samedi 11 novembre 2017

"Ralph Towner solo" et "Paolo Fresu duo": et Devil 4Tet: Jazzdor open !

Deux esthètes de la mélodie, deux immenses musiciens qui croisent leurs univers le temps d'une soirée d'ouverture du festival Jazzdor 2017. Le guitariste américain Ralph Towner et le trompettiste italien Paolo Fresu se succèdent et se croisert pour un dialogue d'une grande générosité. Soirée d'ouverture de la 32ème édition du Festival Jazzdor (10-24 novembre).

Après une présentation officielle  consacrée à marquer l' ouverture du festival^par Philippe Ochem, directeur artistique infatigable et Alain Fontanel, adjoint à la Culture de la Ville de Strasbourg, place sur le  plateau au guitariste légendaire Ralph Towner: un solo brillant et virtuose, plein de poésie et d'allant sur des motifs voisins de standard ou de tonalités empruntes à d'autres culture: un moment de douceur que l'écoute de cette "guitare" sèche, "pincée" par un artiste humble et discret, sobre et talentueux.Bill Evans veille au grain!
Place au duo avec Paolo Fresu, un pur instant de félicité pour cette "réunion" de charme qui opère sur le mode surprise et référence pour illuminer ce début de soirée conviviale: un apéritif en pause entracte et voici le quatuor tant attendu

Paolo Fresu devil 4Tet
D'après des histoires vraies
On démarre sur les chapeaux de roue avec des morceaux de référence "Ambre" , "Desertico"et des pièces de leur dernier album
Puis c'est au trompettiste, le "patron" de la formation de présenter les origines , la genèse de cette musique si gaie et enthousiasmante: d'après des histoires vraies, du vécu, des rencontres, des aventures de tournée, les morceaux s'inventent, naissent, se construisent et atterrissent sur la scène .Les aventures des musiciens en Toscane, à Lucca en hommage à Chet Backer, sont délicieuses et révélatrices du talent de ce musicien, magicien du verbe autant que de la trompette !
Avec un accent délicieux, notre comédien-musicien-animateur se donne et offre le meilleur de sa générosité, humaine et musicale; un clin d’œil à Fellini et l'on embarque au fil des mélodies: e la nave va!
Au final, en rappel , deux "berceuses" maison, écrites à l'occasion de façon traditionnelle en hommage aux naissances des fils de ces "pères", passeurs de lumière, de bonheur et de jazz ébouriffant! Jazz dort pour terminer la soirée: bonne nuit les petits et les grands!
Enfant phare, en fanfare pour cette "ouverture" de jazzdor!
Laurent Kohler croque le concert en direct !


A la Cité de la Musique et de la Danse le vendredi 10 Novembre

vendredi 10 novembre 2017

"En attendant les hirondelles": la danse comme révélateur




Un film de Karim Moussaoui, chorégraphie de Georgia Ives pour un très beau duo d'amour et un ensemble dansé dans le désert de toute beauté contemporaine et inspiré du folklore algérien!
Aujourd’hui, en Algérie. Passé et présent s’entrechoquent dans les vies d’un riche promoteur immobilier, d’un neurologue ambitieux rattrapé par son passé, et d’une jeune femme tiraillée entre la voie de la raison et ses sentiments. Trois histoires qui nous plongent dans l'âme humaine de la société arabe contemporaine.

"Crowd": Giséle Vienne et sa rêve partie ! Free party et son "sens de la fête ! Emportée par la foule!




De Gisèle Vienne // Présenté avec POLE-SUD, dans le cadre de la Biennale de la Danse Grand Est et du Parcours Danse // CRÉATION.
"Dans un grand huit émotionnel, quinze danseurs explorent à travers une fête, dont la structure évoque de nombreux rituels, l’aspect jubilatoire et exutoire de la violence. Les plaisirs, les désirs et les tensions générés par ce type de situations sont les éléments centraux de cette pièce, qui déterminent la façon dont s’articule le groupe. La musique impulse une excitation chorégraphique où l’exaltation tient une place centrale. Crowd, dernière création de Gisèle Vienne, est une chorégraphie sur un DJ-set de Peter Rehberg et une composition originale du duo novateur KTL. La chorégraphie fait écho à une sensibilité très contemporaine, où la réalité du spectacle vivant rencontre et intègre le champ des possibilités gestuelles qu’offrent les mouvements générés par le montage vidéo et les effets spéciaux. Le temps en vient à s’altérer et se distordre."

