Dans le sillage de l’enseignement de Louis Andriessen s’est développée « L’école de La Haye ». Depuis plus de 50 ans, la ville est devenue un centre névralgique de la musique contemporaine aux Pays-Bas, mais aussi un point de jonction musicale entre l’Europe et les États-Unis.
Il en découle une singularité esthétique, une sorte de synthèse transatlantique dont l’Ensemble Klang est l’un des principaux animateurs. On l’entend chez Andriessen, en particulier dans Hout, comme chez son élève le Chypriote Yannis Kyriakides, la Belge Maya Verlaak, l’Italien Giuliano Bracci ou l’Étatsunien Keir Neuringer — un creuset d’influences synonyme d’innovation sonore.
En préambule de cette belle matinée musicale, c'est la lumière du soleil qui s’immisce sur le plateau et rayonne sur les six musiciens de l'Ensemble.
C'est l'oeuvre de Giuliano Braccin, Pÿramide, à Paul Klee (2012 - création française) qui inaugure le programme: échos et réverbération des sons de chaque instrument, trois vents et bois, un piano, un xylophone, une guitare. Atmosphère alanguie, douceur, lenteur font naitre des sons étirés, spatiaux. Tels des perles de musique égrenées au gré des vents, les timbres de chaque instrument restent distincts.Et se succèdent dans une belle et tendre fluidité très inspirée. Paul Klee, le peintre, poete et musicien y est évoqué, "funambule" et porteur d'harmonie autant que de singularité.Cette poésie sonore aux accents d'une marche onirique, lente et rêveuse fait effet d'atmosphère nostralgique.
Suit la composition de Yannnis Kyriakides, Chaoids (2001 - création française) pour guitare, percussions et saxophone. La virulence tectonique surprend et secoue l'écoute: un rythme à trois marques en est la matière répétitive dans ce démarrage en trombe Par petites touches colorées qui s'ajoutent à la métrique, insistance de la reprise. L saxophone, le xylophone y seraient presque mélodiques... En sous-couche un tempo régulier se fait récurent, craquelle et fritte le son. Le saxo halète et tel un carillon, le xylo délivre des sons de clochettes de campanile. Les hauteurs se mélangent, et la balade sur les chemins de traverse sans embuche peut continuer. Entêtante et pugnace, l'ascension des sons se précise dans une belle accélération, foisonnante, riche. L'implosion finale pour orner le tout d'une conclusion jubilatoire.
A l'oeuvre de Maya Verlaak, Vanishing Point (2022 - création française) de faire suite: un seul percussionniste aux cymbales cuivrées.Accompagné d'une bande électroacoustique, c'est le chiffre trois qui l'obsède en écho.Décliné, répété, repris à l'envi.Radicale composition, sobre et efficace, aux tonalités feutrées.Éclate une virulente intrusion sonore qui élargit le spectre du rythme et de l'espace. Avec une grande virtuosité explosive l'interprète Joey Marijs s'éclate et frissonne, les gestes larges, l'ampleur et l'envergure de ses bras et de son corps dessinant dans l'espace des esquisses chorégraphiques certaines Le retour à l'ordre des trois temps vient border de son calme apparent cet opus plein de charme.
A l'ensemble dans son entier d'interpréter de Keir Neuringer, Thoreau Day (for Kadri Gopalnath) (2020 - création française) Un hommage au philosophe "des bois", des instruments à vent et de cet ensemble de clairière sylvestre. Une belle et harmonieuse symbiose spatiale en fait une oeuvre fluide, dense, sans incidents, ample, planante La "mélodie" des vents en poupe, les postures des autres instruments comme ornementation aux sons suaves, doux et langoureux.La fluidité cosmique s' entremêle dans ce chant plaisant horizon linéaire sans surprise.
De Louis Andriessen, Hout (1991) vient clore le concert en hommage au "maitre" de la valorisation de l'instrumentaliste et du joueur, interprète. Un canon à quatre voix pour piano, percussions, guitare et saxophone. Très vif tel une course contre la montre à celui qui va gagner sa place finale. Poursuite, arrêts brefs comme au jeu de 1/2/3...4 Soleil! On y imagine un film d'animation, pixilation des notes pour chaque instrument prêt à garder et protéger son territoire. Et faire jeu de marelle et montée au ciel tant la tension et l'énergie s'y rassemblent, s'y précisent. Dans un rythme infernal, solide, appuyé on se tient en haleine et tous gardent le cap dans la répétition, les courbes de niveau sonore. Des pulsations ininterrompues ascensionnelles comme credo, leitmotiv jouissif.L'énergie physique, la dynamique sourdent de cette résistance affolante, cette endurance musicale qui conduit à faire de cet opus une oeuvre performance sans être "à bout de souffle".
Ensemble Klang
saxophone | Michiel van Dijk, Erik-Jan de With
trombone | Anton van Houten
guitare électrique | Pete Harden
piano | Saskia Lankhoorn
percussions | Joey Marijs
dans le cadre de Nord Sonore, musiques aventureuses des Pays-Bas - projet initié par et avec le soutien du Performing Arts Fund NL.
Le 21 SEPTEMBRE à la salle Ponnelle dans le cadre du festival MUSICA
samedi 21 septembre 2024 — 11h00 Salle Ponnelle
1 commentaires:
beau partage . merci de faire vivre les oeuvres longtemps après qu'elles aient été données Georges Yoram Federmann
Enregistrer un commentaire