lundi 7 octobre 2024

Concerts pour soi Orchestre national de Metz Grand Est: duo alto-violoncelle: une spirale musicale: un brunch sonore très nourissant!

 


L’Orchestre national de Metz Grand Est convie auditeurs et auditrices à vivre un moment unique.

Durant une journée entière, des concerts ont été dissimulés dans des lieux insolites du centre-ville messin. Une expérience de l’intimité musicale qui, pour être vécue pleinement, est destinée à un public réduit, en solo ou en duo. Quant au mystère des lieux et du programme des concerts, il ne sera levé qu’au dernier moment…de 9h à 20h, horaires multiples

Les spectateur·ices choisissent un créneau horaire à leur convenance, sans que ne leur soient dévoilés le lieu et le programme. Une adresse est communiquée par SMS et email 48 heures avant le concert. Les lieux sont situés à Metz même et desservis par les transports en commun. Sur place, les spectateur·ices sont reçu·es et guidé·es par un personnel d’accueil vêtu aux couleurs de la Cité musicale-Metz.


Dans l'atelier de Hélène Roux, une plasticienne-graveuse de la place et du cru, à potron minet, nous voici immergés dans la musique, secrète et confidentielle d'un duo rarissime: Philippe Baudry au violoncelle et Alain Celo à l'alto.  "Deux pièces pour alto" de François Narboni entament cette matinée lumineuse et fraiche, nichée au coeur d'une petite salle de musique improvisée, auréolée des oeuvres végétalisantes de l'artiste-hotesse de l'événement. Un concert "pour soi", partagé à deux, rien que pour ces auditeurs privilégiés que nous sommes. Oeuvre palpitante et vibrante exécutée de mains de maitre, cordes pincées ou glissées sous les archets capricieux d'une composition radicale, en alto solo. De Dominique Lemaitre , "Hélix" en duo tranquille et serein fait figure d'enluminure tant la précision et les harmonies vibre et transfigure ce petit espace dévolu à l'intimité musicale partagée. Bach en interlude avec "Sarabande" au violoncelle solo pour nous rappeler qu'on ne vient pas de nulle part... Et au final de cette collation sonore matinale, en brunch délectable, "Music to go" de Betsy Jolas, un duo gagnant de réverbérations, nappes sonores, couches tuilées de sonorités qui convergent vers la fugue, la fuite, le voyage spatio-temporel. Les deux interprètes généreux et virtuoses entament un dialogue éclairant le choix des oeuvres, leur rareté et la pertinence de leur "présence" dans le cadre intimiste de cette expérience hors norme. L'exposition des toiles, peintures d'Hélène Roux en résonance avec ces gouttes de musiques matinales rafraichissante, aériennes autant que "plantureuses".

Dans le cadre de MUSICA METZ le 6 Octobre près de l'église ST Maximin

Ryoji Ikeda + Philip Glass Les Percussions de Strasbourg | Erwan Keravec / 8 sonneurs: retentissant!

 


Ryoji Ikeda et Philip Glass incarnent deux pôles de la musique répétitive — celle née de la culture électronique japonaise, entre sinusoïde et bruit blanc, et celle du New York des années 1960, processuelle, psychédélique et sensuelle.

Avec 100 Cymbals, Ryoji Ikeda et les Percussions de Strasbourg mettent en lumière le potentiel des cymbales en suivant la mince frontière qui sépare le bruit de la résonance harmonique, tandis qu’Erwan Keravec réunit un groupe de sonneurs de cornemuses, bombardes et binious pour amplifier quelques-unes des premières pages de Philip Glass. Une expérience d’écoute unique pour se lover dans les vibrations.



Ryoji Ikeda, 100 Cymbals (2019)

Comme une immense  installation plasticienne, les 100 cymbals s'alignent, petits soldats, pas tous pareils si l'on y regarde de plus près: venues de Turquie et du potentiel de l'instrumentarium des Percussions de Strasbourg, les instruments se dressent à hauteur d'homme pour mieux être doucement caressés, frappés, touchés subtilement et rendent des sons vibratoires subtils, légers, à peine perceptibles.... Un véritable temple bouddhiste où les cymbales, comme autant de petites flammes, bougent, résonnent, bruissent: les dix officiants, régulièrement modifiant leur poste dans un ensemble chorégraphique très opérant.

