"Il est des légendes qui hantent les mémoires villageoises. En 1869, d’étranges phénomènes surviennent à Illfurth, au sud de l’Alsace, où deux enfants victimes de possessions démoniaques furent exorcisés. Natif de ce village, Lionel Lingelser s’empare de cette histoire et y mêle son propre parcours, celui d’un jeune comédien dans son apprentissage, ses doutes mais aussi ses tourments.
Rarement les frontières entre réel et fantasme se sont autant brouillées. Personne et personnage se confondent dans un va-et-vient constant entre le récit intime et la folie libératrice. La grâce de cet incroyable comédien, seul sur scène, transporte le public dans un bal d’émotions exacerbées. Lionel Lingelser offre un flot intarissable de rires, de larmes et croque le présent jusqu’à la dernière miette. Un coup de cœur et un coup de maître !"
Coup de maitre à danser pour cet acteur-comédien hors pair qui déboule dans la grande salle polyvalente de la MAC de Bischwiller: seul et avec" tambour et trompette" il arpente l'espace, vêtu d'une houppelande noire, couronné comme un roitelet de pacotille. Apparition prometteuse de charivari, de tohu-bohu bien frappé à la mesure de ce conte pas "de fée" du tout, fait plutôt pour réveiller en nous fantasmes et cauchemars... Faits d'hiver ou de saison dans ce parcours initiatique d'une vie d'enfant malmené par le sort, fils d'Alsaciens du Sundgau, ficelé par une adhérence au territoire, à l'accent et à toutes sortes de légendes du cru qui façonne un imaginaire, un comportement social de sauvage atypique.Il est avec nous, ce personnage protéiforme, polymorphe en diable qui incarne toutes ses idoles ou tous ses détracteurs en un tour de main de prestidigitateur. Lionel Lingelser "incarne" au plus près de ses attitudes physiques changeantes, de sa voix médusante, les hommes et femmes de son environnement proche; de son metteur en scène tyrannique qui le bride où l’exhorte à trouver son "soi-même" dans le jeu de comédien à son grand-père fantasmé...Un curé diabolique s'échappe de son univers en proposant une visite guidée scolaire détonante de la cathédrale de Strasbourg...Tout converge ici sur le plateau à mener tambour battant un récit multiple qui obéit à une dramaturgie savante de comédie, cabaret, show ou drad queen aux multiples visages. Facéties et aventures burlesque ou dramatiques au poing. Un club de basket héberge son adolescence en un calvaire sexuel forcé, obligé de moeurs divagantes: un viol récurent de l'entraineur devient banalité jusqu'au jour de la rupture!! Un destin destructeur, façonné par la survie, le chagrin, les souvenirs évoqués à la pelle sur l'immense plateau. Le comédien-danseur, acrobate ou circassien dans l'âme et le corps nous entraine en empathie avec son "autobiographie" qui comme une claque se reçoit en plein visage et heurte notre bonne conscience.Cet enfant, cet adolescent, cet homme torturé possède un corps expressif à l'envi, pétri de langage corporel issu d'un travail sur les masque, le "masque" ce petit appendice qui met en évidence toute la carcasse d'un humain pas si légendaire que cela. Car tout ce qui est évoqué ici dans un texte original est réalité, faits et gestes contemporains qui émergent d'un corps galvanisé par les mots, les silences, l'immobilité aussi dans des éclairages variants selon les ambiances, les univers évoqués. Il danse, saute et parcours la scène avec une aisance, une souplesse, un bougé libre et stimulant. On partage grâce à son charisme, la destinée de ces "possédés" d'Illfurth comme un feuilleton passionnant, en apnée, médusé par le savoir faire et être de ce comédien pétri de talents.Et ce "duende" tant recherché par cet homme au masque de comédia d'el arte raté, va émerger subitement pour donner des ailes de chauve souris à cet homme hybride, à la cape de Zorro perdu.
A la MAC de Bischwiller le 5 Janvier
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