samedi 18 janvier 2025

Akiko Hasegawa : "Kanashimi " efleurage à pétales. Lamentations distantes et distendues. Bonjour, Adieu tristesse !

 


Kanashimi

Après avoir exploré le corps en joie dans un premier solo (Haré Dance), Akiko Hasegawa sonde la tristesse (Kanashimi). La danseuse strasbourgeoise, installée en France depuis le milieu des années 1990, poursuit un voyage intérieur autour de moments clés de son existence. Solitude et éloignement familial, danse au bord des larmes de Marta Graham, rencontre avec la tragédie Grecque sous un soleil de plomb, perte d’êtres chers… Autant de montagnes russes d’émotions qu’elle traverse au son du violon d’Aline Zeller. Sur une note tendue, redescendre là où le cœur se serre, avoir besoin de lumière et retrouver la brûlure de vivre poussant à remonter la pente. Mêler la danse, la présence et l’absence, l’ici et l’ailleurs.

 Sa silhouette se dessine à peine dans la pénombre... Seule dans l'opacité du noir, dessinée en contours imperceptibles. On la découvre en jogging, cagoule ou capuchon tendu, veste également outrancièrement distendue comme une seconde peau qui tente de muer, de se déchirer. Hommage à Martha Graham dans "Lamentation", clin d'oeil à l'histoire de la danse et de ses femmes "pionnières".  Sans doute..Elle insiste pour détendre et relâcher de toute sa peau cette pelure artificielle et sous cette plissure, des clochettes s’égrènent au sol, tintinnabulant. Son corps, massif, s'expose et vibre. Sa seconde doublure apparait: une violoniste qui l'accompagnera durant ses cinq tableaux successifs. Instrument qui prolonge le corps de son interprète qui prend le haut du plateau. Deux pour un solo dansé où les formes du corps de Akiko Hasegawa prennent de l'aisance, se déploient sous les lumières et couleurs de pastel à la Rothko qui la teintent de douceur, de flou évanescent. Noire, sera sa tunique, longue et seyante pour exprimer la douleur, l'intimité de la tristesse. 


Puis un long voile rouge en fera une Willis égarée, spectrale traversant elle aussi l'histoire du ballet: ces êtres diaphanes qui hantent les fantasmes du XIX siècle. Reine ou ectoplasme naviguant sur le plateau à la recherche d'une identité. La danseuse sème le trouble, isolée de toute influence, droite et directe, poétique et fluide, le corps asservi à ses désirs de calme, de tranquillité, de jubilation intérieure. Pour les transmettre et communiquer à un public attentif bercé par les sons, les vibrations de l'instrument à cordes, rivé à Aline Zeller.Fleur de tulipier ou magnolia en couronne qu'elle effeuille doucement, pétale après pétale: une façon bien à elle de faire de l'effeuillage discret et poétique, couronné par ce végétal symbolique à la japonaise.

Ce solo en pleine éclosion fertile est un bon signe de l'évolution du travail hypnotique de la danseuse au coeur généreux, à la plastique bien ancrée et solide.


A Pole Sud le 17/ 18 Janvier dans le cadre du festival "L'année commence avec elles"



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