Visuellement, œuvre sonore plasticienne, cette pièce singulière qui nous est donnée de découvrir  s'ouvre à Cage, en écho à son affection pour la culture zen, la danse, le mouvement naturel des corps et du son dans l'espace Vision reposante, hypnotique, calmante et bienfaisante d'une écoute toujours très concentrée sur ses fins: rendre l'infiniment petit à une place gigantesque, l'infiniment perceptible, digne d'une attention à l'environnement sonore quotidien qui nous berce ou nous froisse, nous ravit ou nous malmène à chaque seconde: les oreilles n'ont pas de paupières: heureusement!

Et bien sûr,en présence des Percussions de Strasbourg, modelées pour accueillir et réfléchir un répertoire inédit, caché, secret, révélé au grand jour par le festival Musica, au diapason de la diversité et de la rareté...Belle soirée inaugurale qui augure du meilleur pour la suite ...Chut! C'est un secret qu'on ne confie qu'à une seule personne à la fois.Concentration, surprises et découvertes à l'appui, tout surprend, dérange sans jamais heurter nos sens en alerte, aux aguets du moindre "bruit" issu de tant d'objets hétéroclites: au petit bonheur des auditeurs, charmés par tant de préciosité, de précision, d'attention à chaque geste générant musique et univers sonore inouï ! 


Philip Glass, Two Pages (1968) | Music in Fifths (1969) | Music in Contrary Motion (1969) | Music in Similar Motion (1969)
8 sonneurs
Gaël Chauvin, Mickaël Cozien, Erwan Hamon, Gweltaz Hervé, Erwan Keravec, Guénolé Keravec, Vincent Marin, Enora Morice

C'est une "symphonique" pour instruments identiques, un orchestre de chambre bien chambré qui interprète à coups de bombardes, binious et cornemuses le meilleur de Phil Glass. Cet instrument, le binioù qui fait partie de la grande famille des cornemuses. Il se compose d'une poche en cuir, d'un sutel servant à l'alimenter en air, d'un bourdon mélodique produisant une note continue, et enfin d'un lévriad sur lequel est jouée la mélodie.Une aubeine pour le son qui résonne dans la grande salle de l'Arsenal, prodigue et prodige de vibrations, ventilations incongrues et souffle atmosphérique de grande rigueur rythmique."Two pages", "Music in fiths", "Music in contrary motion", et "Music in Similar Motion" se succèdent en "mouvement". Erwan Keravec transpose les pièces citées pour réjouir les auditeurs de sons étranges, lancinants, déroutants,déboussolant d’impertinence mais de respect pour l'écriture de Philip Glass. L'obsession est reine et enivre, hypnotise. Ces instants de délectation peuvent horripiler ou déranger tant la vivacité, les fréquences, le volume sonore emplissent la salle et inondent l'atmosphère de notes tenues agaçantes.Mais si originales en tant que formation musicale que les cornemuses deviennent sympathiques et audibles.

 A l'Arsenal dans le cadre de Cité internationale de musique de Metz et le festrival MUSICA METZ

Les Percussions de Strasbourg
Matthieu Benigno
Pin-Cheng Chiu
Hyoungkwon Gil
Léa Koster
Emil Kuyumcuyan
Théo His-Mahier
Minh-Tâm Nguyen
Lou Renaud-Bailly
Hsin-Hsuan Wu
Yi-Ping Yang et leshuit sonneurs autour de Erwan Keravec

 

dimanche 6 octobre 2024

"EGAL=" Les Percussions de Strasbourg: égaler les sons en les regardant, les imaginant: une expérienne sensorielle et "solidienne" rarissime

 


Qu’est-ce que le son et comment le percevons-nous ? Sous la forme d’un concert suivi d’un temps d’échange, il s’agit de croiser les expériences pour mieux déconstruire nos perceptions.

