'immortalisent!


Les Percussions de Strasbourg et eRikm produisent le CD de "Drum-Machines" de 2015/ 2016 en création mondiale, s'il vous plait.
Rencontre entre le fameux ensemble des Percussions de Strasbourg, tout neuf, et le trublion eRikm... Ca va le faire!Lors de la création scénique on se souvient de la scène encombrée de multiples objets et instruments de percussions pour le "décor" scénographique...Objets de convoitise, de désir et d'expérimentation tous azimuts. Musique savante, expérimentale.
Tout démarre avec un solo discret de plumeau, pinceau effleurant les objets, chasse-mouche désopilant, évoquant la douce et tendre Dame Nature.Paysages de montage avec cloches de vaches, éclairs et tonnerre qui se rapprochent, le visuel est fort et les images visionnaires se dessinent à l'horizon musical.Tandis que eRikm visse et dévisse le son sur sa table de mixage, les cinq musiciens des Percussions s'agitent, s'animent d'un instrument à l'autre générant peu à peu une ambiance singulière: rituel d'un grand bivouac au sein d'une oasis de perles de pluie, campement éphémère d'où, assis en tailleur, les musiciens émettent jusqu'à leur perte, des martèlement de baguettes, amplifiés jusqu'à leur paroxysme.Tout se déchaîne, s'accélère, euphorisant, magnétique, hypnotique.Des images sont projetées simultanément, captées en direct: elles signalent en gros plans, la source des sons, délivrent les secrets de fabrication de bruits singuliers, venus d'une vielle triturée ou d'une surface de tambour ou grosse caisse. Saisissants vermisseaux qui sautillent , en chenilles, en vermicelles sur la peau de la grosse caisse, transformée en gazomètre ou forge incandescente.Plaque métallique en folie, scie musicale étrange, c'est une usine emballée par les sons qui délivre son brouhaha, tohu-bohu de figures rythmiques de percussions: un univers de labeur torride à la Fernand Léger, une broyeuse destructrice, emballée, un enfer métallurgique que ce "Drum-machines" tonitruant, tectonique.Les Temps Modernes en référence, le corps de Charlot dans les engrenages, fatalisme du conditionnement de l'être humain par la machine
 Un bout de bras tournoie sur la peau du monde d'une caisse de résonance: image filmée, projetée pour mettre dans l'ambiance de la déshumanisation du monde industriel, du corps en morceaux, désagrégé, débité, découpé/ L'enfer? Compulsif, plein de circonvolutions sonores, de chaos, de bouleversements, de tsunami sonore, tempétueux, ravageur, ébouriffant!
Des pots de fleurs, à fleur de peau, effleurés pour attendrir l'atmosphère hystérique du spectacle déchirant de fureur, de bruits de cataclysme annoncé
Le CD demeure un spectacle tendu, volcan plein de scories d'un cratère éruptif incessant, crachant sons et frissons: la géologie est aussi électroacoustique et eRikm de démontrer en compagnie de Stéphane Cousot pour le dispositif vidéo, Olivier Pfeiffer pour le son que la création est vivante, bouleversante et jaillissante.
Drum-Machines, 2ème enregistrement réalisé et produit sous le label Percussions de Strasbourg, marque un tournant important dans l’approche de l’ensemble, celle de la 4ème génération. À la jonction entre musique contemporaine et musique électronique, Drum-Machines s’est créée en suivant un processus de composition dynamique : les interprètes ont d’abord proposé des matériaux sonores sur deux résidences de recherche puis eRikm en a assuré la composition, la production musicale et le mixage.
Sortie mondiale le 30 mars 2018, en CD et numériqueDouble LP à venir prochainement !





vendredi 30 mars 2018

Accroche Note: concert de Pâques ! Pas que du n'oeuf contemporain ! Ça cloche !

Tout juste sorti d'une masterclass donnée par le compositeur allemand Walter Zimmermann, et d'un concert, l'ensemble du couple Françoise Kubler - Armand Angster propose, exceptionnellement cette année, un concert de Pâques articulé autour de la création d'une cantate de Gérard Condé intitulé "Le Mont des Oliviers" à partir du poème éponyme d'Alfred de Vigny.

Il sonne comme un avant goût des "Rencontres d'été" qui se tiennent en général toute fin juin dans cette même église du Bouclier. Il mêle en effet les époques - divertimento initial de Mozart pour trois cors de basset, polyphonies médiévales de Gérard Geay transcrites pour soprano et trois clarinettes - et rend spécifiquement hommage à deux compositeurs chers à l'ensemble et disparus en 2017 : Klaus Huber et le régional Jean-Jacques Wener, dont la "Melancolia" suivra la cantate de Condé.

