vendredi 2 février 2024

"Ma créature": dés-obeissance et dé-règlementation: les 400 coups!

 


Aujourd’hui, pour les bienfaits d’une expérimentation peu commune, nous inaugurons une nouvelle salle de classe au décor beau comme une estampe. La maîtresse, Miss Olassido, s’apprête à y donner un cours de vivre ensemble où il est question d’obéissance et de respect des règles. Et ça tombe bien parce qu’aujourd’hui, une nouvelle élève, mademoiselle Chissa Kobé, arrive tout droit du Japon, pays connu pour sa droiture et son organisation sans faille. Mais par excès de zèle, l’élève modèle trouble la maîtresse et sème le désordre. Un pas de côté vers l’anormal et c’est l’expérience du chaos et de la transformation. Il suffit de peu pour que les rôles s’inversent, que les identités se révèlent et que tout, littéralement, se mette à désobéir. Et si désobéir, c’était s’obéir à soi-même ? Et si désobéir, c’était donner de l’espace au « ma », ce vide qui, dans la philosophie japonaise, laisse place aux possibles ? Si c’était créer ma créature ? Nous emmenant sur les rives d’une mer imaginaire, le tandem formé par Delphine Lanson, comédienne et Chiharu Mamiya, danseuse, composent une ode à la liberté et à la créativité. 

 

Qui a eu cette idée folle un jour d'inventer l'école?
L'école, au centre de ce joyeux spectacle, iconoclaste en herbe, en diable. Car ici l'inauguration d'une nouvelle classe donne lieu à une expérimentation singulière: apprendre à désobéir en toute légitimité. Certes, la maitresse est frondeuse, drôle, décapante et hors norme. Les élèves, ce sont des "vrais" engagés pour l'occasion à faire une belle "figuration libre" intelligente et bien orchestrée, préparée d'avance. Parmi les élèves, une "nouvelle", jeune japonaise pleine d'allant qui sème peu à peu la zizanie dans ce petit monde encore trop obéissant. Elle y va de son expression spontanée, de son franc parlé, de sa verve pour initier au désordre, au chaos salvateur. Hors de ses gonds et pour le bien de soi-même et des autres. La transgression est bonne, méthode Piaget ou Dolto clame la maitresse debout sur son bureau en alpaguant l'inspecteur d'académie: pour le convaincre du bien de cette démarche: un zéro de conduite pointé pour tous dans ce joli chaos de mise en scène où nos deux anti-héroines se la joue plein pot et plein de malice et d'humour. L'élève danse pour chaque jour, profiter de la vie et avec sa petite jupe rouge, défie les lois de la bienséance. Alors que l'institutrice s'ingénie encore à rester dans les rangs: debout, assis, les enfants exécutent encore les ordres. On inverse les rôles et c'est "l 'inversion climatique" comme pour le carnaval.On ficelle la maitresse à une chaise.Puis arrive la tempête dans cette classe où règne l'indiscipline. Chacun y jette son bout de papier, se met dans la poubelle, renverse la donne et gagne du terrain. La vie est belle comme ce décor mouvant fait d'images, d'illustrations originales, comme un film d'animation japonais, un manga ou autres icônes traditionnelles. Indisciplinaire à souhait, ce spectacle participatif et collectif rayonne de punch, de joie, de bonne santé morale et l'on s'y retrouve, rêvant de liberté sans les règles de bonne conduite sacro-saintes.Une bouffée d'air frais pour tous, une joyeuses assemblée qui partage des interrogations fortes sur notre comportement, sur l'éducation et ses sources d'empêchement d'expression, de développement hors des sentiers battus. Une révolution de palais pour le plaisir de tous. Se laisser aller, changer pour devenir sirène ou petit bateau navigant au gré de nos envies. Qui suis-je, qui veux-tu être vraiment sans le carcan, le cadre qui unifie, standardise tout. Là est la question: que chacun puisse y répondre dans le respect des lois du savoir vivre et être ensemble. Ce "ma" japonais: une leçon d'émancipation salvatrice pour créatures en devenir! Les deux comédienne et danseuse jouant le jeu à fond parmi les enfants enchantés de ce grand désordre organisé: quel bazar!

Depuis sa création en 1995, Anomalie joue avec les genres et explore de nouveaux territoires aux frontières du cirque contemporain, au gré de collaborations artistiques renouvelées à chaque création. Depuis 2015, le chemin de la compagnie se dessine au travers des choix engagés par ses co-directeur·rices, à la fois artistes de cirque, comédien·nes, metteur·es en scène et cinéastes. Bousculant volontiers les codes et les références de la création contemporaine, iels inventent un théâtre physique et fantastique avec une recherche esthétique en partie inspirée par le cinéma. Dans un univers à cheval entre réel et imaginaire, Anomalie invente des histoires dans lesquelles il est souvent question de la transformation. Co-directrice artistique, Delphine Lanson est metteure en scène, comédienne et réalisatrice. Elle travaille en étroite collaboration à l’écriture, à la mise en scène et au plateau, avec des artistes de cirque et de danse dont Kaori Ito. Danseuse et chorégraphe, Chiharu Mamiya est une collaboratrice régulière d’Anomalie. Interprète pour de nombreuses compagnies de danse, dont Kubilai Khan Investigations, elle fonde en 2014 la compagnie Elbissop.
A u TJP jusqu'au 4 Février


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