Emportée par "la foule", Giséle Vienne foule du pied les a priori sur les communautés qui s'adonnent aux "rave party" dans une communion solennelle, sociale qui booste et galvanise les rassemblements qui pulsent nos fébrilités mouvantes débridées.Rave de valse de Vienne oblige....
Ils apparaissent en fond de scène un par un comme pour se présenter: personnes foulant un sol de terre battue d'un no man's land improbable....Vêtus simplement mais plutôt négligemment, ils démarrent une errance, lente et tranquille, apaisée, énigmatique: un "ralenti" cinématographique? Point n'en est: une lenteur organique, issue de l'énergie douce de corps en micro-mouvement Ça bouge intensément à l'intérieur pour ne faire sourdre que l'essentiel de "petits bougés"
Musique en boucle, décibels au poing, elle ne cessera d'accompagner les déambulations de ce "groupe", cellule vivante qui se déploie au fur et à mesure, jusqu'à investir tout le plateau: quinze danseurs, quinze destins qui se croisent et dansent un rituel de communauté-on imagine ce que l'on veut-Croisements de regards, sourires aux lèvres, chacun fait son parcours initiatique, ôte ses vêtements lentement, esquisse gestes et attitudes, poses et arrêt sur "image"et esquive le contact.Le sol est jonché de détritus, abandonnées, délaissés comme ces êtres qui errent et se fondent dans le paysage musical. Un danseur s'isole dans la lumière et c'est un instant de grâce, une danseuse se donne, se délivre, cheveux défaits, comme une madone: on parcourt une véritable galerie de tableaux classiques, académiques tant la lumière et la gestuelle sont à vif et à porté de regard prolongé sur eux: un "radeau de la Méduse" que ce naufrage d'humanité, navire dans la  débâcle, à la dérive... C'est beau et touchant, esthétiquement virtuose et plein de concentration quasi mystique et religieuse .Un partage solennel avec le public, qui en forte empathie, ne pipe mot ni ne bouge! Ode à la lenteur suprême, au délié délicat, à la marche altière et retenue....
Sur ce tarmac, cette plate-forme d'où personne ne décolle, sauf par l'imaginaire, la tension monte, on s'y confronte mais toujours dans "le bien", jamais dans l'agressivité.Chacun semble s'immoler dans cet univers souillé immondices
On songe aux images- tableaux de David La Chapelle, aux photos de Cindy Sherman, aux sculptures de Lucy et Jorge  Orta ou de Daniel Firman. Mais bien "vivantes" délivrant devant nous leur énergie douce, très "zen" et contagieuse.
Le spectacle ne s'enlise jamais, glisse et s'écoule dans ce temps suspendu en apesanteur: si tout s'arrête parfois pour mieux reprendre, c'est aussi pulsations et respirations qui se tiennent suspendues en apnée. Les images sont fortes et s'impriment dans les mémoires, le sol leur fait signe en fin de"party": mort et résurrection des cendres pour mieux disparaître un par un, laissant seul celui qui ramasse vêtements et restes de ce "banquet", reliefs de vie et de corps, traces d'un passage éphémère dans nos vies; suppliant ou rédempteur, lavé des "péchés" de ce monde dans une joie étonnante jamais désespérée. Cérémonie liturgique avec sermon, élévation, offertoire et eucharistie: la messe pour les temps présent se partage et opère sous le charmes des déploiements de lenteur et recueillement.
Un "espoir" de vie malgré tout, un grand désir sensuel et organique délivré par ces présences magistrales d'interprètes virtuoses du "petit rien" qui émeut (e motion) au paroxysme de l'écriture chorégraphique, de la dramaturgie, lente ascension vers le divin, la prière et la réconciliation
Il y a du mystique chez Gisèle Vienne, de l'académisme en soulèvement à la Didi Huberman que l'on salue spirituellement
Merci pour ce rituel , "rêve party" de charme et de douleurs, où l’héroïne se donne, s’arque boute et se livre comme une messagère, témoin de son temps, rédemptrice sacrifiée, élue de tous, les bras ouverts, salvatrice et pardonnant   péchés et souillures de l'humanité
Un chef d'oeuvre que cette "foule" dans la houle qui nous emporte dans sa lente ascension vers le vertige hypnotique d'un rituel naturel.
 "Crowd" au Maillon Wacken jusqu'au 10 Novembre