Porté par Musica en collaboration avec Les Percussions de Strasbourg, EGAL= Expérience d'écoute globale est un parcours sensoriel inspiré et nourri par la culture sourde. Cet espace d’exploration permet de découvrir différents modes de perception de la musique, par une écoute corporelle tantôt visuelle, vibratoire ou encore solidienne.

Une rencontre d'exception avec les trois protagonistes chercheurs des Percussions de Strasbourg, à l'Agora, un centre social, culturel, médiathèque doté d'une salle de spectacle, en bordure de Metz centre. A partir de la partition de Simon Løffler, C (2013) c'est à une expérience de "musique sans le son" que nous participons du regard. "voyez la musique, écoutez la danse" disait Balanchine, "compositeur" de la danse! Alors c'est un duo magnifique qui s'adresse à nous: des gestes évoquant les dimensions, les hauteurs, les forces et intensités en autant de verbes d'action: des sons gestuels comme pousser, élever,vibrer,aplanir, résonner, maintenir, écarter, renverser, rejoindre, effleurent la pensée vagabonde ainsi sollicitée. C'est de toute beauté et la frontière avec la danse est proche. Les corps parlent et murmurent à l'envi: sans le son qui gambade ailleurs que dans nos oreilles. L'imagination sollicité comme un jeu de piste ludique et sensoriel.


Avec l'oeuvre de Mark Applebaum, Tlön (1995) c'est trois chefs d'orchestre qui incarnent le mouvement corporel généré par les sons: ceux à diriger en mimétisme de règles de direction d'orchestre. Avec pupitre comme soutient visuel pour mieux visualiser les actions corporelles. Drôle et jamais caricaturale, cette "démonstration" de haut vol est convaincante et illustre le propos. Nous sommes les musiciens à éclairer, ils sont les directeurs de nos exécutions musicales et saluent le public...de dos! Battre la mesure comme une signature de mouvements d'une symphonie absente, muette, éloquence et résonance des gestes évocateurs de sons. On travaille assidument à cette représentation.

Puis avec l'opus de  Jeppe Ernst, Offertorium : Behandling A (2018) on assiste à un duo tendre et plein de charme. Les deux interprètes, toujours sans aucune touche musicale, se frôle, dessinent les contours de leurs visages, se touchent intimement, s'apprivoisent: un meli-melo de mains, de bras comme un livre d'images que l'on feuillette amoureusement. Délicieux moment de grâce, de mouvements qui inspirent sons, rythmes et musique selon sa propre inspiration et imagination. Jeux de mains dans un respect et une préciosité de toute beauté.

Et puis l'expérience phare demeure celle de l'expérience de l'écoute corporelle solidienne. En fer à cheval, le public est invité à "mordre" dans une tige de bois pour expérimenter le son issu des trois glockenspiel des trois musiciens aux consoles. Le tableau est croustillant d'observer chacun, relié à l'autre, mordre cet "accessoire" vecteur de réverbérations sonores par le truchement des os du crane et et de la mâchoire non des tympans! Bel exercice participatif de collaboration et partages des fruits d'une recherche fouillée et passionnante.

Au final de cette cession de travail collectif, deux tam-tam sont à notre disposition pour expérimenter les vibrations des touches percussives du percussionniste L'oeuvre de James Tenney, Having never written a Note for percussion (1971) devient terrain de jeu et vecteur de sensations vibratoires du bel effet de détente, décontraction et lâcher prise. Un temps pour tous et surtout en direction d'un public mal-entendant d'une rare qualité émotionnelle autant que ludique et thérapeutique.Divertissante aussi bordé d'un temps d'échanges de paroles généreux et fructueux!


Percussions de Strasbourg
Matthieu Benigno
Pin-Cheng Chiu
Hyoungkwon Gil
Lou Renaud-Bailly


Présenté avec la Cité musicale-Metz et l'Agora le 5 Octobre dans le cadre de MUSICA METZ