Outre la voix de soprano de Kubler, et les clarinettes, on entendra le percussionniste Clément Losco et l'accordéoniste Marie-Andrée Joerger, que l'on avait vu à l'oeuvre dans les "expressions japonaises" données par la formation en janvier au Conservatoire.

Wolfgang Amadeus Mozart Divertimento n°1 pour trois cors de basset (1783)
En prologue, trois garçons dans le vent, pour une oeuvre joviale, alerte, pleine d'envolées et d'allégresse.
Douceur et confort de l'écoute de ces différents mouvements, du vif, au lent et solennel.La mélodie s'égaye, perd sa retenue et s'envole au firmament mozartien. Grâce et style, maniérisme galant, et un épilogue réjouissant, vers de belles perspectives.

Gérard Condé Le mont des oliviers, cantate pour soprano, cor de basset et percussions (2017) – création
Elle allume des bougies, les percussions résonnent.Au loin, le cor se fait entendre.Comme une seconde voix en dialogue et bordure.Des ponctuations, tour à tour par chacun qui a la parole.L'histoire de Jésus nous est contée.Avec sobriété et respect. Le sommeil des apôtres, en silence évoqué, suspens. La dignité de Jésus dans une tension montante se forge et la voix parlée, chantée a une présence prépondérante.Tambour qui tremble, éclats des percussions qui tintinnabulent sur le xylophone....La chanteuse éteint les bougies, et sa voix intense, habitée par le drame, file et résonne, sous le vrombissement des percussions.De puissantes cymbales renforcent l'atmosphère tendue et recueillie, vers un lent cheminement vers l'instant fatal.Attente, renoncement, chemin de voix qui croit à l'issue terminale.Frémissements de la musique, crécelle en épilogue; le cor disparaît dans le lointain: le silence sera éternel, tous feux éteints. Une oeuvre remarquable par son univers universel et profond.
Françoise Kubler partagée entre chanteuse, diseuse, conteuse y incarne foi et passion avec conviction et talent dans des timbres multiples, subtils et virtuoses de finesse et justesse.

Jean-Jacques Werner Melencolia pour clarinette et accordéon (2011)
L'éventail de l'accordéon déployé, ses poumons étirés répondent à l'allégresse de la clarinette et l'oeuvre file, gracieuse en dialogue permanent, tuilé, ajusté: tout s'y enchaîne naturellement sans heurt, et rien ne s'essouffle: l'un prend le relais de l'autre et en bon témoin, passe son tour et franchit la ligne d'arrivée, en "portées" par les  prouesses de la partition.

Polyphonies médiévales (XIII° siècle), transcriptions de Gérard Geay, pour soprano et trois clarinettes en la (2017): belle surprise ici dont l’avènement singulier étonne et ravit Un univers radieux, joyeux où la voix rivalise avec les clarinettes: polychromie de la musique, colorée, vive et enjouée.Une danse s'y profile, contrepoints et sursauts à l'appui, rythme et tempo alertes et de très beaux aigus sourdent de la voix puissante, présente.L'alternance des mouvements laissant une fois sur deux place à la chanteuse parmi les vents, est source d'entremets délicieux, délectables et pleins de charme!

Klaus Huber Ein hauch von Unzeit pour soprano, accordéon et clarinette (1972)
Un trio singulier se forme, très filé, en longueurs, linéaire qui résonne dans de hautes fréquences.La voix chuchote, parle, s'étonne, questionne et se rit des difficultés. Éclats, couches et strates de sonorités voyagent, se déplacent, se décalent et dans le lointain, la clarinette, à l'écart, se fait écho et renvois subtils.Les sons, amplifiés dans l'espace acoustique de l'église, résonnent, se propagent. Murmures, cris, anonements, trois chants qui meurent doucement. Un dernier souffle et tout s'éteint.
Un concert remarquable en ce temps pascal, recueilli, juste et porteur de prière intérieure, de concentration et de spiritualité.


Françoise Kubler, voix / Armand Angster, Justin Frieh et Laurent Will, clarinettes / Marie-Andrée Joerger, accordéon /Clément Losco,percussions
30 Mars 2018 à 20h30 Concert de Pâques Eglise du Bouclier, Strasbourg (67)

Formes !!!